Sa voix, pour ceux qui ont la chance d'avoir assisté à ses derniers spectacles et la connaissent donc mieux que quiconque, est restée celle de ses vingt ans. Intacte. On ne sait pas encore quel est le secret de cette jeunesse impérissable sans cesse renouvelée de Nouara et de sa voix. Mais ceux qui l'ont connue de près en savent quelque chose. Même si la vie ne l'a guère gâtée, Nouara a une bonté impérissable au fond de son âme d'artiste et d'être humain qu'elle ne cesse de faire rayonner sur tous ceux qui l'entourent. Même quand son visage dégage de la tristesse, Nouara sourit toujours. Le sourire l'accompagne partout sur scène et dans la vie. Si un jour on ne devait plus écouter qu'une seule voix féminine kabyle, cela ne pourrait être que celle de Nouara. Elle peut chanter en solo ou encore être accompagnée d'autres sommités de la chanson kabyle avec laquelle elle a réalisé des duos: Chérif Kheddam, Lounès Matoub et Farid Ferragui, la voix de Nouara est toujours envoûtante. Nouara a fêté ses 75 ans, mais elle a marqué, pour l'éternité, la chanson kabyle de son empreinte indélébile. Une artiste, une école! Quand on est une femme douée et dotée d'une belle voix et qu'on rêve d'un parcours artistique digne de ce nom, on n'a pas d'autres choix que de tenter d'abord d'imiter la grande Nouara en fredonnant les chansons qu'elle a interprétées. Quelle est cette chanteuse kabyle qui peut se targuer aujourd'hui de ne pas être passée par l'école de Nouara? Il ne s'agit pas bien entendu des grandes dames de la chanson kabyle qui sont les aînées de Nouara et qui ont constitué inéluctablement une école pour cette dernière à l'instar de Djamila, Hnifa et Chérifa entre autres. Mais des chanteuses kabyles qui sont venues après. Elles diront toutes qu'elle ont aimé, vénéré Nouara, car elle est en quelque sorte la référence incontournable. Ce n'est pas un hasard si Matoub Lounès l'a choisie pour interpréter avec elle le très touchant hommage à Mohamed Boudiaf dans son album «Communion avec la patrie». Farid Ferragui a aussi jeté son dévolu sur Nouara lorsqu'il a composé l'une de ses meilleures, plutôt l'une de ses plus mélancoliques chansons d'amour intitulée «Khas hemlegh-k». Qui d'autre que Nouara pouvait camper la voix dans ce dialogue dés-espéré entre deux personnes qui se sont jadis aimées et qui se revoient des décennies plus tard pour pleurer ensemble leurs vies perdues? Quant à Chérif Kheddam, le nom de ce maître est indissociable de celui de Nouara. Chérif Kheddam... Peut-on d'ailleurs parler de Nouara sans citer Chérif Kheddam? C'est une mission impossible. C'est évident, Chérif Kheddam a écrit et composé une grande partie des chansons interprétées, par Nouara. Et, ensemble, ils ont aussi interprété les chansons aux airs mélodieux dédiées à l'amour et à d'autres thèmes. «Deray ik ferrun» est sans doute l'un des plus beaux duos magistralement interprétés par ces deux géants et dont une version filmée est diffusée sur les chaînes de la télévision algérienne publique. C'est une pièce musicale qui provoque la chair de poule en l'écoutant. Elle n'est pas la seule.D'autres chansons interprétées en duo par Nouara et Chérif Kheddam ont le même effet sur le mélomane qui sait bien sûr que la musique est loin d'être un bruit tonitruant «organisé». C'est le cas de «Anef ad-dragh deg menni», «Nemfaraq ur nkhemem», «yeccats win ur-sengi lehsan», etc. Un autre nom d'un artiste spécial et mythique, unique aussi, est indissociable de celui de Nouara, c'est Medjahed Hamid. Une autre école de musique unique en son genre. L'auteur et interprète de la chanson magique et ensorcelante «A yul ig-heznen dima» a aussi écrit et composé des chefs-d'oeuvre interprétés par la diva Nouara, de son vrai nom Hamizi Zahia, née le 15 août 1945 à Azazga. Joyeux anniversaire et longue vie à Nouara.