Le président de l'Assemblée nationale ignore apparemment d'où vient précisément le «coup». Sinon, il n'aurait certainement pas attendu tout ce temps-là pour réagir en conséquence. Mais il sait déjà d'où il… ne vient pas, d'où il ne peut pas venir. Ceci a le mérite de lui éviter déjà l'esclandre et la confrontation directe, au demeurant inutiles. Ça ne le sort pas de l'impasse pour autant. Celui qui est censé le dégommer ne lui a rien signifié et ceux qui s'agitent pour sa destitution comme si c'était le combat de leur vie comptent pour du beurre. C'est que les temps ont drôlement changé avec ce mode opératoire inédit et M. Bouhadja a connu des périodes où les choses étaient beaucoup plus claires. D'ailleurs, il n'a connu que ça dans son parcours d'apparatchik ordinaire, ce qui accentue son embarras, si ce n'est son désarroi ou sa détresse. Comme il n'a pas lui-même la réputation de quelqu'un qui peut hausser le ton, comme il n'est pas vraiment un exemple d'autonomie politique, il ne va pas «soupçonner» les députés de… sa majorité de se rebeller soudainement contre lui, quand bien même il aurait commis l'erreur la plus impardonnable comme ils le prétendent. Ensemble, ils ont trop longtemps tété la même mamelle pour découvrir les uns et les autres de nouvelles vocations. Les députés de la «majorité» n'ont pas été élus, ils ne vont tout de même pas prétendre avoir… élu leur président. Et enclencher, le cas échéant, la procédure légale de sa destitution. C'est donc… logiquement qu'ils découvrent les vertus de la… mutinerie dans les travées du Palais. Quelque part, on a décidé que c'est moins flagrant mais tout aussi efficace que la décision directe. Pour sa part, Saïd Bouhadja, en dépit de sa posture critique, n'a même pas songé à engager la conversation sur le terrain réglementaire, il sait tout de sa vanité. Avec sa majorité, il partage le déficit de légitimité mais pas le rapport de force du moment. Ça ne l'empêche pas pour autant d'aller jusqu'au bout de cette logique, la seule qui compte vraiment : vous ne m'avez pas élu, vous ne pouvez pas m'enlever. Et il tient en l'occurrence son baroud d'honneur. Doublement peut-être. En disant aux chefs de groupes parlementaires «j'ai informé le président de la République que j'ai été démissionné», il leur rappelle ce qu'ils savent mais font semblant de l'ignorer. En s'adressant au chef de l'Etat, il veut peut-être lui dire qu'il regrette que tout ne se soit pas passé «normalement ». Enfin, normalement… Comme ça se passait avant, quoi. S. L.