Que cache un tel plaidoyer si abrupt, du moins pour l'économie nationale dont l'industrie se démêle tant bien que mal dans le cadre de sa difficile renaissance? L'affaire Sorfert connaîtra-t-elle son épilogue, heureux ou fâcheux soit-il? Tel qu'il a été décidé par les justiciers du pôle pénal régional d'Oran, le verdict sera prononcé aujourd'hui. Il s'agit d'une affaire non moins scabreuse qui a été jugée au début du mois en cours et dont le verdict a été mis en délibéré pour la journée d'aujourd'hui. L'avocat général n'a pas été indulgent dans son plaidoyer en relevant les zones d'ombre entourant l'affaire ainsi que ses tenants et aboutissants non moins scandaleux de bout en bout. Prenant la parole pour prononcer son réquisitoire, le procureur a développé un plaidoyer laissant pantois plus d'un pourquoi: la dissolution de l'entreprise alors que le projet a, avant sa mise en place, été entériné par les hautes sphères du pouvoir algérien, tout en lui accordant toutes les facilités, matérielles et financières, rentrant dans le cadre de sa concrétisation? «La dissolution de l'entreprise Sorfert», tel a été le réquisitoire de l'avocat général. Que cache donc un tel plaidoyer à la fois abrupt et sévère? Quel impact aura donc un tel réquisitoire si jamais ce plaidoyer est prononcé aujourd'hui par le juge du pôle pénal régional d'Oran? D'autant plus que l'économie nationale se démêle tant bien que mal et se cherche difficilement dans le cadre de la renaissance de l'industrie? La réponse sera connue aujourd'hui à la faveur du verdict, à moins d'un rebondissement spectaculaire ou encore d'une quelconque injonction pouvant être «ordonnée d'en haut»! L'affaire n'est pas un simple point de vue ni encore un fait divers quelconque. Elle est purement constituée de faits ayant dépassé les seuils de l'entendement alors que ses épisodes résument tout l'outrage à la réglementation régissant le partenariat devant reposer essentiellement sur le concept de confiance mutuelle et de la notion «gagnant-gagnant» dans le cadre de la soumission des partenaires à la Loi fondamentale algérienne, à savoir la Constitution. L'affaire a, dans son sillage, impliqué l'ex-directeur général, Egyptien de nationalité. Celui-ci est en fuite. 16 milliards de dollars transférés illégalement Comme elle implique également un autre responsable des finances, un chef de service d'une agence BEA et le directeur régional de la même banque. Pour les plus «cramponnés» dans de telles situations ainsi que pour les économistes, une telle affaire intrigue au plus haut niveau. Elle est à la fois dure et rude quant à son traitement avec célérité. Il aura donc fallu une bonne dose de courage et de prudence avant de prononcer une quelconque disposition, d'autant plus que les différents rounds ayant marqué l'enquête n'ont pas été aussi faciles, notamment dans le cadre de la recherche de la vérité, ainsi que les tenants et les aboutissants d'une pareille affaire. D'ailleurs, l'avocat général a, en plus de la dissolution qu'il a requise contre l'entreprise, prononcé une peine de sept années d'emprisonnement contre tous les mis en cause dont l'Egyptien qui occupait le poste de directeur général de l'entreprise, le responsable des finances, un chef de service d'une agence BEA et le directeur régional de la même banque. Le directeur général de l'entreprise est en fuite. Cela va de soi, comme s'il agissait d'une tradition chez ces responsables fuyant dès qu'ils ont des démêlés avec la justice algérienne. Car, un autre ex-DG égyptien a, lui aussi pris ses jambes à son cou en se dérobant à la justice dans une autre affaire liée au transfert illégal d'un pactole de 16 millions de dollars. Cette affaire est toujours entre les mains de la justice, en attendant d'être tirée au clair. Pour les fugitifs, le journal électronique l'Oranais rapporte une vraisemblable «exfiltration des deux responsables pour échapper à une probable condamnation». Dans le même article du même journal, l'on relève que «l'affaire a porté sur des chefs d'accusation se rapportant à la passation d'un marché avec une société allemande pour la réalisation de l'usine pour un montant de 1,28 milliard d'euros et transfert illégal d'argent». Ce partenariat