Les 14 accusés qui devront répondre à la barre aux questions du juge et du procureur mais aussi à leurs 41 victimes Le tribunal criminel de Tizi Ouzou aura à traiter l'une des affaires les plus importantes de kidnapping. Un exemple parfait de la sauvagerie, de la barbarie et des coups tordus. Ce qu'il convient désormais d'appeler l'affaire Hand Slimana, l'entrepreneur de Tizi Ouzou, kidnappé puis assassiné froidement par une rafale d'un kalachnikov le 14 novembre 2010, sera rejugée le 22 octobre prochain, a-t-on appris hier de source judiciaires. Tizi Ouzou retient son souffle surtout que cette affaire s'annonce explosive dans la mesure où d'autres révélations seraient portées à la connaissance des juges et de l'opinion publique. Le tribunal criminel de Tizi Ouzou, aura fort à faire dans ce dossier de l'assassinat de l'entrepreneur Slimana et du rapt de son cousin Omar. Des zones d'ombres restent à clarifier et des questionnements nécessitent des réponses. Au village du défunt on s'interroge encore sur cette affaire qui n'a pas livré tous ses secrets. «Par quelle complicité dans un village de Kabylie où tout le monde se connaît, une bande de 14 assassins sème la terreur et agit sans qu'elle soit inquiétée? Comment se fait-il que personne n'a douté des activités de ces assassins qui ont, kidnappé, tué, pillé et commis un massacre à grande échelle sans que l'on s'en rende compte?» s'interroge-t-on. Ou encore «qui a livré Hand à ces assassins, qui les a mis au courant de son itinéraire de son agenda, des ses activités?». «Pourquoi de soi-disant ravisseurs appellent-ils encore Omar, le cousin de Hand, pour leur verser une rançon de 500 millions? Cela signifie-il que la tête de ce réseau court toujours ou cela obéit-il à d'autres desseins inavoués?». Des interrogations qui trouveront probablement leurs réponses ce 22 octobre. Depuis ces dernières années, ces sinistres individus ont semé la psychose, la mort et la désolation dans cette région en commettant des assassinats et des rapts. Ils ont vidé la Kabylie de sa sève puisque pas moins de 71 opérateurs économiques qui auraient pu créer des emplois et de la richesse ont quitté la région. «Non seulement, ils assassinent mais aussi ils affament la région» dénonce un citoyen de Tizi Ouzou. «Hand est mon plus cher ami, il a sacrifié sa vie pour apporter un plus à cette région d'Algérie, il a créé une entreprise et nourri des milliers de familles, il a toujours répondu présent pour venir en aide aux nécessiteux. Nous ne nous tairons pas, c'est la justice, seule la justice appliquée dans toute sa rigueur nous consolera», témoigne un entrepreneur ami très proche du défunt Hand. Le procès des 14 mis en cause devait se tenir en juin dernier mais a été reporté par le juge du tribunal à cause de l'absence de l'avocat d'un des accusés, à savoir, I. Sofiane qui n'est autre que celui qui a ouvert le feu, le 14 novembre 2010 sur Hand Slimana. 14 accusés à la barre Ce dernier tentait de résister à ses ravisseurs dans un faux barrage dressé au lieu-dit Bouhlalou, sur le tronçon routier reliant la ville d'Azazga à Aghribs, selon la version de son cousin Omar, kidnappé puis libéré. «Nous voulons que justice soit faite, que le sang de notre ami Hand ne soit pas versé vainement. Il faut donner une leçon de justice et de rigueur pour que cessent ces pratiques non seulement en Kabylie mais à l'échelle nationale. Ca suffit!», crie une autre entrepreneur qui a côtoyé Hand de très près. Les 14 accusés qui devront répondre à la barre non seulement aux questions du juge et du procureur mais aussi à leurs 41 victimes, 11 témoins et, à travers eux, à toute la population qu'ils ont terrorisée. Ils sont impliqués dans pas moins de 19 affaires criminelles dont 3 affaires de kidnapping. Selon l'arrêté de renvoi dont nous détenons un copie, ces accusés devront répondre d'au moins, 8 chefs d'inculpation dont constitution de groupe de malfaiteurs, homicide volontaire avec préméditation, enlèvement à l'effet de demande de rançon, vol