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La question salariale en Algérie : une bombe à retardement
Publié dans Le Quotidien d'Algérie le 15 - 01 - 2010


Le Quotidien d'Oran, 14 janvier 2010
Les grèves en cours dans la zone industrielle de Rouiba indiquent que la question salariale est devenue en Algérie une source de tensions entre le monde du travail et le gouvernement. Elle est une véritable bombe à retardement que le gouvernement espère désamorcer par des leurres et par de vaines tentatives de contourner la représentativité des travailleurs.
La question salariale alimente une protestation qui est en train de prendre corps sous forme d'un mouvement social de plus en plus large qui a commencé à se dessiner avec les enseignants, les cadres de la santé, les fonctionnaires et aujourd'hui les travailleurs de l'industrie. Deux revendications essentielles sont avancées par la contestation : l'augmentation des salaires et la représentativité syndicale. Le gouvernement ne pourra satisfaire ni l'une ni l'autre. Une hausse substantielle des salaires entraînerait des déséquilibres financiers qu'il sera incapable de gérer, et la reconnaissance des syndicats autonomes minerait la logique paternaliste du régime vis-à-vis du monde du travail. Le salaire, en Algérie, est une variable politique dans la mesure où son niveau est fixé par les contraintes financières de l'Etat et non par la productivité du travail, la concurrence ou les besoins sociaux des travailleurs. De ce point de vue, l'économie algérienne n'est pas « dépolitisée », c'est-à-dire que c'est une affaire d'Etat qui ne concerne ni les travailleurs, ni les opérateurs économiques ni les consommateurs et encore moins les citoyens. Ce faisant, le régime a fait déconnecter l'économie nationale des paramètres de l'accumulation mondiale (productivité du travail et rentabilité des capitaux), ce qui s'est répercuté sur le niveau des salaires qui n'arrive pas à nourrir, loger et soigner les travailleurs et leurs familles. L'incapacité du salaire à couvrir les besoins sociaux mènera à terme à des explosions sociales aux conséquences imprévisibles.
Ce qui est frappant aujourd'hui, c'est que les employés des administrations et les travailleurs du secteur public mesurent désormais leur pouvoir d'achat en euro – et non en dinar – et le compare non pas à celui des pays développés mais à celui des pays voisins, la Tunisie et le Maroc. « Comment expliquez-vous, disent-les grévistes, que nos salaires et traitements soient trois fois inférieurs à ceux des Marocains et Tunisiens ? » Cette appréciation du pouvoir d'achat en monnaie étrangère signifie que les acteurs ont pris conscience de ce que David Ricardo, l'un des fondateurs de l'économie politique, appelle le « salaire réel », mesuré en biens de consommation, qu'il distingue du salaire nominal évalué en monnaie. L'augmentation du second peut s'accompagner de la diminution du premier. C'est ce qui s'est passé en Algérie où le SNMG a été augmenté, alors que le pouvoir d'achat du dinar a diminué. Le salaire nominal s'est accru, mais sa capacité à acheter des biens de subsistance a baissé dans de plus grandes proportions. Cela se vérifie dans le niveau des prix des biens courants comme la viande, les fruits et légumes, les vêtements, etc.
Il y a quinze ans une ménagère remplissait son couffin quotidien avec 200 DA ; aujourd'hui, il lui faut 2000 DA pour avoir le même couffin. Bien sûr, il y aura toujours des statisticiens de l'administration qui vont dire le contraire, et même affirmer que le niveau de vie des Algériens a augmenté entre 1999 et 2009. Dans les pays démocratiques, les syndicats ont leurs propres centres d'analyses statistiques, parce qu'ils ne font pas confiance dans les chiffres avancés par l'administration.
Il faut cependant se demander pourquoi le pouvoir d'achat, et donc le niveau de vie, ont baissé dans de si grandes proportions ? La raison est que le gouvernement a été amené à dévaluer la parité du dinar, dans les années 1990, de telle manière à compenser les déficits publics. C'est la diminution drastique du pouvoir d'achat des revenus fixes (salaires et traitements) qui a financé les déficits de l'Etat dans les années 1990. Au lieu d'opérer des réformes de structure pour améliorer la productivité du secteur économique, le gouvernement a préféré dévaluer la parité du dinar, c'est-à-dire diminuer le pouvoir d'achat des revenus fixes pour financer les déficits issus de l'échec de sa politique économique. C'est sur injonction du FMI que les différentes dévaluations ont été opérées. Les experts du FMI estiment que la diminution de la consommation des ménages favorise l'investissement et attire les capitaux étrangers. Elle encouragerait par ailleurs, selon eux, les exportations et découragerait les importations. Ce que les experts du FMI ignorent cependant, c'est que ce modèle est, dans certaines limites, pertinent pour une économie industrielle développée obéissant au système de prix walrassien, caractérisé par la loi des rendements non proportionnels (rendements croissants et décroissants) et par l'élasticité de l'offre, mais il est totalement inopérant dans une économie rentière où l'offre industrielle est rigide et où l'accumulation des capitaux n'a aucun lien avec la production. Compte tenu du caractère rentier de l'économie algérienne, il n'est pas surprenant que la dévaluation du dinar n'a pas eu les effets escomptés. Elle a enrichi l'Etat en monnaie locale, sans contrepartie dans la création des richesses, mais n'a pas eu d'effets bénéfiques sur l'économie nationale. Au contraire, celle-ci a subi la destruction de dizaines de milliers d'emplois avec la disparition de centaines de PME obligées de fermer en raison de la cherté des biens semi-finis importés.
