«Réhabilitation et rénovation de plus de 600 établissements de jeunes à travers le pays»    Le président de la République reçoit les voeux de l'Emir de l'Etat du Koweït    «L'Algérie restera forte grâce notamment à l'union de ses enfants»    Face aux tensions géostratégiques et les défis du développement, l'urgence de la refonte des partis politiques et de la société civile    Mise en conformité des constructions    L'équivalent d'une petite bombe nucléaire, c'est quoi le ''superbolt'' ?    Le Hezbollah affirme son droit de resister à Israël et refuse de baisser les armes    Mettre fin à la division    Des ambulanciers et des journalistes blessés lors d'une attaque par des colons à Beita    un Clasico sans saveur, belle affaire du MCO    Un terroriste abattu et sept autres arrêtés    «Le secteur de l'artisanat assure plus de 1,4 million de postes d'emploi directs»    Un mort suite à une collision entre une voiture et une moto à Sour    Hommage à cheikh Abdelwahab Nefil, figure de la musique andalouse    Une célébration du savoir et de la mémoire culturelle    LA LISTE DE BOUGHERRA POUR LA DOUBLE CONFRONTATION FACE À L'EGYPTE    Le MCO prend les commandes    Clôture du salon après 10 jours de riches activités    Programme TV du 4 novembre 2025 : Coupes et Championnats – Heures et chaînes    Programme TV du samedi 25 octobre 2025 : Ligue 1, Bundesliga, CAF et championnats étrangers – Heures et chaînes    Programme TV du 24 octobre 2025 : Ligue 2, Ligue 1, Serie A, Pro League – Heures et chaînes    Festival international du Malouf: fusion musicale syrienne et russe à la 4e soirée    Adhésion de l'Algérie à l'AIPA en tant que membre observateur unique: le Parlement arabe félicite l'APN    Industrie pharmaceutique : nécessité de redoubler d'efforts pour intégrer l'innovation et la numérisation dans les systèmes de santé nationaux    Conseil de sécurité : début de la réunion de haut niveau sur la question palestinienne et la situation au Moyen-Orient    Examen de validation de niveau pour les diplômés des écoles coraniques et des Zaouïas mercredi et jeudi    APN : la Commission de la santé à l'écoute des préoccupations des associations et parents des "Enfants de la lune"    Réunion de haut niveau du Conseil de sécurité sur la question palestinienne et la situation au Moyen-Orient    Boudjemaa reçoit le SG de la HCCH et le président de l'UIHJ    Athlétisme / Mondial 2025 : "Je suis heureux de ma médaille d'argent et mon objectif demeure l'or aux JO 2028"    Ligne minière Est : Djellaoui souligne l'importance de la coordination entre les entreprises de réalisation    Mme Bendouda appelle les conteurs à contribuer à la transmission du patrimoine oral algérien aux générations montantes    CREA : clôture de l'initiative de distribution de fournitures scolaires aux familles nécessiteuses    Poursuite du suivi et de l'évaluation des programmes d'investissement public dans le secteur de la Jeunesse    Agression sioniste contre Ghaza : le bilan s'alourdit à 65.382 martyrs et 166.985 blessés    La ministre de la Culture préside deux réunions consacrées à l'examen de l'état du cinéma algérien    Le Général d'Armée Chanegriha reçoit le Directeur du Service fédéral pour la coopération militaire et technique de la Fédération de Russie    Foot/ Coupe arabe Fifa 2025 (préparation) : Algérie- Palestine en amical les 9 et 13 octobre à Annaba    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



On y meurt lentement
BERROUAGHIA
Publié dans L'Expression le 04 - 08 - 2005

«Il faut cacher dans les montagnes le message que l'on veut transmettre.»
Berrouaghia, la ville autrefois préférée de l'émir Abdelkader, semble être oubliée et coupée du monde. En ce mois de juillet, la canicule est étouffante, les rues sont poussiéreuses et les jeunes n'ont d'autres distractions que les cybercafés et les jeux de cartes dans les halls des immeubles.
Le massif montagneux de la Chiffa surplombe les Hauts-Plateaux tombant à pic dans la vallée de la Mitidja et la claquemure. Là, nichée au creux d'une cuvette, une toute petite ville subit de plein fouet les effets de la canicule.
Il s'agit de la ville de Berrouaghia dont la dénomination sied parfaitement à la notion du «village des Asphodèles». Berrouaghia se trouve au centre d'une zone rurale très escarpée, abrupte et raide. Cependant, cela n'a pas empêché sa végétation de pousser abondamment.
Faisant partie de la wilaya de Médéa capitale du Titteri, dans l'histoire des conquêtes arabo-musulmanes, Berrouaghia était la ville désirée par le bey, adjoint du dey d'Alger. A l'arrivée des Français en 1830, le bey de Médéa n'était autre que le frère de l'émir Abbdelkader. Après le traité de la Tafna , Abdelkader fit de Médéa sa capitale et séjournait longtemps à Berrouaghia qui s'appelait à l'époque Tirinadi.
