Le fantasque Rolland Courbis revient sur les péripéties de son parcours avec l'USM Alger, un club avec lequel il a remporté la coupe d'Algérie et la coupe de l'UAFA. Le Temps d'Algérie : Comment qualifiez-vous votre première expérience en Algérie ? Rolland Courbis : Avec mes 30 ans de carrière, je peux dire que c'est l'expérience la plus épuisante que j'ai vécue en tant qu'entraîneur. Je suis à bout de souffle. Qu'est-ce qui vous a le plus contrarié ? Beaucoup de choses, surtout le calendrier qui nous a été imposé par la ligue. Avec un tel calendrier, Mourinho ne tiendrait pas 48 heures en Algérie. Pourtant, moi je l'ai fait et je me demande d'ailleurs comment j'ai pu tenir le coup durant les six mois et demi que j'ai passés ici. Vous vous êtes plaint tout le temps de l'accumulation des matches. Mais cela était prévisible dans la mesure où l'USMA était engagée sur quatre fronts… D'abord, ce n'est pas moi qui ai demandé de jouer toutes ces compétitions. Quand je suis venu à l'USMA, j'ai pris le train en marche. Il n'empêche que notre équipe a été soumise à un calendrier démentiel. La ligue ne nous a pas du tout ménagés. Je n'ai pas trouvé à ce jour de réponse à certaines questions. Par exemple je n'arrive toujours pas à comprendre comment on a pu nous obliger à disputer la finale de la coupe d'Algérie ainsi que certains matches de championnats entre deux finales en aller et retour de la coupe arabe et un long déplacement au Gabon pour le compte de la coupe de la CAF. C'est vraiment pénalisant pour un club censé représenter l'Algérie sur la scène internationale. Mais l'USMA possède quand même un riche effectif qui est censé lui permettre de faire face à ce genre d'impondérable. Vous n'êtes pas de cet avis ? Ça c'est vous qui le dites. Quand je suis venu à l'USMA j'ai hérité d'un effectif complètement déséquilibré. J'ai trouvé par exemple cinq défenseurs centraux pour seulement deux postes. En janvier je me suis retrouvé avec neuf attaquants, alors que je ne disposais pas de réelles doublures pour d'autres postes. A chaque fois, il fallait gérer les humeurs des joueurs qui étaient remplaçants ou qui ne figuraient pas dans la feuille de match. Parfois, ça me rendait dingue. Pourquoi alors avoir accepté le recrutement durant la trêve hivernale de Ziaya et de Hanifi qui sont deux attaquants ? Malgré la présence de neuf attaquants il y avait un réel problème d'efficacité devant. On m'a alors dit qu'on allait me ramener deux baroudeurs, deux vrais buteurs. Il s'agissait de Ziaya et de Hanifi que je ne connaissais pas. Finalement ce fut un mauvais calcul, ces deux joueurs ne répondant pas à mes attentes. Je me suis retrouvé en fin de saison à faire confiance à Noureddine (Daham) qui, malgré ses 36 ans, est toujours opérationnel et continue à se battre. Mais vous avez quand même fini la saison avec deux titres, la coupe d'Algérie et la coupe arabe. Lequel vous a-t-il le plus marqué ? Sans hésiter, je dirai la coupe d'Algérie, parce que nous avons vraiment galéré pour gagner ce trophée à travers un tirage au sort défavorable. Nous avons sué pour arracher la qualification sur des terrains difficiles à jouer comme celui de la Saoura, d'Oran voire de Sig où un problème interne survenu la veille du match a failli se répercuter sur le rendement de l'équipe ce jour-là. Il ne faut pas oublier que nous avons sorti un gros morceau qui est l'USMH dans les huitièmes de finale. Je garde aussi en mémoire la prestation héroïque de mon équipe à Bologhine face au NAHD où, malgré notre infériorité numérique durant toute la deuxième mi-temps, nous avons réussi à assurer. Enfin, la finale gagnée face au Mouloudia d'Alger qui jouait pourtant sur son terrain, était pour moi le moment fort de la saison. Il y a de quoi, puisque vous avez réussi enfin à mettre un terme à l'hégémonie du Mouloudia dans ses finales face à l'USMA. Quand j'ai lu dans les journaux les déclarations du camp adverse, je me suis dit que ce n'était pas la peine d'aller la jouer cette finale. Quelqu'un du club a même dit que même Liverpool ne réussirait pas à battre le Mouloudia au 5-Juillet. Malgré ces provocations, nous sommes restés lucides. Nous avons préféré rendre notre réponse sur le terrain. Zemmamouche a été décisif durant cette finale… Pas uniquement dans cette finale mais dans tous les matches importants de la saison. Je dirai même que sans lui, il n'y aurait pas eu l'ombre d'un trophée cette saison à l'USMA. D'ailleurs, c'est le meilleur gardien que j'ai entraîné durant toute ma carrière. Vous vous montrez vraiment élogieux envers votre gardien de but. Que lui trouvez-vous de particulier ? Zemmamouche est un très grand gardien. Il a le même don qu'un redoutable attaquant dans la surface de réparation, c'est-à-dire il sent la balle, sauf que lui, c'est dans le sens inverse. Il sait anticiper le tir et il va toujours dans la même trajectoire que le ballon. Je n'ai jamais vu un gardien qui joue sur sa ligne comme le fait Zemma. Et dire que quand je suis venu à l'USMA, il n'était pas titulaire ! Avez-vous des regrets par rapport au championnat ? Oui, bien sûr. Je ne suis pas venu à l'USMA pour finir cinquième en championnat. S'il n'y avait pas eu cette accumulation de matches à un rythme infernal, on aurait visé la deuxième place durant ce dernier match contre le CRB. Y a-t-il eu une possibilité de jouer le titre ? Quand j'ai pris en main l'équipe, l'USMA comptait déjà trois défaites et un nul à domicile en sept journées seulement. J'ai trouvé une équipe complètement désarçonnée. Le titre semblait déjà perdu. L'USMA avait perdu à cette période-là beaucoup de jokers pour pouvoir jouer à fond cette première place. Parlons à présent de votre avenir à l'USMA. Comptez-vous continuer votre aventure avec ce club ? Je ne sais pas encore. Il faudra que je discute d'abord avec les frères Haddad. Votre maintien dans ce club dépendra de quoi au juste ? De beaucoup de choses. Je ne suis pas prêt à revivre l'expérience de ces six mois et demi passés à l'USMA. Comme vous le savez j'ai aussi des engagements professionnels avec RMC et BFM TV. Je dois renégocier avec les trois parties pour trouver une harmonie dans mon travail. si vous continuez avec l'USMA, allez-vous opérer des changements au sein de votre effectif ? C'est une nécessité. Déjà six à sept joueurs doivent partir. Il sera question de promouvoir cinq joueurs des U20. Côté recrutement, il ne faudra pas faire des folies cette fois-ci. On a déjà recruté Andria qui est un attaquant d'un très grand niveau. Il faut juste lui trouver quelqu'un de complémentaire. Enfin, je pense que le club a aussi besoin des services d'un milieu offensif. Il y a aussi quelque chose que je voudrais ajouter. Allez-y C'est à propos du public de l'USMA que je trouve merveilleux. Mais comme dans tout public il y a des brebis galeuses, des gens qui ne sont là que pour détruire. Ce sont eux qui sont allés jusqu'à insulter ma mère et mon père. Je suis prêt à accepter n'importe quelle critique, voire des injures. Je me dis que cela fait partie des risques du métier. Mais qu'on m'attaque en s'en prenant à mes parents, non. Je ne peux le tolérer.