Si l'Afrique du Sud avait tenu son icône, à travers, Nelson Mandela, l'Amérique latine son baroudeur par le biais de Che Guevara, en la personne d'Ait Ahmed, l'Algérie aurait enfanté les deux à la fois. Indomptable, il aura consacré toute sa vie à promouvoir les droits de l'homme et la démocratie en Algérie, après avoir voué sa jeunesse à sa libération. Encore lycéen, il adhère au Parti du peuple algérien (PPA) à l'âge de 16 ans. À la tête de l'Organisation Spéciale, il met en place les structures (militaire et politique) pour mener, de façon efficace la guerre de Libération nationale. Il s'installe au Caire au mois de mai 1952 après le braquage de la poste d'Oran.Il sera à l'origine d'une diplomatie éclatante. En avril 1955, il dirige la délégation algérienne à la conférence de Bandung. En avril 1956, il ouvre et dirige le bureau de la délégation du FLN à New York... Homme politique infatigable, intellectuel respecté, il aura été parmi les premiers à avoir défendu la cause de son pays, à travers le monde. Il fera partie des 9 dirigeants du FLN historique dont il sera le fer de lance de la diplomatie durant toutes les années de lutte pour l'indépendance. Hocine Ait Ahmed démissionne du GPRA (Gouvernement provisoire de la République algérienne) et de tous les organes du nouveau pouvoir, au lendemain de l'indépendance lors de la crise dite de l'été 1962, mais il gardera son mandat de député à l'Assemblée nationale constituante, où il mène un travail acharné pour le pluralisme et la démocratie. Une mission impossible qui le mènera à créer le Front des forces socialistes, en septembre 1963 pour en faire le porte-drapeau de l'opposition au système avec comme objectif l'instauration d'une Assemblée nationale constituante qui conduirait à l'avènement d'une IIe République, une des formations politiques les plus crédibles et représentatives pour la lutte et les revendications en faveur de la démocratie et des droits de l'homme. Des revendications que porte en son coeur, aujourd'hui, le Hirak. Un événement qui était servi sur un plateau d'argent au Front des forces socialistes qui n'a pas pu ou su capitaliser. Il en a fait, paradoxalement une pure perte, pris dans la nasse d'une guerre des clans et de leadership malsain qui n'a pas honoré la mémoire des premiers martyrs de la démocratie qui sont tombés les armes à la main au lendemain de l'indépendance pour faire barrage à un système dirigiste qui, de crise en crise, a mis le pays dans une impasse politique inédite depuis son accession à l'indépendance. Une étape cruciale, historique certainement, que n'a pas saisi le parti cher à son fondateur, Hocine Ait Ahmed et à ses illustres compagnons (les colonels Mohand Oulhadj, Si Sadek, les commandants Bouregaâ, Abelhafid Yaha...) de route baroudeurs et patriotes devant l'Eternel. C'est à ce moment-là qu'il a fait étalage des dissensions, des luttes intestines qui le rongent comme un cancer. Les instincts bassement égocentriques ont eu raison de la noblesse de ses luttes et revendications qui l'ont jalonné et façonné, dès le lendemain de l'indépendance. Un sillon tracé par le Zaïm qui n'était, hélas, déjà plus là...Après 70 années d'un combat ininterrompu pour les libertés, né le 20 août 1926 à Aït Yahia (Aïn El Hammam), dans la wilaya de Tizi Ouzou...il nous a quittés le 23 décembre 2015. Il repose, depuis, pour l'éternité dans son village natal, après avoir fait une unanimité sans précédent au sein de son peuple. Seul hommage qu'il a sans doute espéré.