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Les Neuf Vies d'Al-Qaida ou les questions que l'on se pose sur la mouvance de Ben Laden
Publié dans Le Temps d'Algérie le 13 - 10 - 2009

Professeur associé à Science Po Paris, professeur invité à la prestigieuse université de Georgetown (Washington), Jean-Pierre Filiu est l'un des meilleurs analystes français du monde arabe et musulman.
Auteur de nombreux ouvrages dont Les frontières du djihad et L'Apocalypse dans l'islam (Fayard), il vient de publier, chez le même éditeur, Les Neuf Vies d'Al-Qaida. Une radioscopie très poussée de l'organisation djihadiste internationale. Remarquablement datée et documentée, cet éclairage répond aux interrogations suscitées par l'univers cloisonné d'Al Qaïda. Le Temps d'Algérie l'a lu pour ses lecteurs.
-Du berceau afghan au «djihadisme international», le parcours d'Al Qaïda se décline en plusieurs étapes. Jean-Pierre Filiu y voit la succession de «Neuf Vies». Lesquelles ?
La première vie, celle du «grand œuvre», va de 1988 à 1991. C'est la séquence inaugurale du «djihad global». Alliés en Afghanistan à l'épreuve du combat contre l'Armée rouge, deux hommes, le Saoudien Ben Laden et l'Egyptien Zawahiri, cherchent à capitaliser le «djihad afghan» et en faire un «djihad global» au service de la restauration de la «puissance de l'islam».
La seconde (1991-96) dure le temps de l'«exil soudanais» de Ben Laden. Marquée par les attentas anti-américains de Nairobi et de Dar Essalam, la troisième (1996-98) résonne comme celle des «défis à l'Amérique». La quatrième, celle du «Djihadistan afghan», va de 1998 à 2001.
La cinquième verra l'«effondrement du sanctuaire» (2001-2003) sous les effets de la guerre de Bush. La sixième vie, «la campagne d'Arabie», recoupe la campagne d'attentats contre le royaume wahhabite (2003-2004). S'ensuit «le sang de l'Irak»(2004-2006), le «Califat des ombres» (2006-2007) et la période de la «fuite en avant» (2007-2009).
Al Qaïda court-elle à sa perte ? Depuis deux ans, livres et analyses prospectives parient sur l'éclipse lente mais irréversible de l'organisation.
«Rien n'est pourtant joué et la plus grande prudence s'impose dans la prospective. Al Qaïda a prouvé, tout au long de ses vingt années d'existence, sa redoutable faculté d'adaptation, de transformation et de récupération.» L'organisation «est menacée de se dissoudre dans les limbes de l'islam, minée qu'elle est par son impuissance à peser sur le cours des évènements.
Mais elle peut aussi éclater en une constellation incontrôlable de cellules terroristes à l'autonomie destructrice». Le mouvement mise sur l'accentuation des désordres du monde et un pourrissement des crises qui affectent la planète. «Un conflit majeur offre toujours au djihad global la capacité de relancer sa mobilisation.»
A quel moment Al Qaïda devient l'instrument du «djihad global» voulu par Ben Laden et Zawahiri ?
Son irruption sur la scène internationale «remonte véritablement à 1998» dix ans après l'allégeance à Ben Laden. Cette internationalisation se traduit par ''la déclaration de djihad global contre «les juifs et les Croisés», puis les attentats contre les ambassades des Etats-Unis au Kenya et en Tanzanie». Ces opérations, ajoutées aux attentats de New-York, confèrent au Saoudien une «stature extraordinaire».
La guerre américaine «contre la terreur» place son organisation au centre de l'actualité mondiale. «La dramatisation de la confrontation entre la superpuissance américaine et un homme, traqué dans l'un des pays les plus pauvres du monde, soulève des vagues d'émotion et d'attente. Al Qaïda martèle que l'Occident ne comprend que la force, que les négociations sont vaines et que seule la violence peut restaurer les droits spoliés. Cet acte de foi d'une brutale simplicité se fraie un chemin dans les opinions les moins bien disposées envers l'arbitraire terroriste.»
