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A FONDS PERDUS
Le feuilleton indien Par Ammar Belhimer [email protected]
Publié dans Le Soir d'Algérie le 07 - 02 - 2006

L'argent n'a pas d'odeur mais il a un embl�me : il est tricolore, plus pr�cis�ment fran�ais. Majorit� et opposition sont engag�s dans un feuilleton juridico- financier qui dure depuis quinze jours d�j� et qui leur prescrit, leur semble-t-il, de d�fendre le brave soldat sid�rurgique Arcelor contre le pirate des mers du Sud, Mittal. L'image est d'un confr�re parisien ; elle n'a �t� tol�r�e que comme �opinion� n'engageant que son auteur, mais elle r�sume bien le sc�nario.
Mittal Steel est une entreprise europ�enne qui a son si�ge aux Pays-Bas et son propri�taire, m�me s'il s'appelle Lakshmi Mittal, est anglais, donc europ�en. Elle est coupable de lancer une OPA, d�clar�e hostile, sur le num�ro un europ�en de l'acier par le canal ordinaire du capitalisme financier : la Bourse. Sa victime, Arcelor, est une entit� paneurop�enne n�e, il y a quatre ans, d'une triple fusion sur le sol europ�en (entre le fran�ais Usinor, le luxembourgeois Arbed et l'espagnol Aceralia) dont le si�ge social est Luxembourg. Dans la presse, le Pdg du leader mondial de l'acier, Lakshmi Mittal, et son fils Aditya, directeur financier, ne sont pas pris sous leur meilleur angle et sont vraisemblablement victimes d'un d�lit de faci�s. Comme leurs fortunes � c'est diff�rent de leurs capitaux �, ils sont originaires de l'Inde. La France est d�cid�ment ringarde. Elle r�ve d'�tendre son �exception culturelle�, soutenue � bout de bras d'aides directes et indirectes au profit de ses productions cin�matographiques, � une sorte d' �exception �conomique�. Le probl�me, cette fois, est qu'elle ne convainc personne. Volte-face, confusion et virulence donnent une forte impression de cacophonie au discours politique d�velopp� � l'occasion de cette OPA sur un fond �lectoraliste. L'Agence fran�aise pour les investissements internationaux (Afii) a recens� cinq op�rations (investissements, rachats et autres) de soci�t�s indiennes sur le territoire en France en 2005 sans qu'elles suscitent le moindre commentaire. Pourquoi alors tant de bruit en ce moment pr�cis ? La gauche socialiste fait �cho � la droite gaulliste comme s'il s'agissait de d�fendre une portion du territoire hexagonal occup� par une puissance �trang�re. Pour Dominique Strauss-Kahn, l'�minence grise du PS en mati�re �conomique, Mittal Steel n'est rien d'autre qu'un �pr�dateur indien�, alors que pour Fran�ois Loos, le ministre d�l�gu� � l'Industrie, rattach� � l'Economie et aux Finances, Mittal Steel �a enfreint toutes les r�gles de conduite, la grammaire de la finance internationale dans ce domaine�. Son patron direct, Thierry Breton, lui, ne sait pas sur quel pied danser. Apr�s avoir �mis au d�but de �vives pr�occupations� � l'�gard de l'OPA d�clar�e �hostile� sur Arcelor, il a brusquement � trois jours plus tard � corrig� l'impression de ses premi�res d�clarations sur l'offre. Pour tenter de se d�douaner, il soutint que le feuilleton Mittal n'est rien d'autre que �la vie normale des affaires� et que la d�cision rel�ve �des actionnaires et non des Etats�. Il cherchait visiblement, mais en vain, � calmer le jeu pour rassurer les investisseurs �trangers, d�j� fortement �chaud�s par le dossier Danone de l'�t� dernier. L'id�e de �patriotisme �conomique� avait �t� lanc�e cet �t� par le gouvernement apr�s les fortes rumeurs d'OPA hostile de l'am�ricain Pepsi-Cola sur Danone, fleuron de l�industrie agroalimentaire fran�aise. On se rappelle aussi la lev�e de boucliers dans la classe politique qu'ont suscit�e les rumeurs de rachat de Carrefour par l'am�ricain Wal-Mart, et plus