Amor S., un jeune diplômé de vingt-cinq ans, prend quelques verres de trop, entre chez lui et s'en prend à sa maman. Jamais depuis sa déjà longue carrière, Maître Mohammed Djediat, l'avocat de Patrice Lumumba, n'a eu à défendre un sensible cas dramatique qui «carie» la gencive de la société. Ce flagrant délit qui laisse voir le souci de notre société grandir, concerne la famille. Amor S. un jeune diplômé de vingt-cinq ans prend quelques verres de trop, entre chez lui et s'en prend à sa maman. Le «gosse», dépourvu de cervelle et de vision du lendemain, tombe dans les bras pourtant croisés de l'article 267 (ordonnance n°75-47 du 17 juin 1975) qui dispose, en son contenu de l'alinéa «1» que «quiconque, volontairement, fait des blessures ou porte des coups à ses père ou mère légitimes, ou autres ascendants légitimes, est puni ainsi qu'il suit: 1°) de l'emprisonnement à temps de cinq à dix ans, si les blessures ou les coups n'ont occasionné aucune maladie ou incapacité totale de travail de l'espèce mentionnée à l'article 264...» Hadj Rabah Barik, le président de la section correctionnelle (détenus) soulève sa fine paire de lunettes reposantes et articule en fixant Amor, qui est courbé, tête baissée, yeux mi-clos, épaules tombantes et des mains moites, moites à la limite du dégoût à la seule vue des paumes qui perlent. Le remords? Les regrets? La trouille de revenir en taule? L'interdiction de séjour à Bou Ismaïl? Bou Ismaïl! cette sympathique localité du littoral qui est devenue la rencontre de mille délits, crimes et infractions, vient de voir le pire des délits honnis par Allah: Les parents battus par leurs rejetons. Et si Malek Drissi, le procureur a passé trois minutes à flétrir ces actes plus que sauvages dans leur exécution et leur aboutissement, Maître Djediat, l'avocat de l'inculpé s'est de suite félicité du...désistement de la maman qui était intervenue pour calmer le jeu et réclamer le pardon de la justice. Ce qui fera réagir le juge: «Hadja! on vous avait prévenue le jour de votre plainte que votre signature n'était pas aisée. Vous venez de vous désister? C'est votre droit! Mais ce monsieur assis à ma droite qui représente la société, lui, ne va pas pardonner...» «C'est vous, le juge...» coupe presque effrontément la victime. Barik comprend la réaction du «foie de la maman qui a allaité...» et fait comme si la vieille dame n'avait pas osé interrompre le tribunal. Pour revenir à la plaidoirie de l'avocat de Amar S. où l'émotion avait occupé une large place, soulignons tout de même que Maître Djediat a, lui aussi, flétri l'acte du «gamin» et avait pris presque un malin plaisir à s'adresser au détenu. «Regarde un peu ta face dans un miroir. Tu es blème, livide, presque mort!» Puis le défenseur entame sa phase de «lavage - graissage - freinage en direction du tribunal: «Monsieur le président, vous avez tous les dimanches des rôles pas possibles et plus de la moitié des affaires provient de Bou Ismaïl. Cette localité ne ressemble à nulle autre dans la région. Elle a des spécificités nées d'un tourisme qui est mort-né. Il n'y a d'autres lieux de loisirs que le méfait «ambulant». Les jeunes sont livrés à eux-mêmes. Amor a bu. Il a même beaucoup bu. Il a agressé, pas un citoyen dans la rue, ni attaqué une bijouterie. Non, il a fait pire. Il a agressé sa maman. Nous n'avons même pas envie de plaider les circonstances atténuantes, puisque sa maman lui a pardonné son condamnable geste. La balle est dans votre camp, surtout qu'il a passé onze jours de détention où il s'est aperçu que l'on ne peut s'en prendre à sa mère sans faire trembler le trône d'Allah, d'abord avant de goûter à l'incarcération, celle de la détention préventive», a articulé, l'air grave, Maître Djediat qui a dû attendre la fin du rôle avant de prendre connaissance du verdict qui a vu Barik jouer le bon samaritain à la veille de ces jours de fête pour infliger une année d'emprisonnement assortie du sursis. Signalons que la maman avait, au moment des faits, i-e toute en colère, fourni un certificat médical de...un jour!??? Ces débuts ont permis à l'avocat d'Alger de raser les vertus de l'amour de la famille, l'éloignement des jeunes des pratiques nocives pour l'unité de la famille et surtout le rôle éducatif de la justice et des juges.