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"Désormais, on ne peut plus se taire..."
MOURAD BEN CHEIKH, CINEASTE TUNISIEN, À L'EXPRESSION
Publié dans L'Expression le 04 - 12 - 2012

img src="http://www.lexpressiondz.com/img/article_medium/photos/P121204-09.jpg" alt=""Désormais, on ne peut plus se taire..."" /
Mourad Ben Cheikh, né le 29 janvier 1964 à Tunis, est un réalisateur tunisien. Il vit et exerce ses activités professionnelles en Tunisie et en Italie. Ayant étudié à l'Institut supérieur des beaux-arts de Tunis puis à l'Université de Bologne (Italie), il y obtient un diplôme universitaire en discipline des arts de la musique et du spectacle. En 2003, il réalise son premier court métrage, Le Pâtre des étoiles, pour lequel il obtient un prix aux Journées cinématographiques de Carthage (JCC). Il est l'auteurs de plusieurs documentaires et reportages télé. Dans cet entretien, il nous fait part de son analyse pertinente de la situation socio-politique en Tunisie, non sans évoquer avec nous la richesse du cinéma tunisien.
L'expression: Un mot sur votre présence ici aux JCC
Mourad Ben Cheikh: Pour la première fois depuis la session de 2004, je suis aux JCC comme un simple spectateur. J'ai effectivement réalisé comme vous dites un documentaire intitulé Plus jamais peur qui était en sélection officielle au Festival de Cannes en 2011.
D'après vous, la situation cinématographique en Tunisie s'est-elle améliorée ou au contraire détériorée? Eu égard à la programmation cette année, ça foisonne de petits films sur la révolution, cela dénote d'une certaine liberté de ton, non?
Ça foisonne de films sur la révolution et même des films qui ne concernent pas la révolution. Il faut savoir que la situation après le 14 janvier en Tunisie, a quelque part changé dans le sens où le mouvement qu'on a vu naître avant la révolution, celui de l'appropriation de moyens de productions beaucoup plus léger, beaucoup plus rapide, beaucoup plus libre, c'est une chose que le digital désormais permet de maîtriser. Ce mouvement qui avait commencé timidement avant la révolution s'est confirmé et a explosé avec et après la révolution. Il faut se dire que l'année dernière, au mois de février 2012, quand l'Arft (l'association de réalisateurs de films tunisiens) a voulu organiser les premières journées du cinéma tunisien qui devaient être une sorte de rétrospective des films de l'année, on a été étonné de voir qu'il y avait en terme de long métrage plus de 14 films, un chiffre jamais atteint par la production tunisienne même quand le soutien du ministère de la Culture était à son apogée. Il y avait confirmation déjà depuis quelques années d'une explosion de production de courts métrages qui a vu aussi après la révolution son nombre augmenter d'une manière exponentielle. Donc aussi bien au niveau de la quantité que des thématiques soulevé par les films, il y a je ne dirai pas un renouveau, mais une explosion et un foisonnement qu'on n'a jamais eu auparavant.
Donc vous confirmez qu'il y a plus de liberté d'expression aujourd'hui au niveau du cinéma tunisien?
Pas uniquement au niveau du cinéma tunisien, mais aussi au niveau de la société tunisienne et le cinéma n'est qu'une composante de cette société. Désormais, en Tunisie, on ne peut plus se taire devant l'injustice et ça, c'est devenu presque une évidence. Donc oui il y a plus de liberté d'expression et surtout à chaque fois qu'il y a tentative de limiter cette liberté, je pense particulièrement au journal Le temps et Dar Essabah, où le pouvoir a essayé de mettre une direction et museler le journal, non seulement les journalistes ont résisté, mais toute la société civile a été du côté de la bataille de ce journal pendant des mois, jusqu'à ce que le gouvernement fasse marche arrière. Désormais, le concept de liberté d'expression est une chose sur laquelle la société tunisienne et les créateurs tunisiens ne voudraient plus jamais voir revenir en arrière.
Nouri Bouzid a déclaré l'autre jour sur France 24: «On nous a confisqué notre révolution, mais nous avons gardé notre liberté d'expression.»
