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LA QUESTION AMAZIGH EN ALG�RIE
De l�intrusion institutionnelle � une officialisation encore probl�matique
Publié dans Le Soir d'Algérie le 20 - 04 - 2009

Repenser la probl�matique institutionnelle et l�gislative de l�amazighit�, � l�aune de la reconnaissance constitutionnelle de tamazight comme �langue nationale � et de la mondialisation pr�gnante, par une approche dynamique et non conflictuelle, constitue une n�cessit� vitale pour le devenir du collectif national. La diversit� et les droits culturels sont au c�ur des droits de l�homme. Ils s�inscrivent dans les droits de la deuxi�me g�n�ration, � savoir les droits �conomiques, sociaux et culturels. Ces derniers impliquent la sauvegarde de l�identit� de toute communaut� humaine ; la libre participation � la vie de la soci�t� et aux prises de d�cisions qui la concernent ou qui concernent la r�gion o� elle vit et la promotion de ses int�r�ts dans le processus de d�veloppement. Ces principes et d�finition ont �t� maintes fois r�affirm�s par la jurisprudence de la Commission africaine des droits de l�homme et des peuples, dont l�Alg�rie est partie prenante.
I- Le syst�me normatif international et les droits culturels
La communaut� internationale a fait un pas important dans le domaine du respect de la diff�rence et des droits culturels et identitaires � partir de la D�claration universelle des droits de l�homme, approuv�e et proclam�e par l�Assembl�e g�n�rale des Nations unies le 10 d�cembre 1948. L�article 11 de la Constitution alg�rienne du 10 septembre 1963 avait proclam� l�adh�sion de l�Alg�rie � cette DUDH. L�article 22 de cette d�claration affirme que les droits en question sont n�cessaires � la dignit� de l�homme et au libre d�veloppement de sa personnalit� et rappelle que toute personne, �en tant que membre de la soci�t�, est fond�e � jouir de ces droits �gr�ce � l�effort national et � la coop�ration internationale compte tenu de l�organisation et des ressources de chaque pays�. L�article 27 �tablit la corr�lation entre l�individu et sa communaut� en sp�cifiant que �toute personne a le droit de prendre part librement � la vie culturelle de la communaut�, de jouir des arts et de participer au progr�s scientifique et aux bienfaits qui en r�sultent�. Deux instruments de port�e g�n�rale � qui donnent toute leur valeur en tant qu�engagements contraignants aux principes �nonc�s dans la DUDH � ont �t� adopt�s � l�unanimit� par l�AG des Nations unies le 16 d�cembre 1966. Il s�agit du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et du Pacte international relatif aux droits �conomiques, sociaux et culturels entr�s en vigueur respectivement le 23 mars 1976 et le 23 janvier 1976, ratifi�s par l�Alg�rie suivant le d�cret pr�sidentiel n�89-66 du 16 mai 1989. L�article premier des deux pactes affirme que tous les peuples ont le droit de disposer d�eux-m�mes et que, en vertu de ce droit, ils sont libres de d�terminer leur statut politique et d��uvrer � leur d�veloppement �conomique, social et culturel. S�agissant de la dimension culturelle, ce droit comprend plusieurs droits fondamentaux tels le droit � la libert� d�opinion et d�expression ou d�information, le droit au plein �panouissement de son identit� dans la connaissance et la diversit� des cultures, le droit � l��ducation, le droit � la sant� et au bien-�tre. D�autres dispositions du Pacte international relatif aux droits �conomiques, sociaux et culturels, en particulier l�article 15, sp�cifient les droits reconnus par les Etats signataires. De son c�t�, l�Unesco a engag� une longue et profonde r�flexion sur les droits culturels. La D�claration sur les principes de la coop�ration culturelle internationale du 4 novembre 1966 affirme clairement dans son article premier non seulement que �chaque culture a une dignit� et une valeur qu�il faut respecter et prot�ger� mais aussi que �chaque peuple a le droit et l�obligation de d�velopper sa culture �, et que toutes �font partie du patrimoine commun de l�humanit�. Parmi les nombreuses recommandations de l�Unesco sur la culture, citons le point culminant que repr�sente la D�claration