En pénétrant cette ville, plus d'un siècle et demi plus tard, l'on est frappé par les séquelles laissées par une dizaine d'années de violences sans précédent. Des maisons détruites, des fermes abandonnées, des forêts brûlées... des vies détruites. Sur les visages des habitants, l'on peut aisément lire l'implacable réalité vécue par cette ville. Pour définir la situation présente de Berrouaghia seule, l'expression «trou noir», sied. En effet, l'impression qui se dégage pour le visiteur est que Berrouaghia a la faculté de «pomper» toute l'énergie humaine pour lui imposer un silence de plomb. «C'est le silence qui cache la colère, le dépit, la lassitude», souligne un habitant de la ville. A Berrouaghia, les rues sont monotones durant la journée. Une fois la nuit tombée, et par défaut d'animation, l'atmosphère est maussade. Il y a bien entendu une maison de jeunes, mais ses activités sont gelées faute de subventions. La ville a pourtant une position symétrique d'Aumall, d'où partent des chemins dans toutes les directions, notamment sur Tablat, par la vallée de l'oued Meleh, et au sud vers Zahres Chergui. Ce dernier chemin arabe que jalonne Bordj Aïn Bouaf, et Bordj El Hammam, dans la chaîne des Seba Rous se prolonge jusqu'à Djelfa.
Il est inconcevable qu'une ville qui bénéficie d'une situation géographique aussi stratégique puisse être isolée, voire coupée du monde. Le seul trait d'union qui existe entre Berrouaghia et les autres villes du pays est un marché hebdomadaire anarchique qui a lieu chaque mercredi «souk larbaâ», dans une grande place à la sortie de la ville, boueuse l'hiver et très poussiéreuse l'été. Les n'ont d'autres distractions que ce souk qu'elles attendent impatiemment. Il y a aussi le fameux marché de la ville, où l'on vend de la friperie. Ledit marché se résume en une succession de tables disposées le long d'une rue parallèle au marché de légumes. On y trouve toutes sortes de vêtements, des pulls à 50 DA, des pantalons à 100 DA, des chaussures, des robes. Les ménagères passent parfois des heures à fouiller, à négocier et, la plupart du temps, elles font de bonnes affaires. Elles trouvent leur bonheur et économisent beaucoup d'argent, car il faut le dire, les vêtements neufs sont un luxe que les citoyens de Berrouaghia ne peuvent pas se permettre. Voilà presque le seul commerce qui porte ses fruits, en plus de l'alimentation générale.
Cela dit, quoique à dix mille lieues de la civilisation, la ville s'est tout de même dotée de cybercafés. Ces derniers ont vu le jour à la grande joie des jeunes qui n'ont aucune autre activité que de déambuler à longueur de journée, ne sachant quoi faire, car ils ne risquent pas de trouver un emploi. Il n'y a guère d'entreprises ni d'institutions, la seule compagnie qui employait la majorité des habitants de la ville était la Sonacome qui a fermé ses portes il y a quelques années. Ce fut le drame pour les pères de famille qui se sont retrouvés sans emploi du jour au lendemain. Il y a même eu de nombreux suicides qui témoignent de la détresse des familles.
Les jeunes eux n'aspirent qu'à partir, pour les grandes villes, ou à émigrer, espérant trouver du travail et un mode de vie plus vivant! Car l'autre plaie de la ville, agréable angoisse, c'est bien entendu le chômage. Pour lui échapper, de nombreux jeunes n'ont d'autre choix que de se lancer dans le commerce de rue. Nombre d'entre eux abandonnent l'école pour rejoindre le monde des exclus qui occupent la rue pour survivre et aider leurs familles. Le béton quant à lui, prend chaque jour plus de place à Berrouaghia, des cités sont construites. Pourtant, il y a bel et bien une crise de logement. Des familles habitent encore dans des taudis, mères et enfants vivent entassés, une bâche de plastique en guise de toit, des couvertures bariolées pour seul mur. Couchés sur des matelas en mousse ou sur une peau de mouton à même le sol, les enfants sont, les premiers, victimes de la canicule. Il reste tout de même la campagne, il y a les nombreuses fermes, de la verdure, les animaux de basse-cour qui vous réveillent le matin, le chant des oiseaux et la douce odeur des fleurs, l'air pur et le ciel limpide. Les fourmis et même les cigales ont trouvé là leur bonheur, la végétation est luxuriante, le vert est la couleur dominante qui donne à la localité un charme particulier.
Mais que font les habitants de cette magnifique campagne? Ils n'eu profitent pas, du moins, ils semblent ne pas avoir le coeur à en profiter. Ils ne l'entretiennent pas, ils ne la cultivent pas, ils ne s'y promènent même pas. La valorisation de la nature passe au dernier plan. Pas de jardins non plus, on préfère construire, mettre de la faïence, du ciment, n'importe quoi sauf de la verdure, les plantes, on les ignore. Autre phénomène que connaît Berrouaghia, l'analphabétisme. Pas moins de 38% de la population est analphabète, parmi eux beaucoup de personnes âgées, mais des jeunes aussi. Un centre a été créé mais a fermé ses portes très vite, car les gens ont honte d'afficher leur ignorance. Ils préfèrent parler d'argent, de récoltes, de tout et de rien, mais surtout pas d'instruction, ni de culture.Ce n'est certainement pas une priorité.
Il y a le sport, le football, Berrouaghia a un club, qui n'est pas mauvais, mais l'APC n'a pas d'argent pour le financer. Les conséquences sont visibles, les joueurs n'arrivent pas à évoluer. A part ce club, aucune autre activité sportive n'existe dans la ville.
A Berrouaghia, on meurt doucement. A mesure que les minutes s'égrènent, on sent le temps passer lourdement, alors la lassitude et la monotonie deviennent une seconde nature. C'est la ville oubliée, la ville fantôme. On passe par là, mais on évite de s'y arrêter, on évite d'en parler, c'est Bagdad café! Pourtant, elle est là, la ville des Asphodèles, elle existe et elle a tant à nous donner.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.