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«Le texte est la faiblesse de notre théâtre»
SLIMANE BENAISSA À L'EXPRESSION
Publié dans L'Expression le 14 - 06 - 2011

Dans cette interview, le grand acteur, auteur et metteur en scène, Slimane Benaïssa, établit son diagnostic sur la situation que vit le théâtre algérien, les obstacles qui freinent sa promotion tel le manque de formation, de textes et autres aspects techniques ainsi que le phénomène du public qui déserte les salles de théâtre...
L´Expression: Quel regard porte M.Benaïssa sur le Théâtre algérien de 2011?
Slimane Benaïssa: Il faut d´abord, que certaines conditions soient réunies pour en parler. Il s´agit de la qualité humaine, l´aspect technique du théâtre et le texte. Ce dernier constitue la faiblesse fondamentale du théâtre algérien. Paradoxalement, on est face à une génération qui est beaucoup plus arabisée que celles des années 1970. A l´université, on a accès à l´arabe classique, mais on n´apprend pas forcément à écrire en arabe populaire qui n´est pas accessible à l´arabisant. Quand on cherche à toucher la grande majorité des Algériens, on ne peut pas faire un théâtre autre que populaire. Pour écrire en arabe dialectal, il faut avoir de la culture populaire. Moi, je ne l´ai pas apprise à l´école française ni dans la «médersa». C´est grâce à mon père que j´ai appris la vraie poésie populaire. On a une génération d´arabisants qui sont très sensibles à l´écoute de cet arabe dialectal. Mais ils ne sont pas forcément créateurs. Sur le plan technique, il y a des théâtres qui sont magnifiques. Ces dix dernières années, on a rééquipé quelques théâtres tel le Sierra Maestra, le théâtre de Bougie et de Tizi. Une infrastructure formidable existe. Il suffit de former quelques techniciens. Le problème se pose également, sur le plan des acteurs. On a recruté une population pour les feuilletons de la télévision. Des jeunes, beaux, dynamiques, pleins de qualités. Mais, leur mission s´est achevée avec la fin du rôle qui leur a été attribué. Il faudrait former tous ces jeunes pour en faire de véritables acteurs. L´encadrement reste, malheureusement, insuffisant. Les acteurs de ma génération tels Omar Guendouz, Agoumi, Dalila Hlillou, Ayad et autres, constituent le noyau, mais insuffisant pour encadrer les jeunes.
A quel point la langue peut-elle être aussi importante dans un texte théâtral?
Le théâtre est une tragédie liée au temps et au lieu. Elle ne peut être transmise que dans la langue du vécu. Les feuilletons égyptiens étaient regardés par tous les pays arabes. Ils ont acquis un public énorme, et pourtant, ils ont été joués dans un arabe qui n´est pas parlé par tous les Arabes. J´ai traduit «Djeddi» en français. C´était plus ou moins une réussite. Mais, j´avoue que c´était très compliqué. C´est encore très difficile de la traduire en langue arabe classique. Quand on prend le berbère, qu´ils soient mozabites, chaouis, touareg ou ailleurs, ces derniers relèvent de la même culture populaire. La différence existe sur le plan de la lexicologie, mais elle est identique sur le plan de la syntaxe.
Y a-t-il un manque d´acteurs en Algérie?
Pour doter chaque théâtre régional ou national de dix acteurs professionnels, il nous faudra 500 acteurs professionnels. Où sont-ils? Dans le théâtre professionnel, il faut au moins 50 acteurs pour chaque théâtre. Or, avec tout le personnel que nous avons, nous n´atteindrons pas ce chiffre. Cela prouve qu´on souffre d´un manque flagrant d´acteurs. Je ne dis pas qu´il n´y a pas d´acteurs en Algérie. Je précise qu´il y a insuffisance au niveau du nombre pour faire face à la demande. Sinon, ça serait mentir, en disant qu´il n´y a pas d´acteurs en Algérie. J´ai fait monter mes pièces avec des acteurs algériens. Ils étaient très intéressants.
Donc, la formation reste le défi majeur pour le théâtre algérien...
Exactement. Pas uniquement au niveau des acteurs. Moi je vais créer des ateliers d´écriture théâtrale avec le théâtre de Tizi Ouzou. Je l´ai fait à travers le monde. Il suffit de regrouper une dizaine de jeunes auteurs qui viennent avec leurs propres oeuvres. Le staff fera une lecture critique de leurs oeuvres. Une fois, qu´on a avancé dans la critique technique du texte théâtral, au bout de 15 jours, les jeunes partent avec des textes nettement améliorés. On peut leur donner des idées pour développer leurs textes afin de les reprendre et les réécrire. Je suis, également, prêt à créer un atelier d´acteurs. Sur le plan de la formation, beaucoup de choses restent à faire.
Ne faut-il pas élaborer un statut pour l´artiste afin d´espérer changer un peu la donne?
J´ai profondément travaillé sur le statut de l´artiste en 1967, quand j´étais directeur du Théâtre régional de Annaba. J´ai fait le même boulot quand j´étais directeur du théâtre au ministère de la Culture. Mais, il n´y a rien eu de concret depuis. Le président Chadli Bendjedid nous a remis des diplômes, alors que Khalida Toumi a remis, à deux reprises, 50 millions à chaque artiste, une somme que je n´ai pas touchée à l´occasion. Certains artistes ont été, même, envoyés en pèlerinage. Mais, la situation de l´artiste n´existe toujours pas. Aujourd´hui, au point où nous en sommes, on est en train de revisiter la Constitution. Alors, revoyons la Constitution d´une manière correcte et après, appliquons ce qui en découlera. Regrouper les artistes pour leur promettre un statut est une excellente chose. Pourvu que cela ne reste pas au niveau de la promesse.
