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Autoroute Est-Ouest en Algérie: un milliard de dollars de commissions mais pas de procès
Publié dans Le Quotidien d'Algérie le 17 - 04 - 2014

http://blogs.mediapart.fr/edition/enquetes-au-maghreb
16 AVRIL 2014 | PAR LYAS HALLAS
Le gigantesque projet d'autoroute Est-ouest a été lancé en Algérie il y a huit ans. Toujours inachevé, il présente déjà des malfaçons sur les tronçons ouverts à la circulation… Mais ce chantier, selon une enquête judiciaire, a surtout donné lieu à une spectaculaire entreprise de corruption. Où l'on retrouve des ministres, de nombreux intermédiaires et le sulfureux homme d'affaires Pierre Falcone. Point de l'enquête et nouveaux éléments.
Le scandale éclate dès 2009. Le service de police judiciaire de la Direction renseignement et sécurité (DRS) transmet alors à la justice le dossier d'un personnage qui se faisait passer pour un des leurs. Il s'appelle Chani Medjdoub et « travaille» pour le consortium chinois CITIC-CRCC, engagé dans la construction de l'autoroute Est-ouest. L'autoroute Est-ouest est le chantier phare des programmes publics de l'ère du président Bouteflika. Lancés en 2006, les 1.200 kilomètres qui connectent la frontière tunisienne à la frontière marocaine ne sont toujours pas achevés en avril 2014. Le montant du marché est le plus élevé pour un contrat en Afrique : 11,4 milliards de dollars.
Le tracé de l'autoroute.
Chani Medjdoub devient vite l'accusé principal d'un scandale qui ne cesse de grandir : le total des commissions et pots de vin est évalué par certains protagonistes à près d'un milliard de dollars ! Homme d'affaires peu connu en Algérie, Chani Medjdoub est un influent lobbyiste. Il aurait, selon des enquêteurs du DRS, profité de ses relations à différents niveaux de l'Etat pour favoriser les compagnies chinoises lors des procédures d'appels d'offres.
Des acteurs secondaires, des décideurs protégés
C'est du moins ce que l'enquête judiciaire a établi à ce stade. Et c'est ce qui devrait être discuté lors d'un procès qui tarde à s'ouvrir. La Cour suprême a en effet reporté sine die sa décision sur les pourvois introduits par plusieurs prévenus en vue de casser l'ordonnance de renvoi de la chambre d'accusation de la Cour d'Alger. C'était en janvier dernier. «Le report de la décision de la Cour permet d'éviter la tenue d'un procès avant l'élection présidentielle», explique à Maghreb Emergent l'avocat d'un des prévenus.
Les accusés sont au nombre de dix-huit. Quatre sont en détention préventive depuis plus de deux ans et un est en fuite. Dans le lot des entreprises incriminées, des sous-traitants étrangers de CITIC-CRCC. Tous doivent répondre des chefs d'inculpation suivants : association de malfaiteurs, trafic d'influence, corruption et blanchiment d'argent. Mais à l'examen, la plupart des accusés ne sont que des acteurs secondaires dans le vaste système de corruption qu'ils ont décrit aux enquêteurs. Mis en cause, le ministre des travaux publics en charge du projet, Amar Ghoul a été appelé comme témoin. Il n'est pas inquiété. Aucun autre ministre, ancien ou en exercice, n'a été convoqué par le magistrat instructeur. Aucun des «amis» de Chani ne figure sur la liste des prévenus.
Amar Ghoul, à l'époque ministre des travaux publics, aujourd'hui ministre des transports. © (dr)
Enfin, cité par plusieurs inculpés comme l'un des principaux bénéficiaires du système de commissions occultes, le sulfureux homme d'affaires français Pierre Falcone n'a pas même été entendu. Alors, un procès public inquiète-t-il donc à ce point le pouvoir ? Et qui est vraiment Chani Medjdoub pour qu'on hésite aini à le juger?
Une connexion « finances et renseignement »
Né à Ain Sefra, dans la Saoura, Chani Medjdoub émigre au Luxembourg en 1987. Aujourd'hui âgé de 61 ans, il a 34 ans quand il s'installe dans ce paradis fiscal pour faire des études supérieures dans le domaine des finances. Il travaille dans le secteur bancaire avant de monter ses propres affaires qui vont prospérer dès son retour en Algérie. Ses explications aux enquêteurs du DRS et ses réponses au magistrat instructeur, comme celles d'autres personnes mises en cause ou témoins dans cette affaire, révèlent des liens étroits avec des hommes politiques, des hommes d'affaires et des cadres des services algériens de renseignement.