algéro-égyptien (51% pour Orascom construction et industrie et 49% pour Sonatrach), est revenu au coût de 2,2 milliards de dollars. Au cours du procès, les mis en cause, en particulier le responsable des finances au sein de l'usine Sorfert a apporté quelques éclaircissements, dont seuls la justice et les économistes sont habilités à en décortiquer les faits. Le responsable des finances a invoqué «le caractère privé de la société lui permettant de reporter l'application du Code des marchés». Le seul recours...la fuite Les banquiers de la BEA ne se sont pas esquivés, car appuyant leurs thèses sur le fait que «le transfert d'argent est conforme aux procédures, suite au quitus donné par les trois directions centrales et la Banque d'Algérie». En somme, le pôle pénal régional d'Oran mis en place dans le cadre de la réforme du système judiciaire traite toutes les affaires de grande criminalité dont le blanchiment d'argent etc. Qui est Sorfert? Le projet de partenariat algéro-égyptien ne date pas d'hier. Il remonte au 4 février 2006 lorsqu'un protocole d'accord a été signé entre Sonatrach (VP/Aval) et Orascom. Ce contrat porte sur la réalisation et l'exploitation, en partenariat, d'une usine de production d'ammoniac et d'urée dans l'enceinte même de la zone industrielle d'Arzew, localité située à l'extrême-est de la wilaya d'Oran en venant de Mostaganem. L'article 02 dudit contrat définit les responsabilités des deux parties en ce qui concerne, notamment la constitution établie entre Sonatrach et Orascom Construction Industries d'une société par actions de droit algérien, dénommée «société de production» et ce, après l'obtention des accords nécessaires du Conseil national de l'investissement, le Cni. Le 24 juillet 2006, le projet Sorfert a été déposé sur la table du Conseil national d'investissement pour le premier examen du dossier. La 28e session du Conseil national d'investissement a avalisé le projet en l'encourageant, tout en boostant le projet par l'octroi du régime de la convention d'investissement et l'octroi d'avantages, conformément à la réglementation en vigueur et aux dispositions de l'ordonnance n° 01/03 modifiée et complétée le 27 novembre 2006. L'évaluation et l'examen du projet faits, le Conseil d'investissement a, dans sa décision N° 09/09, résolu d'octroyer au projet Sorfert, la même durée de maintien de la stabilité de la formule de calcul du prix du gaz naturel livré à l'usine, en se conformant au décret exécutif 05-128 du 24 avril 2005. Autrement dit, le projet a été placé sur le même pied d'égalité que les avantages accordés à l'entreprise Fertial, c'est-à-dire 10 années à compter de la date d'entrée en production de l'usine. Le directeur général de l'Agence nationale de développement de l'investissement a été instruit de négocier la durée des avantages d'exploitation autour d'un objectif de cinq années. Le 4 mars 2007, par résolution N° 19/75, le Conseil de participation de l'Etat donne son quitus pour la création des deux sociétés conjointes de production et de commercialisation constituées entre Sonatrach et Orascom Construction Industries. Le 17 mars 2007, un accord d'association entre Sonatrach et Orascom OCI a été paraphé. Il porte sur le projet de réalisation d'une usine d'urée et d'ammoniac. Par une autre résolution, sous le n°58-02 du 16 juin 2007, le conseil d'administration de Sonatrach approuve le projet de création d'une société de réalisation et d'exploitation d'unités de production d'ammoniac et d'urée, constituée entre Sonatrach et Orascom et donne mandat au P-DG de Sonatrach pour soumettre ce projet à l'assemblée générale de Sonatrach. Le 10 décembre 2007 tombe la décision n° 03/34. Le Conseil national d'investissement adopte les termes de la convention d'investissement Andi/SPA Sorfert Algérie. La décision 01/38 du 11 janvier 2009, le Conseil national d'investissement a confirmé le projet d'investissement Sorfert Algérie. La même résolution exclut l'idée de création d'une société conjointe de commercialisation offshore, dont l'objet social porte sur la vente des produits finis sur le marché international et que tout projet nouveau dans le domaine de l'ammoniac-urée doit être soumis à l'avis du Conseil national de l'investissement.