Le ministre algérien des Affaires étrangères, Abdelkader Messahel, a pris part jeudi dernier à Paris à la Conférence ministérielle sur la lutte contre le financement du terrorisme autour du thème «No money for terror». Les conclusions de la Conférence d'Alger sur la lutte contre le financement du terrorisme, tenue les 9 et 10 avril, ont été exposées par le ministre des Affaires étrangères, Abdelkader Messahel, jeudi dernier à Paris, à l'occasion de la Conférence ministérielle de lutte contre le financement du terrorisme. Autour de la thématique «Lutter contre la criminalité organisée pour assécher le financement du terrorisme», Abdelkader Messahel, présent en tant que panéliste, a rappelé que cette réunion intervenait en application d'une décision en ce sens du Conseil de paix et de sécurité de l'Union africaine, et donne effet à l'un des sept axes de l'action future de l'Afrique telle que proposée par le président Bouteflika dans le mémorandum qu'il a soumis à ses pairs. Le ministre des Affaires étrangères a estimé que «ce fléau se finance en puisant dans de nombreux créneaux du crime organisé», insistant sur la nécessité et l'urgence de la lutte contre le financement du terrorisme. Le terrorisme en Afrique se finance à travers de nombreux créneaux, tels que «le commerce et d'autres activités lucratives, certaines ONG et les prélèvements caritatifs, la contrebande d'armes, de biens et de monnaie, le trafic de drogues, la traite des êtres humains, l'exploitation de la migration illégale, l'extraction illégale de matières premières, la piraterie maritime, les kidnappings contre rançons, la cybercriminalité, le braconnage et la contrefaçon», a mis en exergue le ministre, selon l'Agence Presse service (APS). Après son adhésion massive à la Convention des Nations unies pour la répression du financement du terrorisme, l'Afrique, a mentionné Abdelkader Messahel, s'est investie dans la mise en place d'instruments régionaux efficaces dans la gestion de la lutte contre le terrorisme et le financement de ce fléau. Un engagement indéfectible La lutte internationale contre le terrorisme, son financement et l'extrémisme constituent le cheval de bataille de l'Algérie, d'où tous les engagements pris par notre pays, comme le soulignera le chef de la diplomatie algérienne, à travers «l'adoption de la Convention d'Alger de l'Organisation de l'Unité africaine sur la prévention et la lutte contre le terrorisme de 1999 et son protocole additionnel de juillet 2004, l'opérationnalisation du Conseil de paix et de sécurité de l'UA, l'adoption en 2004 d'un Plan africain de lutte contre le terrorisme avec une dimension consacrée à la lutte contre le financement de ce fléau, et la répression du paiement des rançons aux groupes terroristes contre libération des otages, la nomination en octobre 2010 du Représentant spécial de l'UA pour la Coopération contre le terrorisme», l'adoption en juillet 2011 d'une loi-type sur la lutte anti-terroriste et, enfin, la désignation au mois de janvier 2017, du président de la République, Abdelaziz Bouteflika, en qualité de Coordonnateur pour la prévention de la radicalisation et la lutte contre le terrorisme en Afrique, le mandat incluant, bien entendu, toutes les dimensions de cette lutte, dont celle contre le financement du terrorisme. Le ministre des Affaires étrangères a également souligné la détermination des pays africains à lutter contre le financement du terrorisme lors de la réunion de haut niveau d'Alger, en déclarant que «cette réunion a adopté un ensemble de recommandations qui traduisent la détermination du continent africain à agir concrètement dans un grand nombre de domaines contre le financement du terrorisme, à lutter contre la connexion qui se développe entre ce fléau et le crime organisé transnational, à tarir autant que faire se peut les sources qui les alimentent et protéger leurs ressortissants, leurs économies et leur sécurité contre les agissements criminels des uns et des autres». Aucun pays n'est à l'abri A cette occasion, M. Messahel n'a pas manqué de souligner que cette rencontre autour du financement du terrorisme se tient dans un contexte marqué par le développement de la menace terroriste. «Cette rencontre intervient dans un contexte international