r�cemment celui d'Eramet par la soci�t� mini�re br�silienne Companhia Vale do Rio Doce. Comme pr�vu, Nicolas Sarkozy, pass� ma�tre dans la surench�re, se disait �pas du tout d'accord� avec l�id�e qu'une entreprise ayant �co�t� aux contribuables des milliards d'euros � restructurer nous �chappe�. �Je suis lib�ral, ajoutait le ministre de l'Int�rieur et pr�sident de l'UMP, et pourtant j'assume une forme de dirigisme (...) quand il faut se battre pour des secteurs strat�giques�. Pour couronner le tout, on a envisag� une solution alternative consistant � consolider les relations d'affaires avec Nippon Steel pour emp�cher les Indiens de jeter leur d�volu sur l'entreprise europ�enne. Le pr�sum� champion europ�en se trouve ainsi r�duit � chercher son chevalier blanc au Japon, via Nippon Steel, juste parce que Mittal Steel viendrait d'un espace disqualifi� pour adh�rer au cercle ferm� du lib�ralisme. Tous se noient dans un verre d'eau. Comme disent les Fran�ais �quand le vin est tir� il faut le boire�. Finalement, m�me hostile, l'offre sur une des prestigieuses valeurs qui composent le CAC 40 va se d�rouler sans que le gendarme fran�ais de la Bourse intervienne ; l'Autorit� fran�aise des march�s financiers (AMF) ayant, � juste titre, d�cid� de se dessaisir du suivi de cette affaire au profit des autorit�s luxembourgeoises. Le si�ge de l'entreprise se situant au Luxembourg, c'est le droit luxembourgeois des soci�t�s qui s'applique, a-t-elle rappel� avec raison. La r�action fran�aise est, � bien des �gards, l'expression d'une frilosit� g�n�rale gagnant un pays ringard, vieillissant, de plus en plus repli� sur lui-m�me et qui peine � renouveler ses �lites faute de pouvoir les conserver. D�j� rel�gu�e par la Chine, l'Inde et le Br�sil au rang de puissance moyenne, le �non� au r�f�rendum sur la Constitution europ�enne a fini par enterrer ses derni�res vell�it�s de puissance. Elle a donc raison de craindre ces nouvelles puissances �conomiques mais elle a tort d'enfreindre les r�gles du jeu financier dont elle n�h�site pas � tirer profit par ailleurs. L'Inde a aujourd'hui des ambitions industrielles plan�taires. Ces ambitions brillent dans la pharmacie o� elle excelle dans la fabrication de g�n�riques, ces m�dicaments tomb�s dans le domaine public et, cons�quemment, moins chers pour des pays qui n'ont pas les moyens de se payer les marques. C'est � ce titre que Matrix a entrepris une OPA dans la pharmacie belge en 2005 et que Ranbaxy, le leader indien, a repris les g�n�riques de Rh�ne-Poulenc et s'attaque au march� am�ricain. Bharat Forge contr�le 60% de ce m�me march� dans le domaine des essieux pour v�hicules et une soci�t� indienne occupe la troisi�me place mondiale dans les supports optiques, DVD et CD. Nombreuses d'entreprises de marques fran�aises ou am�ricaines n'ont aujourd'hui rien � voir avec leurs attaches d'origine. C'est la loi du capitalisme financier qui a supplant� le capitalisme familial. Elles passent d'une main � l'autre aux plus offrants par la Bourse o� op�rent des investisseurs institutionnels et particuliers. C'est � ce titre qu'en d�cembre 2004, Lenovo, un assembleur chinois de mat�riel informatique jusque-l� inconnu, prend le contr�le de la division PC du monstre IBM pour 1,75 milliard de dollars pour occuper, illico presto, la troisi�me place mondiale, juste derri�re Dell et HP. Dans le m�me secteur de pr�dilection des Chinois, TCL s'empare de la �division grand public� du fran�ais Thomson, alors qu'Alcatel est en partenariat avec lui dans le cadre d'une soci�t� mixte de t�l�phonie mobile o� elle est minoritaire. Aux Etats-Unis, l'intervention �conomique chinoise est plus directe. Plus de 900 soci�t�s chinoises y ont �t� mont�es, par cr�ations