de Mexico adopt�e lors de la Conf�rence mondiale sur les politiques culturelles (mondia cult 82) ainsi que la r�cente Convention pour la protection et la promotion de la diversit� des expressions culturelles du 20 octobre 2005. Plus qu�une �num�ration de droits, la D�claration de Mexico �tablissait les fondements des droits culturels. Elle liait le fait de l�identit� culturelle � �ensemble de valeurs uniques et irrempla�ables� � � la volont� �mancipatrice des peuples, � l�expression cr�ative de toute l�humanit�, � la valorisation de la diversit� et � la d�mocratisation de la soci�t�. Au syst�me normatif international, s�ajoutent d�autres instruments r�gionaux telles la Charte africaine des droits de l�homme et des peuples du 27 juin 1981 et la Charte arabe des droits de l�homme du 15 septembre 1994 auxquelles l�Alg�rie souscrit. La Charte africaine, qui reprend certains des droits consacr�s par le droit onusien, pr�sente des caract�res particuliers et affirme dans son pr�ambule la n�cessit� de prendre en consid�ration �les vertus des traditions historiques et les valeurs de la civilisation africaine� dans la conception des droits de l�homme et le droit qu�ont les pays et les peuples de r�habiliter et de promouvoir le patrimoine culturel africain. L�article 22 de cette charte stipule explicitement que �tous les peuples ont droit � leur d�veloppement �conomique, social et culturel, dans le respect de leur libert� et de leur identit�, et � la jouissance �gale du patrimoine commun de l�humanit� �. De m�me, il n�est pas �n�gligeable�, comme le note le doyen A. Mahiou, de voir la charte arabe reconna�tre �le droit des minorit�s de b�n�ficier de leur culture et de manifester leur religion par le culte et l�accomplissement des rites�.(1) En l�esp�ce, ces normes internationales sont appel�es � produire des effets internes, au sens de l�article 132 de la Constitution de novembre 1996, lequel dispose : les trait�s ratifi�s par le pr�sident de la R�publique, dans les conditions pr�vues par la Constitution, sont sup�rieurs � la loi. Ces normes convertissent l�impasse du droit alg�rien en une voie �troite vers la consid�ration juridique du respect de la diversit� culturelle de la nation, de la sp�cificit�, de l�authenticit� et de la valeur de chacune d�elles. Cette impasse pose ainsi le probl�me du droit des populations amazighophones � pr�server et � promouvoir leur identit� et leur langue dans les divers segments de la vie publique.
II- Droit � la diversit� et raisonnement juridique uniciste et id�ologique
Le syst�me juridique alg�rien marque de fa�on ferme la n�gation et le rejet plus que l�absence de tout proc�d� de reconnaissance du fait amazigh. L�arabisme et l�islamisme ont �t� les seules normes de r�f�rence. Le paradigme nationaliste impr�gne de mani�re substantielle le corps de la doctrine officielle qui s�est pr�cis�e � partir de la Charte d�Alger en 1964. Les r�f�rents qui fondent l�existence de la nation alg�rienne et ses liens avec son environnement, les probl�mes de l�identit� et de l�alt�rit� sont abord�s � travers les prismes d�formants de la langue et de la religion, exacerb�s, il est vrai, par l�hypercentralisme et la construction de l�Etat national. En effet, dans l�Alg�rie coloniale, les questions identitaires ont �t� longtemps diff�r�es, voire �vacu�es par le mouvement nationaliste. Les raisons qui ont conduit � cette occultation sont aujourd�hui connues : crainte de dispersion des �nergies, complexe devant la tutelle coloniale puissamment centralis�e et qui avait impos� le jacobinisme comme un pr�alable civilisationnel, d�valorisation par l�id�ologie ambiante d�alors des particularismes et de toute forme d�expression plurielle. Pour ces raisons mais aussi par la volont� de confisquer le pouvoir, les dirigeants de l�Alg�rie ind�pendante ont reconduit ces r�ductions. L�id�ologie nationale devient de ce fait un discours que produit et reproduit une minorit� dont le seul b�n�fice est de ma�triser les r�nes du pouvoir et de d�tenir les moyens symboliques et pratiques d�imposer � l�ensemble des Alg�riens sa propre conception des choses. Pour emp�cher toute forme d�expression