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L'entretien de la semaine
Dr Larbi Mehdi, Maître de conférences à l'Université d'Oran, au soirmagazine : «La hogra renvoie à une perte des valeurs»
Publié dans Le Soir d'Algérie le 17 - 05 - 2014

Dans cet entretien, Dr Larbi Mehdi, maître de conférences à l'université d'Oran, revient sur le parcours sémiologique du terme hogra et de sa valeur dans la société algérienne.
Soirmagazine : Que signifie le terme hogra ?
Dr larbi Mehdi : Le terme hogra est le produit d'une expérience sociale intériorisée par une ou plusieurs personnes vis-à-vis d'un traitement, d'une opération ou d'une situation sociale quelconque jugée injuste. Dans ce sens, la hogra est un terme voisin ou synonyme du mot injustice.
Comment ce terme a pu prendre place en Algérie ?
Ce terme est le produit de la société. Les peuples de différentes régions comme les Algériens (es) par exemple développent leur propre langage et leur propre jugement quand ils sont confrontés à des actes et des situations qui les privent de leurs droits.
Ce sont des expériences vécues avec douleur et amertume. C'est un sentiment qui développe la haine, la violence et pousse la personne à se révolter en l'absence d'une réparation équitable.
En Algérie, le terme hogra recouvre, écrit l'anthropologue M. Mebtoul, «une charge symbolique et affective très forte dans la société algérienne... La hogra fait référence aux multiples tensions au cœur des relations sociales. Le mépris, l'injustice, l'arbitraire et le sentiment de non-reconnaissance de ses droits» (M. Mebtoul, 2013). Cette définition n'est pas énoncée par un universitaire enfermé dans son bureau, mais est le résultat des matériaux issus d'enquêtes de terrain et d'une écoute permanente des différentes composantes de la
société.
Cependant, la charge symbolique de ce terme peut avoir une signification beaucoup plus profonde. N'est-elle pas liée à une dignité et à un honneur que les Algériens (es) ont cru récupérer avec l'Etat national ?
En effet, la hogra est une parole produite pour exposer une humiliation. Un sentiment qui exprime l'effacement et l'écrasement en face de l'autre (personne, administration) qui se manifeste par la force de ses moyens physiques, de ses relations personnelles ou bien l'arbitraire des services et offices publics.
La particularité de l'Algérien (e), c'est qu'il a vécu «le code de l'indigénat» et la tyrannie de l'administration coloniale. Il a été spolié de sa terre et dépossédé de son honneur. Il a bien rêvé de reconquérir ses biens matériels et symboliques par l'émergence de l'Etat national, qui lui a promis cette réparation. Le terme hogra, qui tire ses racines de cette histoire douloureuse, rebondit aujourd'hui pour dénoncer l'absence d'écoute et de prise en considération de la part des autorités publiques.
Que signifie le terme haggar dans la compréhension collective ?
Toute personne qui réagit par les moyens et les pouvoirs qu'elle possède pour nuire, affaiblir, repousser, négliger et humilier l'autre.
Est-ce qu'en règle générale, les Algériens sont haggarine ?
Malheureusement, cette pratique ne cesse de se généraliser pour devenir la règle partagée pour se construire socialement et avoir une reconnaissance. Cette pratique est la conséquence de l'échec des institutions publiques comme l'école par exemple. Les pseudo-spécialistes de la question de l'école et de la scolarité n'ont jamais questionné le potentiel de l'institution et son incapacité à saisir ses propres incohérences. Comment faire confiance aux journalistes et au soi-disant chercheurs (es) qui responsabilisent les enfants de la violence scolaire, impliquant la famille dans cette histoire, tout en négligeant les fondements de l'école de la République et de ses moyens pédagogiques flexibles pour pouvoir appréhender le monde actuel. C'est l'école qui est responsable, car elle n'est que l'image et le produit d'un pouvoir qui n'a cessé d'exercer sur elle sa violence et son incompétence sans se préoccuper des conséquences fallacieuses. Aujourd'hui, l'Algérie a un grand besoin de la présence de l'Etat pour mettre de l'ordre, car ni la religion ni la tradition ne peuvent freiner ce phénomène. C'est la conséquence d'un autoritarisme politique, nourri d'une culture de mépris et d'arrogance. Il a avantagé les relations personnelles et clientélistes dans les appareils de l'Etat et façonné les fonctions professionnelles par l'esprit