qualifié avec utilisation d'armes à feu, commercialisation d'armes et munitions de guerre de la catégorie 4, port d'armes de guerre sans autorisation et blanchiment d'argent de provenance criminelle. Parmi les plus importantes affaires dans lesquelles sont impliqués les membres de ce groupe figure celle de l'enlèvement qui s'était soldé, pour la première fois depuis l'apparition de ce phénomène dans la région en 2005, par la mort de la victime. Il s'agit de Slimana Hand, 48 ans et père de 5 enfants, décédé après avoir passé 4 jours dans le coma dans une clinique à Tizi Ouzou. Des dizaines de milliers de citoyens ont assisté à l'enterrement de l'entrepreneur Hand Slimana. C'était un jour de deuil, de désolation, de colère mais de résistance et de dignité. Quand la gendarmerie de la commune de Fréha a pris l'affaire en main et a appréhendé les auteurs, c'était le début du dénouement. A l'arrestation des auteurs présumés de ce rapt, la stupeur a gagné les citoyens en Kabylie et particulièrement dans la commune d'Aghribs. Au moment où tout le monde pensait que les ravisseurs étaient affiliés à l'organisation Al-Qaïda Maghreb, l'enquête de la gendarmerie de Fréha a révélé que ce sont les enfants de la région, ceux-là même, dont il a employé les père et les frères! L'auteur du tir qui a tué Hand, à savoir I. Sofiane, 23 ans, et un de ses deux acolytes, T.Juba, sont d'un village de la commune d'Aghribs ainsi que I. Hacene et T. Boussad qui dirigeaient l'opération de loin. Les présumés cerveaux de l'opération, H. Sadek, A.Lyes, S.Djamel, A.Rabah,S. Hali et A.Mohammed sont de Fréha. B.Mohand, le propriétaire du logement où avait été retenu l'otage est de Mekla alors que S.Omar est de Bouhinoun, dans la commune de Tizi Ouzou et les deux vendeurs d'armes, B.Abderrazak et M.Antkan, de Tamanrasset. Un cerveau et un magistère L'un des cerveaux était étudiant du magistère en droit. Pis encore, il voulait devenir officier de police. Après son arrestation, H. Sadek, âgé de 33 ans au moment des faits, a été présenté comme le cerveau du groupe. Dans sa région natale, à Fréha, où il avait créé son agence immobilière, il était insoupçonnable. Il est diplômé en droit de rang magistère. Selon des sources locales, il voulait concourir au grade d'officier de police. Pour camoufler ses activités criminelles? En tout cas, c'est à ces dernières qu'il consacrait le gros de son temps depuis la constitution de ce groupe de malfaiteurs vers la fin de l'année 2009. C'est lui qui planifiait les opérations et qui avait loué, à Mekla, le logement où Omar avait été gardé en captivité. C'est également lui qui a dirigé l'opération qui a coûté la vie à Hand Slimana et qui négociait la rançon avec le frère de Omar Slimana. Aujourd'hui, à Aghribs, l'on s'interroge: H. Sadek était-il le cerveau du groupe ou avait-il des parrains qu'il n'a pas dénoncés. Le démantèlement de ce réseau de la terreur a été rendu possible suite à... un accident de la route. Le 2 janvier 2011, le téléphone de la gendarmerie de Fréha sonne. Au bout du fil, un anonyme signale un véhicule qui venait de percuter un poteau électrique à Timizart et que trois 3 personnes, dont une portait un sac noir suspect, qui pourrait contenir des armes, ont abandonné le véhicule sur place. Les gendarmes se rendent sur les lieux et découvrent que le véhicule appartenait à T.Boussad, qui venait de purger une peine de 7 ans à la prison d'Aflou. De fil en aiguille, 13 personnes sont arrêtées et une autre demeure en fuite. Le groupe a été l'auteur de 19 actions terroristes dont 4 attaques contre des camions de transport de boissons alcoolisées, 7 attaques contre des bars, deux faux barrages, 3 attaques contre des commerçants ainsi que 3 kidnappings, celui de Mehadi Nourdine, le 9 décembre 2010 à Yakourène, celui d'Ibarar Lounès, le 4 juillet 2010, puis celui de Hand et Omar Slimana le 14 novembre 2010. Tous ces actes ont été perpétrés par des individus encagoulés, portant des treillis paramilitaires, des tenues afghanes.