plurielle et n�cessairement contradictoire de la soci�t�, le cadre �tatique sera totalement verrouill�. Le l�gislateur l�organisera autour d�un seul principe : l�unicisme autour duquel s�articulent toutes les institutions. L�Etat nation ne con�oit donc aucun ordre juridique, linguistique ou autre en dehors du monopole de l�Etat sur la production du droit et consid�re qu�aucune r�alit� culturelle, linguistique ou sociale n�a droit au chapitre si elle n�est con�ue et accept�e par le sommet de l�Etat. Signe d�un autre pluralisme d�ni� : celui de la pluralit� de la norme juridique et des lieux de sa formation et de son accomplissement, le droit coutumier berb�re, dans ses multiples facettes (kabyle, mozabite, touareg, chenoua, beni snouss, touat�) est supplant� et subit � son tour les contrecoups de l�uniformisation. Selon le juriste T. Khalfoune, c�est �l�islam qui sera mobilis� en la circonstance pour lui contester toute l�gitimit�(2). La jurisprudence de la Cour supr�me a �t� constante et sans �quivoque � ce sujet. Elle a eu � rappeler dans deux esp�ces rendues en 1967 qu��en mati�re d��tat des personnes, la coutume ne saurait faire �chec � la loi� (sous-entendu la loi musulmane). A titre d�illustration, dans deux arr�ts relatifs au droit de garde, la Cour a rappel� par deux fois en 1967 et 1968 (arr�ts du 26 avril 1967 et du 12 juin 1968) que �la coutume ne saurait faire �chec � la loi en mati�re de statut personnel � et pr�cise : �En confiant l'enfant � son p�re en se fondant sur les r�gles du droit coutumier qui reconna�t au p�re kabyle le droit de reprendre son enfant m�me si celui-ci est �g� de deux ans, les juges du fond n'ont pas justifi� leur d�cision.�(3) Les codes civile et de la famille promulgu�s respectivement en 1975 et 1984 confirment cette tendance jurisprudentielle et s�inscrivent dans ce raisonnement juridique unitaire et h�g�monique � travers le cadre �triqu� de leur codification. C�est cette logique qui a conduit jusqu�� l�outrance ; r�glementer y compris les pr�noms que les Alg�riens peuvent donner � leurs enfants (voir nomenclature de l��tat civil de 1981), et codifier, pour les d�naturer, la toponymie et l�hydronymie essentiellement � caract�re amazigh mais aussi punique, romaine, arabe et fran�aise, t�moins de la pluralit� autant linguistique que culturelle de la formation historique de notre alg�rianit� fond�e autour du substrat amazigh. Une alg�rianit� riche et f�conde, aux antipodes des fabrications artificielles du discours officiel, v�cue avec s�r�nit� comme a eu � le rapporter en des termes po�tiques feu M. Lacheraf dans son dernier livre Des noms et des lieux. M�moires d�une Alg�rie oubli�e. C�est ainsi que l��quation identitaire a �t� r�duite, pour paraphraser A. Dourari, �par la gr�ce d�une vision id�ologique �triqu�e et une mystification de l�histoire, � l�arabo-islamisme pr�n�e par les ul�ma en n�gation historique et culturelle d�un pays aussi ancien que l�Alg�rie�.(4) Une vision au nom de laquelle notre pays ne finit pas de payer un lourd tribut. Par-del� les discours politiques conjoncturels, les grands textes d�orientation sur l�identit� nationale sont d�une remarquable constance et homog�n�it�(5), et restent impr�gn�s par un discours dans lequel l�unit� est assimil�e � l�unicisme et la diversit� � la division, voire � la menace sur l�unit� et la souverainet� nationales. L�Etat-nation est d�fini tant dans le discours politique que juridique � partir du sacro-saint principe de l�unit� arabo-musulmane. Ce principe, du fait de la proximit� de l�ind�pendance et de la fragilit� de l�Etat naissant, est par� de toutes les vertus. La Charte d�Alger de 1964 �nonce sans aucune fioriture que �l�Alg�rie est un pays arabo-musulman (�). L�essence arabo-musulmane de la nation alg�rienne a constitu� un rempart solide contre sa destruction par le colonialisme�. (chap.III : 35). La Charte nationale de 1976 rench�rit : �Le peuple alg�rien se rattache � la patrie arabe dont il est un �l�ment indissociable (�). Se sont ajout�s progressivement � partir du VIIe si�cle, les autres �l�ments constitutifs de la nation alg�rienne, � savoir son unit� culturelle, linguistique et spirituelle (�). L�islam et la culture arabe �taient un cadre � la fois universel et national (�). D�sormais, c�est dans ce double cadre (�) que va se d�terminer le choix de notre peuple et se d�rouler son �volution� (titre I : 83).