Plusieurs pièces théâtrales sont jouées dans des salles quasiment vides. Cette situation est-elle due à l´absence de culture théâtrale chez le public ou bien à la mauvaise qualité des pièces présentées?
Mon expérience à travers le monde m´a appris que l´acte théâtral est un rendez-vous. Entre un auteur et un acteur, il y a le public. Si une partie manque au rendez-vous, c´est que les choses ne vont pas bien. C´est aussi simple que ça.
Qu´est-ce qui ne va pas bien justement?
C´est ce qui se passe sur la scène. C´est moi l´acteur qui invite le public. S´il ne vient pas, le problème réside en moi, en tant qu´hôte. On ne remet jamais en cause le public. Celles ou ceux qui agissent de telle façon, doivent comprendre que le défaut est dans leurs oeuvres. Il n´y a aucun droit, ni intellectuel, ni moral, ni scientifique, ni savoir pour endosser la responsabilité au public. Celui-ci a ses besoins culturels, même s´il ne les exprime pas. Nous, en tant qu´acteurs ou auteurs, nous exprimons justement, ce besoin culturel. C´est comme un médecin qui traite un problème d´estomac pour un patient souffrant d´insuffisance rénale. Le patient n´y remettra plus les pieds. Le même principe s´applique au théâtre. Si le public remplit les salles, c´est qu´il exprime un besoin culturel. Il vit une tragédie. L´auteur est celui qui situe bien cette tragédie. C´est à l´auteur d´aller vers le public pour lui exprimer cette tragédie, pas à la façon du maître à son élève, mais plutôt d´une façon qui échappe au public. C´est notre métier. Un poète, qui ne trouve pas la bonne formule pour exprimer ce que le public ressent, est un mauvais poète. Notre responsabilité est de cerner les problèmes et de répondre aux besoins culturels en le disant d´une manière à ce que ce même public reconnaîsse son incompétence à l´exprimer. C´est à ce moment-là qu´on réussit un acte culturel qui attirera le public.
Il y a tout de même un public très exigeant...
Le théâtre est un métier passionnant, mais très exigeant. Partout dans le monde, il y a de l´exigence. Le public n´est pas le même et la fonction du théâtre n´est pas une. Il faut sortir de la culture socialiste qui a pour tendance d´éduquer le public. Aujourd´hui, le public est aussi varié et divers dans ses besoins que la diversité culturelle elle-même. Chaque public a son humeur et il faut répondre à l´humeur de chaque public. Les théâtres nationaux ont pour mission d´élever le niveau du théâtre à travers la recherche profonde des textes. Les théâtres régionaux doivent faire dans le théâtre qui communique. Il faut savoir que le théâtre construit l´unité du pays, culturellement parlant. Nous construisons la démocratie. En écoutant un dialogue sur scène entre deux personnes antagonistes, nous apprenons aux gens à être démocrates, à apprendre à écouter et à supporter les autres.
Vous parlez de dialogue, or les passerelles de communication sont coupées entre votre génération et celle d´aujourd´hui. A quoi est due cette situation?
Il existe une flopée de jeunes acteurs. Je connais moi-même des jeunes qui ont des possibilités certaines à devenir de très grands acteurs de théâtre. Mais, ils ont besoin d´un encadrement. Qui va les encadrer? Tout acteur n´est pas formateur. Omar Guendouz, qui est un acteur talentueux que je considère comme l´un de nos plus grands acteurs, ne peut pas former, puisqu´il est acteur et nos pas formateur. Etre formateur en art est une spécialité. Moi, je peux former, car j´étais metteur en scène et je me suis formé à l´être.
Quels sont vos projets M.Benaïssa?
Sur le terrain, je continue ma tournée. Je vais, également, monter deux pièces avant la fin de l´année. J´ai envie, également, de revenir aux feuilletons historiques. J´ai écrit, une pièce sur Messali Hadj puisque je suis attaché à son personnage politique. Comme personnage historique, je me penche sur celui de Ahmed Bey. Il pose un problème à la colonisation, qui était assez intéressant, par opposition à celui de l´Emir Abdelkader. Sur un personnage religieux, je m´intéresse au soufisme, j´ai envie de faire quelque chose sur saint Augustin. En tout, j´ai dix pièces montées. Je les ai préparées dans le cadre du projet de la télévision. La réalisation de toutes ces oeuvres nécessite de l´argent. Aujourd´hui, la Télévision travaille à travers des boîtes privées. Elle crée des intermédiaires comme dans les fruits et légumes. On ne les maîtrise pas. J´étais obligé de créer ma propre boîte pour, au minimum, m´assurer de ne pas perdre et que le public ne perde pas aussi. Je suis devenu auteur, acteur et metteur en scène, en plus, gestionnaire et producteur de moi-même. Je tiens à rappeler que mon monologue est à l´affiche jusqu´à vendredi prochain à la salle Sierra Maestra à partir de 19h30.


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