Les prémices de cette révolution sont nés en 2008, avec le soulèvement du bassin minier. Et ceux qui étaient derrière ce mouvement-là et ceux qui étaient derrière les premiers remous de Sidi Bouzid, ceux qui ont porté petit à petit le mouvement jusqu'à Tunis et jusqu'à cette journée de cette périphérie lointaine qu'est Sidi Bouzid, jusqu'à l'avenue Bourguiba aussi centrale soit-elle en Tunisie, les gens qui ont fait ces relais de petits et grands mouvements, ces gens-là ne sont pas au pouvoir en Tunisie. Mais c'est le jeu de la démocratie. Cela fait partie de ce jeu. Aujourd'hui les islamistes qui représentent la majorité relative dans ce pays et qui sont au pouvoir n'ont jamais participé à la révolution. Ils sont arrivés, ils ont profité de la liberté que la révolution leur a offert. Aujourd'hui, ils gouvernent, demain, ils pourraient être facilement ou très difficilement aussi à l'opposition, mais ce qui est sûr et certain, c'est qu'il y ait des islamistes ou des démocrates ou des progressistes au pouvoir, la liberté d'expression acquise sera très difficilement enlevée à ce peuple.
Il y aurait plus de liberté d'expression, certes, sauf que sur le terrain, paradoxalement, cette liberté semble minée. On peut être agressé à cause d'elle, cette parole peut ne pas être comprise, le film de Nadia El Feni l'an dernier a fait les frais des retombées de cette violence contre une certaine forme d'expression, le film Persépolis aussi.. Y a-t-il donc une sorte de paradoxe qu'est en train de vivre la société tunisienne dans sa complexité?
Tout d'abord, je ne crois pas qu'il y ait là de bons exemples. Pourquoi je le dis? Je ne mets pas en doute la qualité de ces films, mais ce sont des faits particuliers qui sont arrivés, sont entrés dans le jeu préélectoral. Quand El Nahda a essayé de faire de la question de l'identité arabo-musulmane la grande question dans ce pays alors qu'elle n'a jamais été, elle a profité de ces deux évènements-là pour en faire une caisse de résonance. C'est la volonté politique qui a essayé de se jouer de ces événements-là. Ce n'est pas le peuple qui a condamné. C'est un partie politique qui a mis ces deux oeuvres dans une situation de servir, plutôt une monnaie de change, à servir de prétexte pour monter la tension au sein de ce pays, pour le diviser, pour partager les Tunisiens, entre les gens qui connaissent Dieu et les gens qui ne le connaissent pas. Ce discours n'a jamais été le discours des Tunisiens en général. Ce que je veux dire est que si le film de Nadia El Fani (Ni Allah ni maître Ndlr) a été attaqué par une partie des Tunisiens, il a été défendu âprement par les créateurs en Tunisie. Même ceux qui ne partageaient pas les avis de Nadia El Fani l'ont défendu et c'est ce qui est fondamental. Les journalistes convaincus de la liberté d'expression ont aussi défendu le film. C'est l'essentiel. Ça se serait passé contre l'ancien pouvoir et avec les clés qui étaient les siennes il y aurait eu personne pour défendre cette situation-là. Aujourd'hui, les gens ont du courage de défendre même s'il s'agit de religion.
Comment expliquer alors que ce sont les islamistes qui ont gagné?
Les islamistes sont un mouvement qui est organisé depuis une dizaine d'années qui ont l'habitude de travailler d'une manière souterraine. Ils étaient déjà structurés même quand ils ont été décimés. Et cette structure a servi, a permis aux islamistes d'accéder à une meilleure préparation que les autres partis. Le fond islamiste a ceci de particulier est que ce sont des gens qui ne se divisent pas. Il y a une discipline d'appartenance que ceux qui sont aujourd'hui dans l'opposition que j'appellerai le front démocratique ou progressiste n'avait pas. Ces derniers se sont divisés. Ils se sont attaqués les uns les autres pour perdre en réalité. Parce que le front démocratique pouvait compter sur une base beaucoup plus large mais elle était tellement divisée que si El Nahda a été voté par un million et demi de votants en Tunisie, il y a eu un million trois cent cinquante mille voix exprimées et complètement perdues car ayant participé à l'élection de personne et ça, c'est la division qui a mené à ça.
Etes-vous optimiste et pensez-vous que les forces créatrices et intellectuelles tunisiennes puissent faire bloc contre l'avancée des islamistes et leur vision obscurantiste?
Ce n'est pas le rôle des artistes de faire bloc et de prendre la place des politiques. Les artistes ne sont là que pour révéler à une société ses tares et ses réussites, pour révéler aux gens leur complexité et leur beauté, pour les faire rire et les faire pleurer et quand on révèle aux gens leur vérités, ces gens sont peut-être capables de faire de meilleur, choix. Ça s'est notre rôle. Notre rôle n'est pas de remplacer celui des politiques je répète. On a chacun d'entre nous certes nos points de vue, mais moi je défendrai pleinement la liberté d'expression d'un artiste islamiste et j'espère qu'un jour il aura le courage et l'honnêteté de défendre ma liberté d'expression aussi.


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