(6) C�est dans cet ordre des choses que la Constitution de 1963, puis celle de 1976, proclame que �l�arabe est la langue nationale. L�Etat �uvre � g�n�raliser l�utilisation de la langue nationale au plan officiel� (art. 3). Dans un contexte relativement diff�rent, cet article est repris tel quel par la Constitution du 28 f�vrier 1989. Il a fallu attendre le texte constitutionnel du 28 novembre 1996 lequel, au-del� de la reprise syst�matique de l��nonc� de l�art. 3, ouvre une br�che dans le sens de la reconnaissance du fait culturel et identitaire amazigh. En mentionnant, m�me de fa�on incidente, dans son pr�ambule que �les composantes fondamentales de son identit� sont l�islam, l�arabit� et l�amazighit�, ce texte marque un l�ger infl�chissement de la doctrine de l�Etat sur la probl�matique identitaire par son acceptation de la dimension amazigh. Il pr�figure implicitement un d�but d�inscription juridique d�une situation de fait connue � l�issue de la r�vision du 8 avril 2002 qui a eu lieu dans la tourmente des tragiques �v�nements d�avril 2001.
III- Une int�gration institutionnelle par effraction
Avant de s�interroger sur la pertinence et la port�e, somme toute relatives, de l�amendement constitutionnel du 8 avril 2002, il importe de rappeler que l�introduction de la langue amazigh s�est effectu�e dans l�ordre juridique linguistique national comme par effraction. Sa socialisation, le plus souvent, a ob�i � des am�nagements factuels et conjoncturels � la faveur de la mobilisation populaire qui ne cessa de s�amplifier depuis l��closion du Printemps d�avril 1980. Des mesures tactiques sont prises dans l�urgence sans une assise juridique clairement d�finie pour faire face aux grandioses marches populaires des ann�es 1989/1990 et 1993/1994. D�o� l�effraction �voqu�e. En effet, les premi�res intrusions dans le champ institutionnel remontent � la cr�ation de deux d�partements de langue et culture amazigh au sein de l�universit� de Tizi-Ouzou (septembre 1990) et de B�ja�a (septembre 1991) en vertu d�un simple arr�t� du minist�re de l�Enseignement sup�rieur et de la Recherche scientifique, puis promus au rang d�Instituts suivant le d�cret ex�cutif n�147-97 du 10 mai 1997 portant cr�ation d�une licence de langue et culture amazigh. Les secondes sont li�es � la mise en place d�abord d�un flash d�information � la T�l�vision nationale cons�cutivement � une d�cision politique non �crite �manant du chef du gouvernement durant les troubles de l�ann�e 1992 qui avaient suivi l�interruption du processus �lectoral de janvier de la m�me ann�e. Ce flash s�est transform�, � partir du 7 juin 1996, � l�issue d�une r�union de concertation entre le chef du gouvernement et le Haut-commissaire � l�amazighit� (HCA) en �bulletin quotidien d�information�. Inutile de pr�ciser qu�il n�y a nulle trace dans le Journal officiel de la R�publique alg�rienne d�mocratique et populaire de cette d�cision qui r�git ce bulletin d�information. L�autre exemple qui illustre, on ne peut mieux, le caract�re intrusif dans le droit alg�rien est le d�cret pr�sidentiel n�95-147 du 27 mai 1995 portant cr�ation d�un Haut-Commissariat � l�amazighit�, intervenu apr�s huit (8) mois de boycott de l��cole en Kabylie. Ce texte est int�ressant dans la mesure o� il aborde la question amazigh sous un double aspect : culturel et linguistique d�une part et identitaire d�autre part. Les missions assign�es � cette nouvelle institution telles que pr�cis�es par l�article 4 de ce d�cret sont notamment �l�introduction de la langue amazigh dans les syst�mes de l�enseignement et de la communication � mais aussi � innovation de taille � �la r�habilitation de l�amazighit� en tant que l�un des fondements de l�identit� nationale �. Le paradoxe est que le HCA devrait accomplir son travail dans un cadre aconstitutionnel, c'est-�-dire en dehors de tout statut officiel de la langue et de l�identit� qu�il est charg� de promouvoir.