marqué par un constat partagé sur le rôle déterminant joué par l'argent dans le développement et le renforcement des groupes terroristes et de leurs activités criminelles», a-t-il relevé, en s'adressant aux représentants de 72 Etats et 20 organisations internationales participants. Le ministre algérien des Affaires étrangères a tenu à rappeler que les attentats perpétrés durant l'année écoulée «montrent qu'aucun pays et pratiquement aucune région du monde n'en est à l'abri», et ce, malgré un léger recul, entre autres, en Syrie et en Irak. M. Messahel a souligné à l'assistance la menace croissante dans nombre de pays à travers le danger que représente le retour des combattants terroristes étrangers vers leurs pays d'origine ou leur déplacement vers d'autres zones de conflits, en expliquant que «les dernières indications établissent que ces combattants terroristes étrangers sont originaires de plus de 120 pays, c'est dire l'extension de l'espace potentiel de leurs activités criminelles». Si la menance est grandissante, elle est liée, comme l'a soutenu le ministre algérien des Affaires étrangères, au changement du mode opératoire des groupes terroristes qui «relativisent la perte de territoires par un plus grand recours à Internet, au Darknet et aux plateformes cryptées, par le redéploiement des forces sur des zones de conflits ou des zones caractérisées, tels le Sahel et toute la bande sahélo-saharienne, par l'immensité des territoires, la porosité des frontières, la faiblesse des moyens des pays de la région, la pauvreté et des taux élevés de chômage parmi les jeunes». Le chef de la diplomatie algérienne a également indiqué que les groupes terroristes mobilisent de «plus en plus» de ressources financières, en établissant des connexions avec le crime organisé transnational. Dans la déclaration finale, les participants ont souligné l'importance d'une approche intégrée dans la lutte contre le terrorisme et son financement, en renforçant leur contribution nationale et collective à la lutte contre le financement d'individus, de groupes, d'entreprises et d'entités terroristes. S'engageant à poursuivre le renforcement de leurs cadres juridiques et opérationnels internes pour la collecte, l'analyse et le partage des informations par les autorités nationales, ces derniers comptent criminaliser «pleinement» le financement du terrorisme, que ce soit le financement des déplacements ou le recrutement des terroristes, en appliquant des sanctions pénales «efficaces, proportionnées et dissuasives», même «en l'absence de lien avec un acte terroriste spécifique». La lutte contre les transactions financières anonymes constitue également une priorité pour les participants, à travers l'amélioration de la traçabilité et la transparence des flux financiers. «Nous nous engageons à renforcer en tant que de besoin les cadres de partage d'informations avec le secteur privé, qui peuvent permettre aux autorités compétentes d'obtenir des informations pertinentes, y compris sur les bénéficiaires effectifs», ont-ils noté. Ce qui va permettre de «lutter contre la fraude documentaire, de tracer, de détecter, de sanctionner et de démanteler efficacement les intermédiaires financiers clandestins, ainsi que de faire face aux risques liés à l'utilisation du paiement en liquide, des systèmes informels de transfert financier (hawalas par exemple), des cartes prépayées et des moyens de paiement anonymes». Les participants ont décidé de surveiller de près la traçabilité et la transparence des fonds destinés aux organisations à but non lucratif et aux œuvres caritatives en garantissant de manière urgente la mise en œuvre effective des normes du GAFI (Groupe d'action financière) relatives aux organisations à but non lucratif, et ce, pour limiter les éventuels détournements à des fins de financement du terrorisme par des mesures ciblées et fondées sur les risques, sans entraver ou dissuader les activités de la société civile. Les 80 ministres et les organisations internationales ont décidé de collaborer davantage avec l'industrie du numérique, notamment les plateformes internet et les principaux réseaux sociaux, avec les cellules de renseignement financier, les services de police et de justice, de renseignement et d'enquête.