Le suspense perdure encore au sujet de la publication de la nouvelle liste des heureux récipiendaires au titre d'assembleurs de véhicules. A défaut d'une communication officielle, les canaux parallèles prennent le relais et annoncent des échéances variées. Hier, c'était au tour de Mohamed Bairi, vice-président du FCE et membre de l'Association des concessionnaires automobiles (AC2A), de livrer à la presse une autre date, celle du 6 mars prochain, correspondant à l'ouverture du Salon national de la sous-traitance. Pour lui, il est probable que le Premier ministre saisisse cette opportunité pour dévoiler le contenu de cette fameuse liste qui a fait couler beaucoup d'encre et de salive. Il dira même que le nombre de 40 investisseurs déjà annoncé pourrait ne pas être définitif, sachant que cette liste était plutôt une proposition pour le Premier ministre qui décidera en définitive du nombre des futurs acteurs de ce secteur. Si dans la première mouture, seul l'assemblage de véhicules de tourisme et de camions était prévu, dans la seconde, il est question aussi de véhicules utilitaires, de bus, de matériel agricole, de motocycles et autres engins de travaux publics. Reste à savoir maintenant si les volumes de production globale déjà annoncés et fixés à terme à 430 000 unités répartis entre les 10 premiers bénéficiaires seront revus à la hausse pour satisfaire les attentes des nouveaux prétendants ou seront-ils maintenus et redistribués avec des quotas amoindris. Par ailleurs, les Douanes nationales ont rendu public, il y a quelques jours, le montant en devise qui a été consacré en 2017 à l'importation des kits d'assemblage et qui a atteint les 1,8 milliard de dollars, soit une progression de +101% par rapport à l'exercice précédent. Ce montant a permis, rappelons-le, de financer l'assemblage d'un volume global de 90 000 unités par 5 marques. Or, en 2016, une enveloppe de 900 millions de dollars a permis l'importation, dans le cadre des quotas, de quelque 93 000 véhicules tous segments confondus. La disproportion est tout simplement énorme et suscite même des interrogations sur la pertinence de cette démarche, quand bien serait-elle indispensable pour le développement d'une véritable industrie automobile en Algérie. D'autant et si l'on s'en tient aux prévisions mêmes du gouvernement, les dépenses pour ce secteur franchiront allègrement, dans deux années, le seuil des 7 milliards de dollars. D'où la question, est-ce réellement par souci d'optimisation des dépenses en devise que le secteur de l'automobile a été chamboulé, sens dessus dessous ? Aujourd'hui, et en l'absence d'un tissu national de sous-traitant devant alimenter les usines de montage en pièces détachées et autres composants, il est clairement établi que les procédés retenus par les concessionnaires assembleurs, à savoir le DKD et le SKD, se révèlent très coûteux pour le Trésor public, sachant que le véhicule est facturé à sa sortie d'usine chez le constructeur comme produit fini avant d'être démembré dans des ateliers spécialement dédiés, empaqueté, transporté et réassemblé de nouveau. Autant de surcoûts qui feront augmenter au final les tarifs de vente au client algérien. A cela s'ajoutent des marges énormes au profit de l'investisseur puisque dans le dispositif réglementaire national actuellement en vigueur, il n'est guère prévu un contrôle au niveau des prix de vente. Mieux que cela, certains concessionnaires, déjà en activité et ayant décroché le quitus du Conseil national de l'investissement (CNI), qui leur fait bénéficier des avantages fiscaux et parafiscaux, et de l'exonération des taxes et des droits de douane, n'ont pas pris la peine de revoir à la baisse leur grille tarifaire et continuent à faire payer le client les mêmes prix où sont toujours intégrées les différentes taxes (TVA, taxe sur le véhicule neuf, droit de douane) mais naturellement avec une facture où n'apparaissent pas l'ensemble de ces données. Certes, l'Etat est doublement pénalisé à travers cette démarche, perte en devise et manque à gagner en termes de taxes et de droits de douane, mais le client reste aussi largement affecté par une situation du marché profondément perturbée, des produits qui se raréfient, des prix qui s'envolent et des revendeurs qui reviennent en force et imposent de nouveau leur diktat. B. Bellil