L'ordonnance de renvoi de l'affaire N° 11/02050, désormais connue comme «l'affaire de l'autoroute Est-ouest», que nous avons pu consulter, détaille ces réseaux de relations et d'influence. L'ancien directeur des nouveaux projets à l'Agence nationale des autoroutes (ANA), Mohamed Khelladi, a, selon l'ordonnance, reçu Chani Medjdoub sur recommandation d'un officier général du DRS qui répond au petit nom d'«Abdelghani». Selon ce même document, Khelladi a ensuite informé, vers la fin de 2008, le général Abdelkader Ait Ourab, dit Hassan, alors coordonnateur de la lutte antiterroriste, de la teneur de cette entrevue avec Chani Medjdoub.
«C'est le général Abdelghani qui m'a demandé de le recevoir. Chani m'a dit que le groupement chinois pour lequel il travaille disposait d'une caisse noire et m'a demandé de l'aider pour qu'il la mette à la disposition du DRS à l'étranger», a confié Mohamed Khelladi au général Hassan, selon les éléments de l'enquête judiciaire. Inculpé et en détention préventive depuis 2009, Mohamed Khelladi doit sa carrière administrative au ministre Amar Ghoul qui l'avait recruté quand il était à la tête du ministère de la Pêche.
Autre connaissance de Chani Medjdoub : Abdelhamid Melzi. Chani Medjdoub affirme l'avoir aidé en 1996, quand il était directeur du Palais du Peuple (il est actuellement directeur des résidences de l'Etat) et avait alors pour mission de trouver au Luxembourg un montage financier pour le projet du Sheraton d'Alger. Melzi a été recommandé à Medjdoub par le colonel Sadek, Ait Mesbah de son vrai nom, devenu général-major par la suite, et désormais en retraite, qui siégeait alors à la présidence de la République. Melzi dément, dans sa déposition faite au juge d'instruction, toute aide apportée par Chani Medjdoub pour ce projet du Sheraton, mais il reconnaît l'avoir «croisé» au Luxembourg.
Cette relation avec Melzi n'en est pas restée là. C'est Melzi qui met par la suite Chani Medjdoub en contact avec le secrétaire général du ministère des Travaux publics, Mohamed Bouchama, également mis en cause dans l'affaire de l'autoroute Est-ouest. De même, Chani Medjdoub a conseillé, à titre «gracieux», le fils de Melzi dans son projet de monter une entreprise de fabrication de glaces.
Une première alerte avec le FAKI
A son retour en Algérie en 2003, peut-on encore lire dans l'ordonnance de renvoi, Chani Medjdoub fait la connaissance de l'ancien ministre des Finances Abdelatif Benachenhou et discute avec lui de la création d'une école de banques en Algérie. Un an plus tard, au début du second mandat du président Bouteflika, il est reçu au ministère des finances et évoque avec Abdelatif Benachenhou le futur projet de l'autoroute Est-ouest, le manque de filiales de banques étrangères d'investissement en Algérie et même de la création d'un fonds pour«soutenir la politique du président et de son programme».
Les premiers ennuis de Chani Medjdoub avec la justice surviennent en 2006. Lorsqu'éclate le scandale du fonds algéro-koweïtien (FAKI). Il est mis en cause et écope d'une peine de six mois de prison avec sursis. Des «amis» bien placés interviennent : Nacer Mehal, alors directeur général de l'APS (Algérie Presse Service), avant de devenir brièvement ministre de la Communication, et Chami Mohamed, alors président de la Chambre de commerce. Tous deux sollicitent le colonel Khaled pour qu'il intervienne en faveur de Medjdoub. Mohamed Ouezzane de son vrai nom, le colonel Khaled était en poste au ministère de la Justice. Il est actuellement sous contrôle judiciaire dans l'affaire de l'autoroute Est-ouest.
L'enquête bute sur l'autre réseau
Lorsqu'elle tire sur le fil Chani Medjdoub, l'enquête judiciaire aboutit à une forte présomption. Le prévenu n'aurait pas eu un rôle décisif dans l'attribution du marché du siècle aux Chinois. Il est venu s'ajouter à un système de corruption « originel » et parallèle au sien. C'est sur ce premier réseau que l'ordonnance de renvoi ouvre des pistes pour s'arrêter curieusement lorsqu'elles conduisent très près du sommet du pouvoir en Algérie.
