Ahmed F. pousse F. Zohra dans le vide. Il la laisse pour morte, mais... Fatma-Zohra L., une enseignante à El Khemis, rencontre dans le bus Ahmed F., 33 ans. Elle discute avec lui à bâtons rompus. La route sur la ville des Roses est longue. Les mots doux, courts et précis font le reste. C'est le coup de foudre. Nous ne saurions vous préciser sur qui il est «tombé». A Ouled Yaïch, le frais couple gambade d'un magasin à un autre à la recherche des éléments du... trousseau parce qu'il faut préciser d'emblée que durant les deux heures de route, la demande en mariage a été faite et acceptée. Quelle vitesse, mes amis! En cette grosse chaleur de juin 2002, Ahmed propose à Fatma Zohra, qui s'est plainte d'une migraine, de monter sur le rocher situé à cinq mètres du sable et respirer un bon coup. «Elle a chuté suite à un étourdissement», précise-t-il en parlant vite, vite, vite comme s'il voulait en finir avec sa déposition et le procès. «Vous l'aviez laissée pour morte en vous enfuyant?», s'inquiète Djebour, le juge. «Non, je lui ai rendu visite à Mustapha-Bacha», rétorque l'accusé de tentative de meurtre. «Bien, dit le président. Parlez-nous des coups de pierre sur la tête, le visage et l'étranglement non achevé de la victime. Si vous refusez, nous avons le procès-verbal du juge d'instruction, PV qui contient tous les détails du crime», martèle Djebour qui va rigoler un bon moment lorsque l'accusé lance: «Je suis prêt à l'épouser immédiatement, ici, avant les délibérations». A la barre, Fatma-Zohra donne une version hallucinante: «Nous nous sommes connus en avril 2002. Il m'a demandé en mariage mais ne s'est jamais présenté chez moi. Il a usé d'une fausse fonction. Il m'a parlé d'un lot à bâtir à Miliana. Il m'a même montré le plan de construction», raconte la victime qui a surpris l'assistance en annonçant qu'elle a remis successivement, douze millions de centimes et dix autres. La première somme était destinée à l'opération de celui qui devait être son futur beau-père et la seconde pour l'acquisition de l'électroménager ! Rien de moins! Puis, elle aborde la tentative que Me Benchabane développera au cours de sa plaidoirie. Mais c'est Ouadah, le procureur général, qui va, paradoxe de la juste... justice, mettre à plat l'accusation, car à travers ses pertinentes questions, il permettra aux membres du tribunal criminel de se faire une idée sur les «circonstances atténuantes» de l'accusé. «Vous pleurez? C'est vous qui l'aviez payé (trente cinq millions dont treize en bijoux) pour vous assassiner, car bon sang en trois mois, vous lui offrez une telle somme croyant convoler en justes noces, c'était aller un peu vite en besogne», a dit le procureur général qui a tout de même requis une peine de quinze ans de réclusion criminelle. Maîtres Djamila Achrouf et Souilah ont plaidé l'acquittement car la victime a beaucoup fait pour se rapprocher de lui. «Elle tenait le bon numéro pour se marier et trouver, à 34 ans, le protecteur. Elle a financé ses «fiançailles» et lorsqu'elle a chuté, notre client a paniqué et fui», a dit Me Achrouf qui a pris avec beaucoup de philosophie les douze ans de réclusion prononcés.