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L'Algérie se dirige vers «le maintien d'un pouvoir exécutif hypertrophié»
Publié dans Le Quotidien d'Algérie le 21 - 05 - 2020


19 MAI 2020 PAR RACHIDA EL AZZOUZI
https://www.mediapart.fr/journal/international/
En Algérie, le projet de révision de la Constitution, mis sur la table par le nouveau président, qui souffre d'illégitimité, ne convainc pas. Pour la politologue Louisa Dris Aït-Hamadouche, il est très loin des exigences démocratiques du Hirak.
Très mal élu en décembre 2019, sur fond d'abstention abyssale, à l'occasion d'une présidentielle massivement contestée et rejetée par la rue, le nouveau président algérien Abdelmadjid Tebboune avait promis une révision « profonde » de la Constitution et l'avènement d'une « nouvelle République ».
Une main tendue au Hirak, le mouvement populaire anti-régime qui appelle depuis plus d'un an à un changement radical du « système », qui n'avait pas convaincu les foules. Cinq mois plus tard, ils sont encore moins nombreux à y croire.
« Maintien d'un pouvoir exécutif hypertrophié, avec à l'intérieur, un chef de l'Etat dominant », tentative de récupération politique du Hirak, en le constitutionnalisant et en le reliant à l'armée, « en quête d'une nouvelle légitimité à ajouter à la légitimité révolutionnaire et sécuritaire »…
Pour la politologue algérienne Louisa Dris Aït-Hamadouche, maître de conférences à la faculté des sciences politiques et des relations internationales d'Alger, l'avant-projet de révision de la Constitution, remis aux associations, partis, syndicats en pleine pandémie de coronavirus et en plein confinement, ne répond ni aux promesses présidentielles ni aux exigences démocratiques du Hirak. Entretien.
Est-ce le bon moment pour discuter d'un texte aussi fondamental ?Louisa Dris Aït-Hamadouche. © DRLouisa Dris Aït-Hamadouche : Ni le contexte sanitaire, ni le contexte sécuritaire, politique et médiatique ne sont propices à un débat sérieux et serein. Certains partis politiques pourtant agréés n'ont même pas été destinataires de la proposition constitutionnelle ! Il y a donc un problème de contexte mais aussi d'accès au texte et de méthode.
Cet avant-projet est très critiqué. Répond-il aux exigences démocratiques portées par le Hirak depuis plus d'un an ? Ou au contraire s'inscrit-il dans la continuité de l'ère Bouteflika, où la Constitution n'a cessé d'être retaillée pour permettre au président déchu de garder les pleins pouvoirs et d'enchaîner les mandats ?
Le point essentiel qui ressort de cette proposition est sans doute le maintien d'un pouvoir exécutif hypertrophié, avec, à l'intérieur, un chef de l'Etat dominant. Dans ce domaine, les amendements introduits sont minimes. Par exemple, le président perd le droit de légiférer par ordonnance pendant les vacances parlementaires mais garde ce pouvoir le reste du temps.
Le poste de chef de gouvernement est rétabli mais ses prérogatives demeurent très proches de celles du premier ministre, puisqu'il n'est même pas issu de la majorité parlementaire. Le président conserve le contrôle de toutes les instances de régulation et de contrôle, y compris la justice. Pis, il gagne le droit exclusif de désigner un vice-président qui pourrait gouverner sans aucune légitimité électorale.
Qu'en est-il du rôle de l'armée, qui fait et défait les présidents depuis 1962 ? Le pouvoir des militaires est encore et toujours réaffirmé ?
Les constitutions algériennes post-1989 ne reconnaissent pas formellement le rôle politique de l'armée. Ce rôle est de l'ordre du fait accompli commencé avant même l'indépendance. À ce propos, la mouture 2020 s'inscrit en droite ligne de cette dichotomie entre les textes et la réalité. Le fait nouveau est qu'elle confirme la place de l'institution militaire en l'associant directement au Hirak.
En effet, un article a été ajouté pour constitutionnaliser le Hirak, tout en le reliant à l'armée, en quête d'une nouvelle légitimité à ajouter à la légitimité révolutionnaire et sécuritaire. Le message véhiculé par cette mouture est que l'armée a accompagné le Hirak, qui a sauvé l'Etat. Par déduction, le message véhiculé est que l'armée a sauvé l'Etat. « Faites vos élections sans le peuple » : 8 novembre 2019, à Alger, lors du 38e vendredi consécutif de manifestations contre le régime. © Kahina Nour
Cette inscription du Hirak au préambule de la Constitution est-elle une victoire pour le mouvement populaire ou un piège, une récupération, comme certains le dénoncent ?