Premier fil conducteur, un autre homme d'affaires, Sid Ahmed Tajeddine Addou. Il est de longue date un proche du ministre Amar Ghoul qui l'a accompagné depuis ses débuts. Il est en détention préventive depuis 2009. Les révélations de Sid Ahmed Tajeddine Addou aux enquêteurs du DRS et au juge d'instruction, comme le précise l'ordonnance de renvoi, ne se sont pas limitées à l'autoroute Est-ouest. Travaux publics, transports, hydraulique... L'homme cite son neveu Sid Ahmed Addou qui explique comment il s'est imposé comme un intermédiaire dans la passation des marchés publics, favorisant au passage ses propres entreprises et clients. C'est l'autre volet de l'affaire.
Les deux « Addou » fournissent des renseignements au magistrat instructeur qui, après vérification et envoi de commissions rogatoires à l'étranger, inculpe un haut cadre du ministère des Transports, gendre de l'ancien ambassadeur d'Algérie à Bamako, Abdelkrim Ghrib, et les trois filles de ce dernier. Mais le magistrat s'en tient là et ne juge pas utile de pousser les investigations s'agissant du marché de l'autoroute Est-ouest, ni de creuser les pistes ouvertes par Sid Ahmed et Sid Ahmed Tajeddine Addou.
Sid Ahmed Tajeddine Addou a expliqué pourtant au juge d'instruction qu'il a appris le système de corruption mis en place par les groupes chinois auprès d'un certain Nasreddine Bousaid, dit «Sacha», un Algérien établi en France. Selon sa déposition, les deux entreprises publiques chinoises (CITIC et CRCC), bénéficiaires du marché des lots centre et ouest de l'autoroute, ont décidé de ponctionner une partie des commissions prévues pour ce « Sacha » au profit de Chani Medjdoub. Furieux, «Sacha» aurait décidé de parler.
Les 9% de Pierre Falcone
L'intermédiaire et homme d'affaires Pierre Falcone. © (dr)
C'est enfin un personnage puissant que Sid Ahmed Tajeddine Addou met en cause devant les enquêteurs. Il affirme que l'architecte du système de corruption mis en place n'est autre que l'homme d'affaires et marchand d'armes Pierre Falcone. Personnage sulfureux, ayant trois nationalités (angolaise, brésilienne et française), présent sur de nombreux marchés africains, Pierre Falcone était apparu au grand jour lors du scandale français dit de l'Angolagate : il s'agissait de ventes d'armes illégales au gouvernement angolais de José Eduardo Dos Santos, en plein guerre civile, en 1994, sans l'autorisation de l'Etat français. Cet intermédiaire a été condamné à six mois de prison par la justice française avant d'être relaxé en appel en 2011.
Selon les déclarations de Sid Ahmed Tajeddine Addou, Pierre Falcone aurait empoché 9 % des deux contrats (lots centre et ouest) enlevés par le consortium CITIC-CRCC pour 6,2 milliards de dollars. Contacté par mail via son avocat à Paris, Pierre-François Veil, Pierre Falcone n'a pas répondu en dépit de nombreuses relances par téléphone. Aucun élément matériel ne permet à ce stade de confirmer ces accusations. Mais il est vrai qu'aucune enquête n'a été ouverte, à la suite de ces fracassantes déclarations, à l'encontre de Pierre Falcone qui, à ce jour, n'a pas été entendu dans ce dossier.
« Sacha » perd la main, les langues se délient
Sid Ahmed Addou et son neveu mettent également en cause l'ancien ministre des Travaux publics Amar Ghoul, aujourd'hui ministre des Transports. Selon eux, il aurait touché une commission de 1,25 % sur les 6,2 milliards de dollars de CITIC-CRCC.
Sid Ahmed Tajeddine Addou a détaillé au juge d'instruction les principaux bénéficiaires des commissions et le système de répartition mis en place. Ainsi « Sacha», premier intermédiaire entre le gouvernement algérien et le groupe chinois représenté par Pierre Falcone, devait toucher un pot-de-vin de 1,25% avant de voir sa part revue à la baisse pour s'établir à 0,78%. Sid Ahmed Tajeddine Addou indique au juge d'instruction qu'il aurait lui-même été à l'origine du déclenchement de cette enquête judiciaire et que c'est lui qui aurait dénoncé ce système de corruption.