En 1980, un dollar US s'échangeait contre 10 dinars ; aujourd'hui, il s'échange contre 77 dinars. La différence – 67 dinars pour chaque dollar encaissé – est un surplus monétaire que crée l'Etat et qui correspond à la perte du pouvoir d'achat des consommateurs. L'Etat devient plus riche par simple décision administrative, sans création équivalente de richesses matérielles, ce qui, évidemment, aura pour conséquence mécanique l'augmentation des prix. Le système de prix est international et l'Algérie n'y échappe pas : la viande, les fruits et légumes, les matériaux de construction, la voiture… ont le même prix à Alger, Athènes, Madrid et Paris. En raison des dévaluations brutales, le salaire algérien ne permet plus de nourrir correctement une famille de six personnes (un couple et quatre enfants), sans parler de l'impossibilité de réaliser des projets de mobilier et d'immobilier, et encore moins de rêver des vacances. Travailler devient inutile parce que le salaire ne permet pas de construire une vie familiale ou individuelle. D'où le phénomène des « harragas » qui ont le sentiment qu'ils ne peuvent pas avoir un avenir dans leur pays. Les cadres aussi sont touchés par le désir de s'exiler, estimant qu'ils peuvent obtenir dix fois plus sous d'autres cieux.
Le rapport de la Banque Mondiale de l'année 1992 note qu'entre novembre 1990 et avril 1991, le dinar a été dévalué de 100%, ce qui explique le fort taux d'inflation (29%) en 1991.
Le gouvernement ne va pas en rester là puisque de 1992 à 2000, le dollar va passer de 22,7 à 75,34 dinars, soit une diminution de 370%, ce qui a fait passer la masse monétaire de 377 milliards de dinars à 1044 milliards. Entre 1990 et 2000, la monnaie algérienne aura été dévaluée de 500% ! A titre de comparaison, un dollar s'échange contre 11,3 dirhams marocains alors qu'il s'échange à 77,22 dinars, ce qui signifie que la monnaie marocaine a un pouvoir d'achat 7 fois supérieur à la monnaie algérienne. Et pourtant, l'Etat algérien a des revenus supérieurs à ceux du Maroc.
Les conséquences de cette politique monétaire vont être manifestes sur le pouvoir d'achat des salaires. Selon l'Annuaire Statistique pour l'Afrique (Nations Unies, 2001), l'indice des prix à la consommation en Algérie (alimentation, habillement, électricité…) s'est élevé en 2000 à 464,8% avec une base 100 en 1990. L'augmentation de cet indice est encore plus forte si l'on se donne comme année de base 1989. Selon l'Annuaire Statistique de l'Algérie (Résultats 1999-2001), l'indice des prix en 2001 a été de 557,59 avec 1989 comme année de base. Durant cette même période, le prix de l'électricité et du gaz (compagnie de l'Etat) ont été multipliés par près de 10 (929,06) et celui de l'eau potable par 8,5 (846). L'indice des médicaments sur ordonnance a atteint le seuil de 1 131,70. Ces chiffres expliquent l'appauvrissement de la population, mesuré à travers la chute du niveau de consommation par habitant qui a diminué de 30,4% par rapport à 1980. Le seuil de pauvreté concernait en 1988 16,6% de la population en zone rurale et 12,2% en zone urbaine. En 1995, il était respectivement de 30,3% et de 14,7% selon les chiffres de la Banque Mondiale. Depuis, ces chiffres se sont aggravés au point où la mendicité et la misère s'étendent dans les villes, entraînant par ailleurs le phénomène de violence urbaine.
Quelle serait aujourd'hui la solution ? Des mesures audacieuses s'imposent pour sortir de l'impasse. 1. Le passage à un nouveau dinar, qui vaudrait dix anciens dinars, est indispensable. 2. Négocier avec les Marocains et les Tunisiens pour avoir, pour les trois monnaies nationales, la même parité face à l'euro et au dollar. 3. Avoir une politique audacieuse qui viserait à renforcer l'offre des biens et services, qu'elle provienne du secteur public ou privé, avec pour maîtres mots profit et rentabilité. 4. Se retirer des négociations avec l'OMC et l'Union Européenne et dénoncer les accords qui portent atteinte à la production nationale. 5. Organiser la concurrence à l'intérieur du marché national pour s'opposer aux rentes de situation. 6. Réorganiser les services des impôts et des douanes pour les mettre au service de l'économie nationale.
En conclusion, la question salariale ne peut être résolue sans des transformations économiques et institutionnelles de grande ampleur. Des gisements extraordinaires de productivité existent dans l'agriculture, la pêche et l'industrie pour satisfaire une demande potentielle d'un pays de 35 millions d'habitants. Pour cela, il faut solliciter les groupes sociaux du monde économique, les reconnaître comme des sujets autonomes et en finir avec le paternalisme d'Etat qui infantilise la société.


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