Quels sont les atouts de l'organisation ?
Son «extraordinaire force» repose sur son caractère secret et élitiste». L'organisation «continue d'être extrêmement exigeante dans ses procédures de sélection individuelle ou d'adoubement collectif, ce qui préserve la cohérence du groupe et de son action.
Ces procédures tatillonnes de filtrage des vocations et de discipline militante rendent le djihad global très difficilement pénétrable par les infiltrations diverses. Au moindre doute, l'élément suspect est discrètement éliminé. Les vulnérabilités (de l'organisation) se situent dans son environnement tribal et local, elles n'émergent pas de la ‘'base'' elle-même, quels que soient les vifs débats sur telle ou telle orientation. Tant que la direction charismatique de Ben Laden et de Zawahiri est en place, le pari sur des défections au sommet d'Al Qaïda est une impasse».
Entre structures d'encadrement et cellules de base, à combien s'élèvent les effectifs du mouvement ?
En l'automne 2001, au plus fort des attaques contre New York et de Washington, elle s'appuyait sur un millier de membres. Depuis, les rangs du djihad global n'ont pas beaucoup gagné en ressources humaines. «Les estimations, qui sont à prendre avec les plus grandes précautions, évaluent les effectifs d'Al Qaïda central (l'entité historique, ndlr) à quelques centaines de membres».
A l'heure actuelle, l'organisation «ne dépasse pas les 2000 membres. Soit, à titre de comparaison, à peine plus d'un musulman sur un million». Cette estimation recoupe à la fois la structure mère, la branche irakienne, Al Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), les militants saoudo-yéménites et les cellules dispersées un peu partout dans le monde. L'organisation a tiré le plus grand profit de la mondialisation des échanges humains afin d'amalgamer dans sa matrice des militants d'horizons très divers.
Si le médium est le message, alors le message d'Al-Qaïda réside dans l'internet, sa troublante immédiateté et son ubiquité trompeuse. Ces performances virtuelles reposent sur une organisation solide et éprouvée, apte à renouveler ses cadres ou à explorer des «marchés émergents».
Ben Laden et ses principaux lieutenants ont-ils trouvé un écho dans le monde arabo-musulman ?
Tout au long de ses «Neuf Vies», Al Qaïda a misé sur «les amalgames et les confusions pour amplifier son influence et son impact». Première organisation terroriste à vocation planétaire, «elle n'a pu promouvoir ce projet international qu'à la faveur d'un détournement sans précédent des valeurs de l'islam. C'est pourquoi le jihad global s'est heurté depuis l'origine à une résistance opiniâtre dans le monde musulman, et il s'est vengé en y infligeant le plus clair de sa violence». Au fil de son parcours, l'organisation fait face à un «rejet» et un «isolement» de grande ampleur.
Comment et dans quelles circonstances se fait la transformation du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) en mouvement Al Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) ?
Les coups reçus sur le front irakien - liquidation de Zerkaoui et échec d'Al Qaïda à gagner l'adhésion massive des sunnites – et la situation en Algérie produisent leur effets sur cette évolution. Les «déprimantes nouvelles d'Irak encouragent»
Al Qaïda central à répondre favorablement aux sollicitations du GSPC. Abdelmalek Droukal tient à formaliser son intégration dans le jihad global afin de s'abstraire des tentations délétères du milieu local, qu'il s'agisse des rivalités avec les autres factions islamistes ou bien des offres gouvernementales de repentance. En misant sur Al-Qaïda, l'émir du GSPC change de registre et redonne des perspectives à son action armée, bien au-delà des brigandages militants de Kabylie et du Sahara (…)
Droukal accompagne sa collaboration opérationnelle d'un recours de plus en plus appuyé à la rhétorique globale dans sa propagande, même si les «Croisés» vilipendés par le GSPC sont français et espagnols plutôt qu'américains. Ben Laden et Zawahiri sont tentés par l'offre de service de Droukal, mais, une fois la décision de doter Al Qaïda d'une branche maghrébine, il leur faut arbitrer avec les autres factions candidates à en assumer la responsabilité.
