La libération des détenus, dans le cadre des mesures d'apaisement décidées par le Président Tebboune, s'est poursuivie hier. Elle s'effectue de manière progressive depuis vendredi matin et pourrait encore s'étaler jusqu'au début de cette semaine en raison du nombre de dossiers et des procédures judiciaires nécessaires requises dans cette opération. La première libération survenue ce samedi a eu lieu en fin de matinée à Mascara suivie presque simultanément d'autres sorties de prisonniers à M'sila, Tébessa, Skikda, Tiaret, Timimoun et Adrar. En début d'après-midi, le CNLD (Comité national pour la libération des détenus), qui tient une comptabilité régulièrement mise à jour de l'opération, annonce la libération de Brahim Laalami, figure connue du Hirak à Bordj-Bou-Arréridj. Sa sortie de prison est suivie de celle de trois autres personnes arrêtées elles aussi pour leurs activités en faveur du mouvement populaire. Au même moment, les portes de la prison de Koléa se sont également ouvertes pour laisser passer un détenu. A 15h30, vingt détenus avaient été déjà libérés, portant ainsi à trente et un le nombre total de libérations survenues depuis vendredi. Toutes ces libérations passent naturellement par des procédures judiciaires, ce qui implique que le statut des personnes élargies diffère en fonction des verdicts dont elles ont fait l'objet. Dalila Touat, enseignante à Mascara libérée vendredi soir, a été ainsi placée en liberté provisoire car ayant été condamnée à dix-huit mois de prison lors de son procès en première instance. Les détenus condamnés définitivement ou en deuxième instance (ils sont dix-sept) ont été, eux, relaxés. Vendredi, le ministère de la Justice annonçait que les deux chambres, pénale et d'accusation, de la cour d'Alger s'étaient réunies autour de ces dossiers. L'annonce, faite en fin de journée, a été suivie, comme on le sait, de la libération du journaliste Khaled Drareni et de Rachid Nekkaz. L'étude de leur dossier avait été programmée pour le 25 février au niveau de la Cour suprême. L'annonce du président de la République a impliqué une accélération des procédures qui se poursuivra jusqu'à la libération de tous les détenus. Lors de son allocution télévisée, Abdelmadjid Tebboune a évoqué une soixantaine de personnes poursuivies pour des posts sur les réseaux sociaux ou pour rassemblement illégal. Cette annonce a suscité l'espoir de détenus poursuivis pour des faits qui n'ont pas été cités par le Président. L'épouse et les enfants du lanceur d'alerte Tounsi Mohamed se sont réunis devant la prison d'Oran à la recherche d'une bonne nouvelle. Dans une vidéo poignante diffusée sur les réseaux sociaux, la mère et les enfants ont appelé le président de la République à la libération de ce détenu. La décision de Abdelmadjid Tebboune a donné lieu à une série de réactions. L'ancien ministre de la Communication Abdelaziz Rahabi considère que «la libération des détenus d'opinion du Hirak est un geste d'apaisement attendu du président de la République et donne l'espoir d'une perspective d'ouverture plus large. Les pouvoirs publics doivent saisir cette opportunité pour mettre en place toutes les conditions légales pour que la privation de liberté pour l'expression d'une opinion ne se reproduise plus dans notre pays». Dans un communiqué qui dresse un sévère constat de la situation qui s'est mise en place depuis le 22 février 2019, le Parti des travailleurs dit «prendre acte de cette mesure qui met fin au calvaire de dizaines de détenus et leur famille» et se pose la question de savoir «si les libertés démocratiques et le libre exercice politique et de la presse allaient être consacrés». Le PAD (Pacte pour l'alternative démocratique) réclame, lui, la «réhabilitation des détenus et le rétablissement des libertés publiques». A. C.