La constitutionnalisation du Hirak est une victoire symbolique et une tentative réelle de le récupérer. Car ce que désire le mouvement populaire, ce n'est pas tant que le Hirak soit constitutionnalisé, mais que les citoyens participent activement à l'élaboration d'une Constitution pérenne.
Dans le cas d'espèce, la victoire symbolique compensera difficilement l'insatisfaction politique. Une insatisfaction liée au contenu et à la démarche non inclusive choisie pour réviser la loi fondamentale.
Ce projet de révision de la Constitution consacre la liberté d'association, de la presse, de se réunir, de manifester… Mais est-il crédible quand on voit la répression qui sévit actuellement ?
Le projet de Constitution est extrêmement prolixe en termes de reconnaissance et de défense des droits et libertés individuels et collectifs. De nouvelles libertés ont même été ajoutées à la version précédente. La crédibilité de ces affirmations va dépendre des lois et règlements qui viendront plus tard. L'exemple du code pénal, celui de la loi électorale et d'autres encore ne sont pas encourageants.
Pour la première fois, il est envisagé d'inscrire dans la Constitution la possibilité pour l'armée algérienne d'intervenir à l'étranger, ce qui n'a jamais été le cas, l'Algérie se démarquant par le mantra de la non-ingérence. Comment interprétez-vous ce changement ? Pourquoi maintenant ? Est-ce un signal envoyé à l'étranger ?
Les experts qui ont rédigé cette mouture ont expliqué qu'ils n'avaient pas remis en cause les équilibres des pouvoirs car cela outrepassait la mission que le président leur avait assignée. Or, rien dans les indications que ce dernier a proposées ne faisait référence à la projection des forces armées.
Dans le fond, ce virage à 180 degrés n'est pas problématique sur le principe. Car il est naturel qu'un Etat révise sa doctrine stratégique en fonction de l'évolution des paramètres stratégiques régionaux et internationaux. Le problème que soulève cet article est dans le fond.
Un changement de doctrine ne s'opère pas du jour au lendemain, par l'introduction, dans la confusion, d'un article que l'on révise dans un contexte de crise politique interne. Un changement de doctrine est précédé de rapports d'évaluation, de bilans d'études prospectives et de débats impliquant les experts, la communauté scientifique, les acteurs économiques et industriels, ainsi que l'opinion publique.
Or, rien dans le programme du président ne faisait allusion à un changement de doctrine. De plus, toutes les déclarations officielles relevant de la politique étrangère, y compris les plus récentes, ont réitéré les principes de non-ingérence et de primauté des solutions politiques sur les options militaires.
En accusant des médias et des journalistes algériens, tel Khaled Drareni, d'être des espions à la solde de pays étrangers, le président Tebboune a semé le malaise dans les chancelleries européennes, notamment en France. Il est allé trop loin ?
Le recours à la conspiration et à la théorie du complot n'est pas nouveau. Il est souvent utilisé pour discréditer les adversaires politiques et pis, les excommunier. La particularité du cas Drareni réside d'abord dans le fait qu'il s'agit d'un journaliste, et pas d'un acteur engagé dans une relation de rivalité politique.
Ensuite, les accusations portées par le président ne figurent absolument pas dans le dossier judiciaire. Non seulement, donc, il y a ingérence de l'exécutif dans la justice, mais l'aggravation des charges suggère une condamnation avant même que le procès n'ait eu lieu. C'est un grave précédent.
Répression tous azimuts des journalistes, des militants de la démocratie, mais aussi de simples citoyens pour des publications sur les réseaux sociaux, journaux censurés, instrumentalisation de lois votées en vitesse criminalisant les fake news et les discours de haines… Depuis la pandémie de Covid-19, la répression s'est accentuée en Algérie. Comment l'expliquez-vous ? Le peuple est-il en train de perdre les acquis et les espoirs du Hirak ?
Il y a effectivement une crispation autoritaire palpable, avec des conséquences directes sur les libertés individuelles essentielles. Les convocations et les arrestations de militants ou simples citoyens s'exprimant sur les réseaux sociaux se sont multipliées. Cette vague répressive s'appuie sur un code pénal dont la révision récente a été vivement dénoncée par les magistrats et les avocats, car allant dans le sens contraire des droits et libertés individuels.
