«On ne tire pas sur une ambulance». L´auteur de cette fameuse réplique ne peut être que quelqu´un qui a du talent et beaucoup d´éthique. C´est à coup sûr cette réplique qui restera dans la mémoire des lecteurs. Il faut avoir une certaine rectitude morale pour garder toujours le cap dans un milieu où tous les coups sont permis et où les retournements de veste font un bruit insupportable à chaque changement de gouvernement ou de majorité. Toute l´histoire nous livre ce mois une série de portraits de femmes qui ont marqué de leur empreinte le XXe siècle, un siècle qui a vu dans sa deuxième moitié une promotion des femmes dans les pays du nord, c´est-à-dire les pays industrialisés d´Europe et d´Amérique du Nord. Dans tous les domaines, les sciences, les arts ou la politique, les femmes ont conquis difficilement leurs droits et la place qu´elles méritent à la faveur des bouleversements qui ont secoué le siècle comme les guerres ou les progrès scientifiques. De Marie Curie à Benazir Bhutto, les femmes se sont illustrées par leurs qualités dans chaque tâche qu´elles ont entreprise. Le portrait de la semaine est consacré à une fille de réfugié turc : Françoise Giroud (de son vrai nom Gordji). Née en Suisse, elle dut après la mort de son père, apprendre le métier de dactylographe pour gagner sa vie. Elle fut engagée par un libraire qui l´employa à rédiger son courrier et gérer sa librairie. «Heureusement que j´ai travaillé chez un libraire et non chez un marchand de vins», a-t-elle déclaré en souriant, car elle avait lu plus de 500 livres que contenait la boutique. Remarquée par le cinéaste français, Marc Allégret, elle changea de filière et devint script-girl, puis assistante-réalisatrice auprès de grands cinéastes comme Renoir, Dassin...Elle se mit à écrire scénarios et dialogues. Puis elle quitta le cinéma où les issues étaient bloquées: depuis Alice Guy, aucune femme ne pouvait prétendre à la réalisation. Il faudra attendre la nouvelle vague pour que des réalisatrices comme Agnès Varda ou Nelly Kaplan puissent s´exprimer. Elle fut appelée pour collaborer à Elle, hebdomadaire féminin dirigé par Hélène Lazareff, épouse du directeur de France-Soir. Elle dirigea seule huit mois durant la revue. En 1953, elle fonda avec Jean-Jacques Servan Schreiber, l´hebdomadaire L´Express dont la ligne éditoriale militait pour la décolonisation. Appelés sous les drapeaux J. J. S. S. lui laissa les commandes du journal. Elle s´en tira merveilleusement grâce à ses qualités humaines, son talent et le respect qu´elle avait pour la déontologie. Elle devint sous Giscard d´Estaing, en 1974, Secrétaire d´Etat à la condition féminine où elle travaille à la libération de la femme française. Attaquée de toutes parts, elle démissionna et se mit à écrire des livres (La comédie du pouvoir) qui furent des best-sellers. Elle mourut en 2003, après avoir écrit un éditorial pour le Nouvel Observateur.