d'allégeance.
Le fait d'être haggar fait-il ressortir une perte des valeurs ?
En effet, la hogra renvoie à une perte de valeurs. La société juge la hogra comme étant un phénomène négatif et nocif car cette pratique pollue et poisse les relations sociales.
Le haggar est mal vu par les autres. Lui-même développe ce sentiment et il sait bien faire la différence entre les pratiques de la hogra et celles qui développent le lien, le respect et la considération.
Comment expliquer que dès qu'une personne sent qu'elle a un pouvoir quelconque devient haggar ?
Non, on ne doit pas généraliser. Il faut bien préciser que ce n'est pas toutes les personnes qui ont du pouvoir qui deviennent automatiquement des haggarine. C'est vrai que ce phénomène s'enracine dans la culture algérienne et possible que le fait de l'intérioriser pendant l'enfance, beaucoup de personnes peuvent facilement le reproduire à l'âge adulte.
Il faut mobiliser les compétences (psychologues, sociologues et anthropologues), leur faciliter les recherches de terrain, offrir les moyens financiers à l'accès à l'information et enfin, libérer les champs (débats télévisés, radios...) pour qu'ils puissent s'exprimer sur ce problème qui se développe dans le corps social comme une gangrène qui ne cesse de le fragiliser.
Dans ce cas, nous entrons dans un cercle vicieux. Tous sont des victimes et bourreaux (mehgour et haggar). Un mot là-dessus...
Oui on peut dire cela en effet, car nous n'arrêtons pas comme toutes les personnes du monde de reproduire le schéma qu'on a reçu pendant notre enfance. Quand j'ai évoqué le besoin de l'Algérie d'une présence d'Etat, c'est en fait la nécessité et l'exigence d'une volonté de la part des pouvoirs publics pour réaliser un bilan sérieux et rigoureux sur leurs pratiques et leur mode d'emploi, qui ne sont guère efficaces, car leurs résultats ne cessent d'éloigner le projet de l'Etat.
Parallèlement à ce bilan considéré comme condition sine qua non, leur mobilisation doit s'effectuer sur le terrain par l'écoute des différents acteurs et l'analyse objective afin de mettre en place les politiques nécessaires. C'est la première étape qui peut renouer avec la société et démarrer le travail qui peut remédier les catastrophes sociales. Rester dans les discours creux conçus dans les bureaux des ministères qui demeurent loin de la réalité approuve le processus social pour devenir haggar après avoir été mahgour.
Quelles sont les séquelles de la hogra sur l'individu et la société ?
Je crois que cette question mérite d'être posée à toutes les catégories de la société et voir comment chacune d'elle perçoit la hogra. C'est à partir d'un travail de terrain et avec le temps nécessaire que nous pouvons saisir le sens et le sentiment que les Algériens ont de la hogra. Cela ne nous empêche pas d'analyser ce phénomène sur la base des enquêtes effectuées par les anthropologues et les sociologues.
Malheureusement ce type de travail reste toujours loin pour nous permettre de comprendre notre réalité sociale. Cependant, selon l'expérience individuelle et par rapport au vécu qu'on peut partager, nous pouvons dire que les séquelles de la hogra détruisent le corps social, car elles attaquent directement les relations sociales pour les fragiliser et les anéantir pour ne laisser en cours que celles qui se développent par la hogra et l'injustice. Dans cette situation, nous n'arrêtons pas de guérir le mal par le mal.

1)- Mohamed Mebtoul, La citoyenneté en question, (Algérie), GRAS, Dar El-Gharb, 2013, p. 147


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