Sur le plan politique, cette crispation autoritaire est très difficile à comprendre, tant elle semble contre-productive. Si son but est de stopper le Hirak, la preuve a déjà été apportée en 2019 que les arrestations ciblées ou massives n'arrêtaient pas les contestataires. Par ailleurs, le président avait multiplié les promesses d'ouverture et d'apaisement, sans doute dans le but de compenser son déficit de légitimité. C'est d'ailleurs ce que son prédécesseur avait fait. La répression actuelle est non seulement contre-productive, mais crisogène. Manifestation contre la tenue d'une élection présidentielle en décembre 2019, à Alger. © Kahina Nour
Beaucoup évoquent une situation pire que sous l'ère Bouteflika en termes de droits humains, de libertés publiques, notamment de liberté d'expression et de la presse, et particulièrement sur Internet. Êtes-vous d'accord ?
Le président déchu a choisi de gouverner par la division et la cooptation. Il a divisé les cercles du pouvoir, les partis politiques, les syndicats, la société civile, les médias ; puis il a fait en sorte de capter les acteurs sensibles aux privilèges et de marginaliser par leur minorisation des acteurs réfractaires à toutes formes de récupération.
Cette stratégie soft a été possible grâce l'abondance des ressources financières et à la persistance de la peur du changement au sein de la population. La situation actuelle est complètement différente. C'est peut-être ce qui explique le changement de stratégie.
L'Algérie semble dans une impasse, tant sur le plan politique que sur les plans économique et social. Quelle est votre analyse ?
Tous ces secteurs sont dans une situation d'autant plus difficile qu'ils sont interdépendants les uns des autres. Impossible d'en améliorer un séparément des autres. Les indices socio-économiques s'aggravent, pour les raisons que l'on sait : effondrement des prix du pétrole, déficits commerciaux et budgétaires, baisse du pouvoir d'achat, hausse du chômage…
La pandémie a paralysé de nombreux secteurs, notamment l'informel, dont les travailleurs se retrouvent sans aucune protection. Sur le plan politique, l'élection présidentielle n'a pas réussi à stopper la contestation populaire, pas plus qu'elle n'a réglé le problème de légitimité. L'interdépendance qui relie ces éléments peut être à l'origine d'un processus vertueux ou, au contraire, aggraver le contexte crisogène.
À mon avis, le politique est le point de départ d'un éventuel processus vertueux. Car le règlement de la question de la légitimité du pouvoir politique est absolument indispensable à la gestion de la crise économique et sociale qui se profile. Sans ce règlement, le choix se portera, comme d'habitude, sur une gestion superficielle des dysfonctionnements, au lieu d'entreprendre les réformes structurelles nécessaires.
L'Algérie est l'un des pays d'Afrique les plus touchés par le coronavirus (plus de 7 000 contaminations et plus de 500 décès, selon les chiffres officiels). À l'approche de la fin du ramadan et de la fête de l'Aïd Al Fitr, les autorités ont décidé de rendre le port du masque obligatoire dans l'espace public. Comment jugez-vous la gestion de la crise sanitaire par le pouvoir ?
Dans une crise, il y a toujours deux aspects : le danger et l'opportunité. Cette crise a confirmé les insuffisances structurelles du système de santé et les problèmes de gouvernance dont il souffre depuis longtemps. Elle a aussi mis en avant la crise de confiance entre gouvernants et gouvernés, dans la mesure où dans l'opinion publique, les discours du gouvernement ont souvent été mis en doute. L'aspect « positif » est que les conséquences sanitaires de cette pandémie auraient pu être bien pires qu'elles ne le sont actuellement.
En effet, les mobilisations citoyennes ont contribué à pallier certaines insuffisances. On a pu constater des élans de solidarité pour soutenir les familles mises au chômage par l'arrêt de nombreuses activités ; la confection de masques, de blouses par des volontaires, les campagnes de désinfection dans les quartiers…
Mais le fait le plus significatif, à mon sens, est que l'idée du confinement a été introduite par les hirakistes, qui ont appelé à suspendre les rassemblements et les manifestations avant même que le gouvernement ne l'annonce. Cette initiative a confirmé une maturité citoyenne de bon augure pour l'avenir.


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