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La Ligue arabe a travers le regard des intellectuels
Publié dans L'Expression le 24 - 03 - 2005

C'est un fait que la Ligue arabe est avant tout une annexe de la diplomatie égyptienne.
Dès la fin de la Seconde Guerre mondiale, les Britanniques avancent l'idée d'une fédération des Etats arabes cherchant ainsi à gagner encore une fois- comme après le Première Guerre mondiale- la sympathie des pays arabes. Ses alliés hachémites d'Amman et de Bagdad tentent alors de mettre sur pied un Etat unifié du «Croissant fertile» (Palestine et Syrie en plus de leur Etat). L'Egypte, opposée à ce projet, propose un contre-projet qui aboutit à la réunion d'Alexandrie et à la création de la Ligue Arabe le 22 mars 1945, précédant de trois mois la charte de création des Nations unies à San Fransciso. Pendant près de cinquante ans, le rôle de la Ligue Arabe fut, d'une certaine façon, à travers les options de ses dirigeants, apprécié par l'Est et l'Ouest. La chute du bloc soviétique mit à nu l'insignifiance de la Ligue La tentative libérale de certains pays, accusée de manque de nationalisme, s'est vite dévoyée dans des régimes militaires ou semi-militaires «qui cherchent toujours à créer un péril extérieur qui leur permette de détourner l'attention de leur peuple, donc de réduire les risques de coup d'Etat ou de révolution. A cet égard, la colonisation puis la création de l'Etat d'Israël leur ont été très utiles. Ces régimes sont des farouches adversaires de l'humanisme et du libre usage de la raison, d'où, là encore, la perte de confiance des musulmans dans le modèle occidental qui sert leurs intérêts.»
Les réformes économiques libérales en cours depuis 1988 dans le monde arabe et qui sont appelées infitah (Egypte, Tunisie, Algérie, Maroc) sous les injonctions du FMI, ne s'accompagnent pas de la libéralisation démocratique. Elles donnent du libéralisme la caricature suivante: inflation, perte du pouvoir d'achat (et d'une couverture sociale déjà minime), fermeture des entreprises d'Etat, réduction du nombre de fonctionnaires, chômage accru, ressources extérieures dévorées par le rééchelonnement de la dette, et la corruption.
Il faut s'interroger sur cette agitation de type éolien de la Ligue arabe qui se donne l'illusion de «compter» auprès des grands de ce monde. «En fait, écrit Georges Corm, l'objectif stratégique, qui intéresse plus l'Europe que les Etats-unis, est le contrôle des flux de migration vers les pays européens. C'est ce qui pousse à cet économisme naïf qui est le troisième facteur dont je vais parler, et dont les piliers sont : réforme économique classique, privatisations, ouverture du marché, baisse des droits de douane, adhésion à l'Organisation mondiale du Commerce et à la zone de libre-échange méditerranéenne. Or, dans cette région du monde où le secteur privé n'est ni compétitif, ni puissant et n'est pas entré dans le cercle vertueux de l'industrialisation, ce programme économique est complètement saugrenu. Il contredit en outre le désir de stopper les flux migratoires, puisqu'en réalité il provoque encore plus de chômage et de demandes d'émigration. Nous sommes au contraire en présence d'une gestion privée de type oligopolitique, qui vit sur des rentes et sur la corruption. Cette situation est un frein énorme au développement. Il suffirait d'aller dans des hôtels de luxe à Qatar, à Marrakech, au Caire et de «faire du business», et tout serait réglé, la paix serait là. Bien sûr, cela n'a fait qu'aviver les tensions, et sur le terrain la violence est plus grande que jamais. Georges Corm : La paix et la stabilité au Moyen-Orient : nouvelles approches. Conférence donnée à Paris par Georges Corm le 14 juin 2001 au Centre de la Presse étrangère A titre d'exemple de la cacophonie structurelle au sein de l'institution, le 29-30 mai 1990, le Sommet de la Ligue arabe à Bagdad, convoquée pour répondre au «défi» de l'émigration massive des Juifs soviétiques en Israël met surtout en évidence la désunion arabe. Le 10 août, une semaine après l'invasion du Koweït accusé de pomper le pétrole irakien du gisement de Roumaïla, et de contribuer à la détérioration des prix pétroliers en ne respectant pas son quota de production le sommet du Caire entérine les divisions du monde arabe. Il décide l'envoi d'une force panarabe pour défendre l'Arabie Saoudite censée être menacée sur la base de faux renseignements fournis par les Etats-Unis montrant les troupes irakiennes faisant mouvement vers la frontière saoudienne. Les Etats-Unis qui voyaient dans cette invasion un don du ciel avaient enfin, la possibilité et le prétexte tant attendu de mettre en pratique légalement la politique de mise au pas de l'Irak. Comme l'écrit le général Scharzkopt, les troupes étaient préparées depuis deux ans dans les déserts américains à ce type de conflit.