nouvelles ou par rachats, pour organiser et optimiser leurs achats sur le march� local. Voil� suffisamment d'indices qui disqualifient la r�action fran�aise. C'est pourquoi la presse �trang�re, comme les milieux d'affaires ou certains gouvernements, notamment espagnol � o� le groupe convoit� emploie pourtant 13.000 travailleurs � et anglais, y ont vu une forme de nationalisme, voire de protectionnisme. Les r�actions du march� ne se sont pas faite attendre. Du c�t� des chefs d'entreprise, Serge Tchuruk, pr�sident d'Alcatel, a jug� �parfaitement normal� qu'une entreprise europ�enne puisse �tre la cible d'une offre. �Je crois, a-t-il dit jeudi dernier sur LCI, que nous sommes dans une �conomie de march� et qu'il faut l'accepter comme tel. Quand on fait des offres publiques ailleurs, on peut imaginer que la contrepartie existe pour la France�. Du c�t� des experts, les politiques fran�ais semblent plus disqualifi�s que jamais. �Nos hommes politiques ont sembl� l� globalement d�pass�s par les �v�nements, note Marc Touati, directeur des �tudes �conomiques chez Natexis banques populaires. De sorte que l'�motion a d'embl�e pris le pas sur la raison. Au lieu de recadrer les d�bats sur des enjeux purement �conomiques et financiers � les actionnaires d'Arcelor ont-ils int�r�t � c�der leurs titres � Mittal ? � ils se sont laiss�s aspir�s dans le pi�ge du patriotisme �conomique�. Kamal Nath, le ministre indien du Commerce et de l'Industrie, en visite � Londres jeudi dernier, s�est content� d�ass�ner une petite le�on de mondialisme aux autorit�s fran�aises : �C'est une affaire entre deux entreprises, et lorsque Lafarge a repris une bonne partie de notre industrie du ciment, le gouvernement indien lui a fait bon accueil.� Il rappellera aussi que les responsables fran�ais ne trouvent rien � redire quand les groupes hexagonaux mettent la main sur des groupes �trangers, comme le groupe de vins et spiritueux Pernod Ricard sur le britannique Allied Domecq et tout r�cemment Saint-Gobain sur le pl�trier britannique BPB. Plus fondamentalement, on s'�tonne de ce que la France fasse grand bruit autour d'une affaire qui concerne une entreprise (Arcelor) dont elle ne figure m�me pas dans le capital, contrairement au grand duch� du Luxembourg, qui a 5,62% et la r�gion wallone de Belgique qui d�tient une participation de 2,3%. D'ailleurs, seuls 40 % du capital flottant en Bourse d'Arcelor sont localis�s en Europe continentale. Certes, l'Etat fran�ais a mis beaucoup d'argent pour la survie et le redressement d'Usinor dans le pass�, cela lui donne-t-il pas pour autant le droit d'intervenir aujourd'hui dans la mesure o� il a fait le choix de ne pas �tre actionnaire de cette entreprise et, par cons�quent, de se priver des moyens d'exercer un droit de suite sur l'argent de ses contribuables. Les inqui�tudes que suscite l'OPA de Mittal Steel sur Arcelor sont d'ordre strictement social et leurs retomb�es risquent d'�tre grandes sur l'�lectorat en 2007. L'offre de Mittal publi�e le 27 janvier annonce un milliard de dollars de �synergies� d'ici � la fin de 2009, venant notamment �des achats, de la commercialisation et de l'optimisation de la fabrication�. Une formule tellement vague
qu'elle a fait craindre aux syndicats sid�rurgistes qu'elle consiste �galement � supprimer les nombreux emplois du groupe en France. Pourtant, un milliard de dollars n'est pas �un chiffre �norme�, compar� � la capitalisation totale attendue de quelque 40 milliards de dollars des deux groupes. Au-del� de la question sociale, c'est l'inefficacit� du dispositif juridique fran�ais, r�cemment mis en place dans le cadre du �patriotisme �conomique�, qui montre ses limites.


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