Il décrit le système qui aurait été mis en place : «Au fur et à mesure, Chani Medjdoub a gagné en crédit auprès des Chinois qui ont augmenté sa part des pots-de-vin de 1,25 à 5,3 % au détriment, entre autres, de Sacha qui a vu sa part baisser pour s'établir à 0,78 %. Au départ, les négociations avaient débouché sur le partage suivant : 9% pour pierre Falcone, 1,25 % pour le président du groupement chinois et 1,25 % pour sa vice-présidente, 1,25 % pour la fille de l'ancien président du même groupement, 1,25 % pour Réda Bedjaoui, le neveu de l'ancien ministre des affaires étrangères Mohamed Bedjaoui, 1,25 % pour Tayeb Kouidri, homme de confiance d'Amar Ghoul, 1,25 % pour Chani Medjdoub et 1,25 % pour Nasreddine Bousaid».
Falcone arrose le réseau des « facilitateurs »
Si ces affirmations sont exactes, le total de ces commissions représente ainsi 16% de la valeur totale du marché, près de 930 millions de dollars. Selon les déclarations des différents personnages mis en cause, l'argent bénéficiant aux négociateurs algériens et au « lobbyiste » français aurait été versé par étapes, via des sociétés écrans créées spécialement pour rétribuer chacun suivant son rôle, avant ou après la signature du contrat. Ces déclarations n'ont pas amené à l'ouverture d'une enquête sur le rôle spécifique qu'a joué Pierre Falcone. Pourtant, elles se recoupent avec celles de Mohamed Khelladi qui se réfère lui aussi à « Sacha » mais, également à un homme d'affaires chinois qui s'appelle Philip Chen.
Khelladi indique : «Pierre Falcone, qui est chargé des affaires du groupe CITIC en Afrique, perçoit 20 à 30 % sur chaque situation financière régularisée par l'Etat algérien et distribue l'argent sur les membres du réseau de lobbyistes constitué autour de lui en 2005. Le groupe compte Mohamed Bedjaoui, ses deux neveux dont Réda, Chani Medjdoub qui a remplacé Sacha, Tayeb Kouidri homme de confiance d'Amar Ghoul et des responsables du groupement chinois CITIC-CRCC. Chacun touche une somme proportionnelle au taux convenu avec lui ». Et d'ajouter : « Falcone aurait été reçu en Algérie, sans aucun protocole, par le ministre des Affaires étrangères de l'époque Mohamed Bedjaoui, et par le ministre des Travaux publics Amar Ghoul avec qui il a eu à prendre un repas ».
Chani Medjdoub pour affiner le système
L'enquête judiciaire montre finalement que le prévenu principal de son dossier, Chani Medjdoub, arrive dans la transaction de l'autoroute Est Ouest seulement en renfort. Devant le juge d'instruction, Chani Medjdoub a assuré qu'en 2004 déjà, «Pierre Falcone avait approché le gouvernement algérien par le biais de Nasreddine Bousaid (Sacha) qui l'avait mis en contact avec le ministre des Affaires étrangères, Mohamed Bedjaoui». Lorsque lui se fait recruter par Pierre Falcone auprès de CITIC-CRCC, le système de corruption est déjà bien huilé. Son parrainage est solide.
Une réunion est organisée en 2005 entre Pierre Falcone, ses clients chinois et des membres du gouvernement algérien, Mohamed Bedjaoui (affaires étrangères) et Amar Ghoul (Travaux publics). Chakib Khelil (Energie) et Abdelatif Benachenhou (Finances) décident à la dernière minute de ne pas y participer, au prétexte que le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, n'apprécierait pas la présence d'un homme d'affaires étranger dans une réunion interministérielle, même informelle. Selon Chani Medjdoub, les Chinois auraient, au cours de cette réunion exploratoire proposé de construire l'autoroute en contrepartie de pétrole, mais ce troc n'emballe pas la partie algérienne. Les discussions butent sur le mode de financement et aucun accord n'est trouvé.
Quelques mois plus tard, tout s'est arrangé. Ces mêmes Chinois de CITIC, constitués en groupement avec CRCC, une autre entreprise publique chinoise, décrochent le marché soumis à un appel d'offres. Ce faisant, Pierre Falcone, Mohamed Bedjaoui et Amar Ghoul auraient permis aux Chinois d'avoir une longueur d'avance sur leurs concurrents. Le procès du contrat du siècle dira comment et surtout à quel prix. Le jour où il se tiendra.
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Cette enquête de Lyas Hallas a été initialement publiée, le 10 avril, sur le site d'information Maghreb Emergent (cliquez ici). Cette enquête a été réalisée dans le cadre d'une formation organisée par Canal France International et réalisée par Mediapart et plusieurs confrères maghrébins de novembre 2013 à avril 2014.


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