Fête populaire et familiale, par excellence, l'Aïd el Fitr, marquant la fin du mois du Ramadhan, a été célébré, hier et avant-hier, dans le confinement, en raison des mesures visant à endiguer la pandémie de Covid-19. Une ambiance plutôt morose et en demi-teinte a marqué les deux jours voués à la fête et aux réjouissances. Le durcissement du confinement et la restriction drastique de la circulation automobile à travers tout le pays ont assombri la célébration, qui, en d'autres temps, est vécue dans la joie, la convivialité, le partage, la ferveur et des ostentations religieuses de circonstance. Une andémie rabat-joie « La persistance de cette pandémie a annihilé tout espoir de vivre enfin quelques moments de joie à l'occasion de l'Aïd, après deux mois de stress dû au confinement et à la peur de choper le virus», regrettait Salah pour qui le rendez-vous festif et religieux est amputé de tous les actes du quotidien qui lui donnent un charme particulier : pas de prières collectives dans les mosquées, peu ou pas du tout de visites familiales et d'achats de vêtements ; point d'échange de cadeaux ou de friandises. On est bien loin des grandes réunions et des repas partagés en famille, des visites aux siens pour leur présenter ses vœux. L'obligation de respecter les règles de la distanciation sociale a restreint l'effusion de gestes de convivialité entre voisins et amis. Bref, des circonstances quasi extrêmes, où l'observance de l'Aïd dans l'intimité familiale a été une règle qui a fini par s'imposer à tout le monde. Même si, pour la circonstance, il fallait ruser pour trouver des dérivatifs à une situation contraignante et atypique. Célébration 2.0 et mesures et résilience face à l'épreuve du coronavirus « Pour les bisous, les câlins, les embrassades et les accolades, ça sera par wifi ! », ironise un internaute sur Facebook comme pour témoigner du caractère 2.0 et en mode virtuel de la célébration de l'Aïd el Fitr 2020. « Faute d'utiliser le véhicule pour me déplacer, j'ai dû me résoudre à l'usage du téléphone et des applications vidéo de l'internet pour présenter les vœux de l'Aïd aux membres de la famille se trouvant hors de la ville », nous confie Smaïl, un septuagénaire habitant Draâ-Ben-Khedda. «J'ai effectué la ‘'salat al Aïd'' à domicile, par respect des gestes sanitaires quotidiens pour éviter tout risque de contamination», dira cet ancien éducateur spécialisé et retraité du secteur de la jeunesse et des sports dont les propos expriment une forme de résilience face à l'épreuve difficile de la pandémie de Covid-19. « Une épreuve en passe d'être surmontée grâce à la prise de conscience de la majorité des citoyens qui adoptent des mesures de précaution qui empêchent la propagation du virus », se réjouit notre interlocuteur. Une attitude adoptée par beaucoup de fidèles comme Smaïl qui ont dû s'adapter pour célébrer le culte conformément aux consignes des autorités religieuses. À Draâ-Ben-Khedda comme dans toutes les mosquées de la wilaya de Tizi Ouzou, les imams ont dirigé l'office religieux du jour de l'Aïd à huis clos et à distance. L'appel à la prière et le traditionnel sermon de l'Aïd ont été diffusés par haut-parleur à l'attention des fidèles qui ont prié chez eux. Beaucoup disent avoir prié en suivant la cérémonie religieuse diffusée à la télévision. La rue, miroir d'un confinement en clair-obscur Habituellement grouillant de monde et animé par une dense circulation automobile, le boulevard Colonel Amirouche, l'artère principale et commerçante de la ville, est resté quasiment désert, en cette matinée du dimanche. La tendance qui se confirmera dans l'après-midi, à l'heure du couvre-feu. Une atmosphère de vide que vient perturber, par intermittence, le vrombissement du moteur d'une voiture ou l'incursion de quelques rares passants vaquant à leurs occupations matinales. Le spectacle nous change de l'ambiance de la veille et offre une image contrastée du respect du confinement. La veille de l'Aïd, les gens étaient nombreux à se ruer sur le marché de fruits et légumes de la ville pour faire leurs achats avant la fête, sans respecter les mesures de distanciation sociale. Une image qui contraste avec le geste des jeunes de la cellule écologique du village Cheurfa N'bahloul, dans la daïra d'Azazga, qui ont décidé de donner une touche écologique à la fin du Ramadhan. Ils ont préféré fêter l'Aïd à leur manière. Ils ont décidé de planter mille arbres pendant les deux jours de l'Aïd el-Fitr. Dans ce tableau en clair-obscur du confinement, la plus grande inquiétude des autorités est d'avoir de nouveaux cas de contamination à un moment où la situation sanitaire se stabilise. Saïd Ait Mébarek