IV- Une officialisation toujours probl�matique
Il a fallu attendre la r�vision du 8 avril 2002 pour voir enfin tamazight reconnue comme langue nationale par le truchement de l�article 3 bis. Cela constitue une avanc�e au regard du pass� r�cent. Mais, force est d�admettre que du point de vue de sa traduction concr�te, cette inscription juridique semble poser plus de probl�mes qu�elle n�en r�sout. Six ann�es apr�s, tout laisse � penser que l�inscription de tamazight (situation de fait) dans la loi fondamentale du pays ob�it plus � des fins de l�gitimation et d�instrumentalisation qu�� une r�elle volont� de sa prise en charge institutionnelle. Le modus operandi de cette r�vision est lui-m�me probl�matique du fait qu�il n�a pas eu lieu par voie r�f�rendaire mais lors du Congr�s des deux chambres du Parlement et cela, en l�absence des deux partis politiques qui ont port� la revendication amazigh. C�est aussi m�conna�tre les limites et la vanit� du constitutionnalisme alg�rien, dans lequel l�exercice du pouvoir emprunte d�autres voies que celles du droit, que d�accroire en la vertu et valeur de la norme constitutionnelle. Deux exemples corroborent cette th�se. La r�cente promulgation de la loi 08-09 du 25 f�vrier 2008 portant code de proc�dure civile et administrative fait abstraction de l�article 3 bis de la Constitution et oblige explicitement dans son article 8 l�usage exclusif de la langue arabe dans les d�bats et l�ensemble des actes judiciaires sous peine d�irrecevabilit�. Cette disposition est, � elle seule, symptomatique des atermoiements et de la ruse du r�gime alg�rien qui, m�me lorsqu�il conc�de face � la contestation citoyenne semble mal supporter ses concessions et ne s�embarrasse pas de scrupule pour revenir sur ses engagements et violer les lois qu�il a lui-m�me �dict�es. Le deuxi�me exemple concerne le maintien en l��tat de la loi 96-30 du 21 d�cembre 1996 modifiant et compl�tant la loi 91-05 du 16 janvier 1991 portant g�n�ralisation de l�utilisation de la langue arabe et de la loi 90-07 du 3 avril 1990 relative � l�information qui confirme, si besoin est, la vacuit� de la norme constitutionnelle et la permanence du discours politique excluant de fait la langue amazigh. Le principe de la hi�rarchie des normes implique d�une part la mise en conformit� des textes ant�rieurs avec la loi fondamentale de laquelle d�couleraient toutes les autres et d�autre part, avec les stipulations des trait�s internationaux d�ment ratifi�s. La logique voudrait que les deux lois pr�cit�es soient abrog�es sine die sinon r�ajust�es en fonction de la nouvelle donne constitutionnelle. Elles devraient �tre modifi�es dans le sens o� toute discrimination linguistique dans le domaine de production, de diffusion et de publicit� sera �vacu�e.
