Débat jeudi soir sur l'une des «chaînes» de l'ENTV. Le sujet, à l'intitulé-fleuve, «la diplomatie algérienne». Tout le monde l'aura remarqué, il n'y a que la télévision algérienne pour trouver des thèmes aussi… vastes et vagues pour des émissions d'une heure et demie. Dans un monde télévisuel où la tendance est aux thématiques précises, souvent imposées par un événement ou plus généralement l'ensemble de l'actualité, l'ENTV réussit cette performance d'un plateau où on peut parler de tout et de rien, tellement les sujets sont incernables. Cette émission sur «la diplomatie algérienne», peut-être plus que les autres, ne pouvait donner que ce qu'elle a donné. Des rappels connus de tous, un état des lieux qui «devait» quand même oser quelque critique mais jamais sur le fond, des «recommandations» en forme de désespérants lieux communs et pour finir, des perspectives béatement optimistes puisque seulement conditionnées à quelques réajustements de pure forme. Ça ne pouvait donner que ce que ça a donné, d'abord parce que la diplomatie algérienne procède d'un grand mythe : comme si, en dehors du respect mémoriel dû à son action dans l'effort général qui a permis de recouvrer la souveraineté du pays, un pouvoir qui n'a pas été un exemple de réussite en matière de construction d'un destin collectif pouvait revendiquer une diplomatie performante et à la hauteur d'une grande ambition nationale ! Et c'est à ce niveau du débat que le téléspectateur pouvait attendre le propos critique des «experts» et des «docteurs» en tous genres qui squattent les plateaux de ce genre d'émissions. Un propos critique qui ne viendra pas et pour cause, le terrain de la discussion étant manifestement bien balisé. Ajoutez le fait, essentiel, que la contradiction, un ingrédient indispensable dans tout débat médiatique et qui semble irrémédiablement banni de notre télévision et vous obtiendrez, sans surprise, une émission sans âme. Digne de… l'ENTV, en dépit de quelques velléités prétentieusement indicatrices de changement. Il en était ainsi de quelques audacieuses «indignations» sur le manque où l'absence d'initiatives et d'imagination de représentations diplomatiques, de leur communication archaïque, de leurs sites web indigents ou inaccessibles, de leurs personnels incompétents et arrogants, de leur incapacité à entretenir une diaspora algérienne à l'étranger, à attirer investisseurs et touristes, à défendre la dignité de nos ressortissants à l'étranger, à faire connaître et apprécier notre patrimoine culturel et plein d'autres «critiques» censés annoncer une liberté de ton dans un média en quête désespérée de crédibilité. Une crédibilité bien compromise, au train où vont les choses. Il aurait peut-être fallu dans ce «débat», énoncer un constat de départ : le pays a la diplomatie de son système. Parce qu'au moment où l'un des invités sur le plateau croyait être au sommet de l'irrévérence en faisant le parallèle entre ce que réalise une ambassade d'un pays européen aux Etats-Unis et l'inertie de notre représentation, il a oublié de dire l'essentiel : il parlait de l'ambassade d'un pays démocratique dont l'action diplomatique n'est que le reflet de son développement interne en tant que… démocratie. Comme personne n'est visiblement prêt à dire une telle chose sur le plateau, il y a encore du travail. Pour la crédibilité de l'ENTV et tout le reste. [email protected]