Mais la résolution finale, qui condamne fermement l'Irak et cautionne la présence étrangère dans le Golfe, n'est approuvée que par 12 des 20 membres représentés: l'Irak, la Libye et l'OLP votent contre, tandis que l'Algérie, le Yémen, la Jordanie, le Soudan et la Mauritanie s'abstiennent ou émettent des réserves. La Tunisie a boycotté la réunion. Les jours suivants, l'Egypte puis la Syrie et le Maroc envoient des troupes en Arabie Saoudite ainsi que le Pakistan et le Bengladesh. Le 10 septembre, 12 des 21 membres de la Ligue arabe décident, contre toute logique, un transfert rapide du siège de la Ligue de Tunis au Caire. Malgré les protestations des 9 absents, le changement a lieu le 31 octobre. C'était le cadeau fait à l'Egypte revenue dans les bonnes grâces après Camp David.
El Mandjara a raison d'écrire: «...Quant à la Ligue des Etats arabes, elle vit aussi la même situation puisque dès le début de l'intervention américaine, nous avons observé l'hégémonisme imposé par le président égyptien Hosni Moubarak aux autres membres de l'Organisation, sans parler de la manière d'appliquer les règles de procédure les plus élémentaires lors de la réunion extraordinaire des chefs d'Etat ou le transfert des bureaux de la Ligue de Tunis au Caire. Tous ces indices nous amènent à prévoir la décomposition à moyen terme de cette institution fondée en 1945».
Nostalgie
C'est un fait que la Ligue arabe est avant tout une annexe de la diplomatie egyptienne qui place, d'une façon rituelle qui ne souffre pas de discussion, généralement un ancien ministre des Affaires étrangères dans une ville où l'immense majorité des fonctionnaires de cette institution est égyptienne et dont l'efficacité est discutable, et est payée avec les deniers publics des 21 autres pays. L'Algérie qui a voulu tenter une normalisation à l'européenne, à savoir une présidence tournante, a vite été sommée de faire marche arrière. Le lobbying de l'Egypte, apparemment puissant, a menacé de non-tenue du sommet. L'Algérie s'est excusée pour avoir voulu une démocratisation des institutions. Voilà que l'on annonce, de plus, que, le ridicule ne tuant plus, la Ligue arabe demande un siège permanent aux Nations unies qui sera présidé, devinons par qui ? «naturellement» par l'Egypte. C'est dire si la chape de pomb et la mainmise sur les institutions est plus que jamais irréversible.
«Pour aborder le thème de l'avenir du monde arabe, à la veille de l'avènement du XXIe siècle, il faudrait procéder, écrit Mahdi el Mandjara, préalablement à une rapide analyse de la problématique mondiale....La plus grande crise que nous traversons est d'abord d'ordre éthique. Elle concerne les valeurs, les objectifs et les finalités de la société aux niveaux individuel et surtout collectif. Elle est le résultat de l'absence de visions claires et de projets de société dans les pays du Sud aussi bien que dans les pays occidentaux même si les causes diffèrent. En Occident, l'excès de matérialisme, la sacralisation de la productivité et du profit en tant que fins en soi sont à la base de cette crise. Dans les pays du Sud, celle-ci est le fruit de l'échec des modèles de développement dont l'incompatibilité avec la réalité sociale, économique et culturelle a été démontrée. Cette crise éthique intervient à un moment délicat où l'histoire de l'humanité connaît des développements et des évolutions rapides, notamment dans le domaine technologique qui l'amplifie. , L'avenir du monde arabe Al-Alam, 2 Janvier 1991.
Pour expliquer le retard scientifique et culturel, bien mis en évidence par le PNUD, il faut savoir que selon les statistiques de 1990, quatre articles scientifiques sont publiés chaque minute. «A la fin du 18e siècle, écrit l'islamologue Bernard Lewis, les universités occidentales avaient des douzaines de départements de culture orientale et des centaines de traductions de l'arabe, du persan et du turc ont été éditées. Le monde occidental souhaitait connaître son adversaire historique, mais cette curiosité n'existait pas de la part du monde musulman. C'est pourquoi, ils n'apprirent pas les langues de l'Occident, ne s'intéressèrent pas à son histoire ni à sa pensée, ne traduisirent pas grand-chose de sa littérature en arabe». Bernard Lewis, à propos de Ben Laden, de l'Intifada et de la nouvelle menace constituée par l'Iran. Interview, dans le Yediyoth Ahronot, CJE www.chretiens-et-juifs.org.
L'un des scénarios proposés par El Mandjara pour sortir le Monde arabe de sa léthargie est «le scénario réformiste». Il vise à préserver un minimum de stabilité et accepte l'introduction de réformes fondamentales. Le scénario réformiste pourrait avoir quelque chance de réussir, à moyen terme, si ces réformes sont rapides et répondent aux aspirations relatives à la démocratie, à sa pratique et ses principes et l'édification d'un société civile marquée par le respect des droits de l'homme, de la liberté de la presse et d'expression, et un esprit de tolérance.
