Le Hamas palestinien n'a plus l'exclusivité, à Téhéran on passe également au vert. Une révolution qui ressemblerait à toutes celles que Mme Rice menait à distance, au nom du fameux déséquilibre démocratique dans de vieilles républiques soviétiques ? Nicolas Sarkozy peut crier à l'ampleur de la fraude, Angela Merkel peut s'inquiéter de tout ce qui se passe à l'entrée du bazar et Barack Obama peut craindre pour la liberté de contester en Iran, les mollahs verrouillent tout, le temps d'un clic. Parce qu'ils sont soupçonnés de faire le jeu du camp des Mossavi, à vrai dire à rendre compte de la profonde division de la société iranienne, les journalistes étrangers sont placés en hôtel surveillé. La sentence pour ces ennemis de la République islamique qui feraient exprès de fragiliser une unité iranienne qui s'est largement fissurée derrière la belle façade que le clergé a pris l'habitude de rafraîchir à la veille de chaque rendez-vous électoral. Si le guide suprême s'est déclaré favorable au recomptage des voix, ce n'est pas pour autant qu'il a ignoré l'art du verrouillage. Alors que les représentants des médias étrangers sont forcés à compter leurs pas et les étoiles dans le hall de l'hôtel où ils ont été assignés à résidence, Ali Khamenei a dépêché l'heureux réélu dans l'Oural, en Russie. Assurément, l'un des plus beaux voyages d'Ahmadinejad à l'étranger tant il lui a apporté une «légitimité» que l'urne s'est, a priori, obstinée à lui accorder. Que l'Occident retienne bien la leçon, la Russie et la Chine soutiennent le président sortant. Les deux géants savent de quoi ils parlent, ils ont eu à faire les frais d'interférences étrangères dans ce qu'ils appellent leurs «affaires internes». Que l'actuel régime iranien en soit préservé, l'interventionnisme sous la bannière des droits de l'homme ou des crises humanitaires, Moscou et Pékin connaissent le refrain par cœur. A chacun son Tibet et à chacun son Kasparov. Mais il y a bien eu répression et mort de sept hommes dans les rangs des partisans de Mossavi ? Il n'y a pas de répression propre et comme les guerres, elles sont toutes sales. De façade soit-elle, l'unité iranienne vaut plus que tous les martyrs. Parce que le pouvoir ne peut pas s'en passer pour continuer de se maintenir sur le trône ou parce qu'elle aide à faire tourner les centrifugeuses d'uranium à plein régime ? Les mollahs se tiennent à évoquer que leur second défi, l'ambition nucléaire doit être celle de tous les Iraniens, réformistes y compris. Sans cela, les Occidentaux trouveraient mille et une façons de réduire en cendres les visées hégémoniques de la vieille Perse. Si elle veut redevenir une puissance régionale, «rivale» du Pakistan ou de l'Inde, pour simple exemple, elle peut compter sur les amabilités stratégiques du Kremlin. Car un congrès américain qui vient d'accorder 100 milliards de dollars de rallonge aux guerres préventives d'Irak et d'Afghanistan signifie prolongement de la présence de l'Otan à la frontière russe. Mais Dimitri Medvedev peut se consoler, la décision d'installer le bouclier antimissiles US en Europe n'est pas définitive. Manœuvres américaines ou sagesse du président Obama, la Russie et la Chine n'ont aucune intention de jeter leur allié iranien dans la fosse aux lions. Mieux encore, elles persistent et signent d'un sceau commun: l'affaire du nucléaire iranien doit être réglée par des voies politiques. Devant l'Onu, veto en main. Et non pas par la force du déséquilibre démocratique ou de la Force One. A moins que l'on doute des analyses du Mossad qui estime que l'Iran aura sa bombe dans cinq ans. D'ici là, tout le monde aura le temps de réfléchir à cinq fois.