Le voyageur qui traverse les contrées des Hauts-Plateaux du sud profond ou des collines verdoyantes du nord, aura toujours l´oeil séduit par une construction blanche au dôme arrondi ou au toit de tuiles rouges perchée au sommet d´une colline, ou au bord d´un ravin profond aux allures de précipice. Près de la porte de l´humble édifice, un arbre centenaire qui peut être un olivier, un caroubier, un mûrier ou un noyer, c´est selon, dispense une ombre hospitalière au randonneur harassé. Ces maisonnettes, qu´elles soient de simples «qouba» blanchies à la chaux ou d´imposantes maisons, sont les dernières demeures de saints vénérés dans la région: elles abritent toutes une tombe énigmatique qui comporte à «sa tête» un récipient rempli d´eau et de cire fondue, relique de bougies. Les hommes ont eu toujours besoin de poser ici et là des témoignages de leur foi envers Dieu et de reconnaissance envers des hommes qui ont mené une vie exemplaire. Les puristes de l´Islam s´inspirant de la doctrine orthodoxe ont toujours essayé de lutter contre le culte des marabouts, voyant en cela une hérésie, une déviation. Peine perdue! Les marabouts auxquels des populations éprouvées ont décidé de rendre hommage, sont en général des saints qui, non seulement ont, de leur vivant propagé la sainte parole, éduqué des générations de talebs ou même une vie exemplaire de sages ou d´ermites ascètes. La plupart ont, dans des régions perpétuellement déchirées par des luttes tribales, contribué à apaiser les coeurs et à conclure des trêves durables aux combats fratricides. Certains mêmes se sont illustrés dans la lutte contre l´occupation française. A leur mort, les populations reconnaissantes leur consacrent un mausolée qui deviendra un lieu de convergence circonstanciel de visiteurs, de pèlerins, qui viennent demander au Saint d´intercéder pour eux auprès du Créateur. Ainsi, les marabouts vont remplir une fonction sociale importante: ils deviennent un centre de rayonnement culturel et social où vont s´exprimer les solidarités de groupe. Ainsi, chaque marabout peut abriter une association qui, animée par une confrérie ayant à sa tête un imam et des Khouni qui vont assurer les activités rituelles liées à la religion, comme ils organisent des quêtes qui vont servir, soit à assurer des repas gratuits aux indigents soit à soulager la misère des autres. Certains marabouts servent de refuge aux veuves, célibataires ou handicapés qui viennent y trouver une main secourable. Des vertus particulières sont attribuées à certains : comme par exemple le pouvoir de ramener chez lui un émigré. On a vu souvent des épouses éplorées demander à leurs enfants d´appeler leur papa par la fenêtre nord...Le marabout sert aussi de lieu de retrouvailles aux populations lors des fêtes annuelles de l´Achoura, comme il peut servir de lieu de règlement de différends entre voisins. Malheur à celui qui rompt le serment prononcé dans l´enceinte sacrée : le parjure est voué aux pires malheurs! Berbère TV vient de s´illustrer en diffusant une série de reportages sur les marabouts de la Kabylie. Après une édifiante visite à Cheikh Mohand Ouel Hocine, elle vous invite à consulter un jeune et sympathique imam qui anime le somptueux marabout de Sidi-Belloua.