Telle est la priorité des priorités. La lutte contre l'analphabétisme en est une autre priorité, car la plupart de nos problèmes sont dus à l'ignorance...En effet, on ne peut embrasser le XXIe siècle sans une mobilisation contre cet obstacle majeur et sans oublier d'autres exigences qui concernent l'encouragement de la recherche scientifique et technologique.
Pour tenter d'expliquer l'atavisme arabe à ne plus vivre dans le passé, qu'à se tourner résolument vers l'avenir, il nous a paru intéressant de voir si ce signe indien qui poursuit les élites orientalisées du pays a ses racines aussi dans une problématique d'ensemble qui est celle des élites arabes.
«L'intellectuel arabe insiste sur une forme d'aliénation dont il fait peu l'expérience dans la vie publique et passe sous silence les formes dans lesquelles il baigne constamment. Il commente favorablement les analyses de Marx, puis s'en retourne directement vers l'adoration d'un passé lointain. Il critique l'intellectuel occidental aliéné au capital et à l'idéologie de la classe dominante et il accepte lui de se dissoudre dans les vérités absolues du monde médiéval : la langue d' Al Djahid ; la scolastique d' Al Azhari, le mysticisme d'Al Ghazali. Si l'on continue à lier l'avenir de la nation arabe et la fidélité à ces absolus, comme on le fait presque toujours on ne peut que conclure ; l'aliénation arabisante (médiévalisation) est la pire de toutes et la campagne menée depuis tant d'années, avec succès il faut le reconnaître, l'aliénation-occidentalisation ne sert qu'à camoufler un retard culturel qui ne cesse de grandir...La médiévalisation est la conséquence d'une politique culturelle...politique de l'Etat national dominée par la petite bourgeoisie qui perpétue dans l'exercice du pouvoir un dualisme généralisé économique, social, culturel et linguistique qui garantit par sa seule existence, la pérennité à la pensée traditionnalisante». A. Laroui : La crise des intellectuels arabes.p.192-193.Editions Maspéro. Paris. (1974), cité par K.Taleb Ibrahimi.p.299. Les Algériens et leurs langues. Editions El Hikma. Alger (1997).
Pour Hugh Roberts, auteur d'un rapport de l'International Crisis Group sur les réformes en Egypte, la politique américaine au Proche-Orient (Irak, Israël) est contre-productive. Par l'incompréhension et l'hostilité qu'elle suscite, elle «affaiblit les réformateurs arabes en les obligeant à nier en permanence que leurs revendications démocratiques soient une réponse aux pressions américaines».
Réformes de façade
Les réformateurs ne baissent pourtant pas les bras. Réunies le 14 mars 2004 à la bibliothèque d'Alexandrie, 170 personnalités arabes (intellectuels, hommes d'affaires, membres d'ONG) ont réclamé des réformes constitutionnelles et législatives et l'organisation d'élections libres et régulières. Elles ont aussi appelé au respect des droits de l'homme, et en particulier des libertés d'opinion et d'expression. Faut-il pour autant s'attendre à un changement radical? Le chercheur Jean-Noël Ferrié en doute, car, selon lui, les régimes autoritaires arabes n'ont aucune intention de mener un processus de démocratisation à son terme. «Ils n'acceptent une certaine libéralisation qu'après avoir éliminé leurs opposants politiques et avec pour seul objectif leur maintien au pouvoir, relève-t-il. Aucun régime autoritaire n'a jamais adopté de son plein gré des réformes qui mettraient en jeu sa survie.» Tangi Salaün Ligue arabe Réformes au sommet L'Express du 29/03/2004 Au fond, écrit Georges Corm à propos de l'avenir du monde arabe, on peut se demander pourquoi ces ressources énergétiques colossales n'ont pas servi à mettre en route un véritable développement industriel dans la région, qui pourrait assurer un emploi aux millions de jeunes Arabes, qui entrent chaque année dans la vie active, et qui ont cette fertilité extraordinaire que tout le monde dénonce, qui font trop d'enfants. Le pétrole n'est pas du tout utilisé pour stimuler une véritable renaissance industrielle, dont ces pays ont besoin pour résoudre la crise démographique, la crise de l'emploi, sur lesquelles prospèrent tous les millénarismes. je sais que le «dialogue des civilisations», les religions n'ont rien à faire dans cette histoire de gestion du système international. Elles sont exploitées, manipulées, instrumentalisées, mais ce ne sont pas elles qui sont en cause. La presse a un rôle extrêmement important à jouer : elle ne doit pas être le prolongement des pouvoirs qui gèrent le système international, mais au contraire constituer un pouvoir moral qui doit dénoncer les écarts . «Le monde arabe, conclut le professeur Abdelwahab Meddeb, au-delà de la situation actuelle si sombre, conserve un énorme potentiel: les et les hommes, un immense territoire, une langue et une civilisation très riches. Reste à trouver les préalables politiques et les ressorts intellectuels pour les transformer en avenir».


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