Comment se présente le paysage maghrébin d'Al Qaïda ?
Postérieurement au «djihad afghan» contre l'Armée rouge, trois «groupes islamiques combattants» sont nés à l'ombre d'Al Qaïda et à partir de «vétérans» d'Afghanistan de trois nationalités maghrébines.
Le Groupe islamique combattant libyen (GICL) «est de loin le mieux intégré» à la hiérarchie d'Al-Qaïda. «Il lui a fourni un chef militaire (Abou Faraj Al Libi) et des cadres de haut rang, dont Abou leith al-Libi et Abou Yahya Al Libi, mais le GICL a perdu ses maquis de 1995-1996 en Cyrénaïque et il n'existe plus que dans la diaspora djihadiste.
Ce déracinement durable affecte aussi le Groupe islamique combattant tunisien (GICT) qui a offert à Ben Laden les deux assassins de Massoud, ainsi que le Groupe islamique combattant marocain, dont un des fondateurs, Karim Mejjati, est tombé aux côtés de la branche saoudienne d'Al Qaïda».
Dans l'arbitrage aux fins de sous-traitance avec les différentes organisations du djihadisme maghrébin, «Al Qaïda central» a penché pour le GSPC. Le mouvement de Ben Laden «est très intéressé par les perspectives transfrontières ouvertes par la branche saharienne du GSPC, qui nomadise à partir du Sud algérien dans les cinq pays voisins, la Mauritanie, le Mali, le Niger, la Tunisie et la Libye. Un tel réseau est inestimable pour le jihad global».
En choisissant le cinquième anniversaire du 11 septembre en 2006 pour annoncer – par la voix de Zawahiri – l'intégration du GSPC dans ses rangs sur, Al Qaïda vise un objectif de marketing djihadiste. Trois mois après la liquidation de Zerkaoui en Irak et un mois après le démantèlement «transatlantique» de Londres, l'organisation «entend démontrer la capacité de nuisance» du jihad global en Afrique du Nord.
La succession d'attentats en Algérie entre l'hiver 2006 et l'hiver 2007 n'échappe pas à la médiatisation sur le web djihadiste. «Pour Al Qaïda, cette percée terroriste en Méditerranée occidentale permet d'amortir médiatiquement la crise de la branche irakienne de l'organisation. Mais la scène nord-africaine reste périphérique, car Ben Laden et Zawahiri souhaitent surtout prendre pied sur le théâtre de la confrontation avec Israël.»
La politique américaine à l'égard du monde arabe et musulman a constamment été – surtout depuis les attentats du 11 septembre 2001 – au centre du discours de Ben Laden et de Zawahiri. Comment l'organisation a réagi au changement à la tête de l'exécutif américain ?
Ben Laden et Zawahiri n'ont jamais cru à la perspective d'un retour des démocrates. «Prisonniers de leurs œillères idéologiques, ils n'avaient jamais pris au sérieux la possibilité qu'un Noir, de surcroît démocrate et opposant de la première heure à la campagne d'Irak, accède à la Maison-Blanche.» De leur point de vue, John McCain était le mieux indiqué pour succéder à George W. Bush.
Le vétéran de la guerre du Vietnam «ne pouvait, à leurs yeux, qu'ajouter la guerre à la guerre, dans une escalade sans fin dont Al Qaïda se préparait à tirer de substantiels bénéfices». «L'organisation s'était persuadée du caractère inéluctable de la victoire républicaine, car seule une relance brutale de la «guerre globale contre la terreur» déclarée par l'administration Bush était en mesure de sortir Ben Laden et son organisation de leur impasse stratégique (…)
Le triomphe de Barack Hussein Obama a pris de court la hiérarchie d'Al Qaïda, en sapant les évidences de sa propagande (…) avant même que le champion démocrate ne soit investi, Ben Laden l'accuse de tous les maux de l'islam et Al-Qaïda s'emploie à lui attribuer la responsabilité de l'offensive israélienne sur Gaza» fin décembre 2008.


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