V- En guise de conclusion
Il ne suffit pas de proclamer dans la Constitution que �tamazight est �galement langue nationale�. Le statut de langue nationale est cens� la prot�ger contre toute tentative de minoration politique et juridique puisqu�elle devrait �tre, avec l�arabe, la langue par laquelle se r�alise aussi l�ensemble des activit�s publiques. A ce titre, les pouvoirs publics doivent utiliser chacune d�elles sur l�ensemble du territoire ou dans des cadres de type administratif ou politique clairement d�limit�s. L�aire g�ographique ou l�espace social concern� ne sont donc pas des crit�res certains de r�tablissement juridique d�une langue. En droit, une langue nationale doit �tre assur�e de sa force d�impr�gnation culturelle par les appareils d�information, de communication et de diffusion. Elle doit �tre celle dans laquelle s�expriment les pouvoirs publics en direction des ressortissants de l�Etat. Si pour les Etats plurilingues, le principe est que les langues nationales sont des langues parl�es et reconnues comme vecteur de communication sociale et de diffusion juridique dans l�Etat, sous le ciel alg�rien rien n�a chang�. La langue amazigh est toujours exclue des espaces publics tels que les tribunaux, l�administration, l��cole et les m�dias. Son usage a �t� tant sur le plan social que sur le plan territorial. Force est de constater, aujourd�hui, que la politique d�enseignement accentue, de plus en plus, sa d�socialisation � l��cole. Dans le domaine de la communication, la culture amazigh est laiss�e pour compte aussi bien dans les m�dias publics, la t�l�vision nationale, la radiodiffusion, l��dition que dans le cin�ma et le th��tre. La cha�ne amazigh de la TV alg�rienne tant promise peine � sortir de ses limbes. Elle conna�t un d�but chancelant avec, en toile de fond, la m�me orientation id�ologique et r�ductrice. La radio kabyle de Tizi-Ouzou est renvoy�e aux calendes grecques alors que les autres radios r�gionales, � l�image de Soummam, Batna, Tassili, Ouargla�, sont davantage une r��dition de la cha�ne nationale et sont corollairement tr�s peu r�gionales et/ou enclines aux sp�cificit�s locales et � la diversification de ses espaces d�expression. A cela s�ajoute l�opini�tre, et n�anmoins pr�judiciable, volont� de certains cercles � confiner tamazight dans le seul segment folklorique et mus�ographique ! Devant cette situation, une conclusion peut �tre tir�e. Nonobstant l�amendement constitutionnel du 8 avril 2002, l�ordre politico-juridique est rest� vigoureusement impr�gn� d�exclusion et d�ostracisme linguistique et culturel. L�engagement d� � l�Etat alg�rien en mati�re de r�habilitation et de promotion de la �composante amazigh (fondamentale selon le pr�ambule de la Constitution) demeure au stade de v�ux pieux. Cet amendement n�a pas connu les prolongements l�gislatifs et r�glementaires qui viendraient consolider les rares acquis enregistr�s et leur donner leur place dans un dispositif juridique coh�rent � m�me d�assurer leur application et garantir la pleine effectivit� de cette disposition constitutionnelle. Autrement dit, la dichotomie est r�elle entre les proclamations abstraites des principes juridiques contenus dans la Constitution et leur mise en pratique effective(7). De plus, quel cr�dit accorder � l�article 3 bis lorsque l�on sait que la langue amazigh ne fait pas partie des sept fondements consid�r�s comme irr�versibles � en vertu de l�article 178 de la Constitution ? Cet article, pourtant amend� et reformul� lors de la derni�re r�vision, pr�cise que �toute r�vision constitutionnelle ne peut porter atteinte au caract�re r�publicain de l�Etat (�) � l�Islam en tant que religion de l�Etat ; � l�arabe en tant que langue nationale et officielle�� , autorisant ainsi, par omission, la r�vocabilit� du statut national de tamazight. Peut-�tre que cet oubli se confond avec les dispositions du code de proc�dure civile et administrative et des lois relatives � la g�n�ralisation de l�utilisation de la langue arabe et � l�information qui excluent de fait l�usage de tamazight dans les espaces publics !
Hakim Saheb,
doctorant en droit et d�put� RCD
- Mahiou (Ahmed) : La charte arabe des droits de l�homme ?, in Revue Idara, n� 21 volume 11, 2001, p. 111.
- Khalfoune (Taher) : Langue, identit� et Constitution, in Revue Confluences m�diterran�e, Harmattan, avril 2000.
- Rapport�s par N. A�t Za� : Le droit musulman et les coutumes kabyles ; in Revue alg�rienne des sciences juridiques, �conomiques et politiques n� 2 1992. p.307.
- Dourari Abderrezak) : Les malaises de la soci�t� alg�rienne. Crise de langue et crise d�identit�, Casbah �d. Alger 2004, p. 134.
- Cf. � cet effet Chaker Salem) : Imazighen ass-a, �d. Bouch�ne Alger 1990, p. 68.
- Idem, p.67.
- Voir � cet effet l�int�ressante th�se de Ka�s Cherif) : De l�ineffectivit� des lois en Alg�rie, doctorat d�Etat soutenu � la Facult� de droit, Universit� M. Mammeri Tizi-Ouzou, ann�e 2006- 2007.


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