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Fossoyeurs contre sorciers
ORAN
Publié dans L'Expression le 30 - 08 - 2006

Les fossoyeurs creusent en moyenne entre 12 et 15 tombes par jour, soit près de 5000 par an.
Qu'il pleuve, qu'il vente ou sous un soleil de plomb, ils sont toujours présents à leur poste, affairés à creuser des tombes, à l'aide de leurs archaïques outils de travail, qui sont constitués de pelles, de pioches et de rateaux. Parfois, on les aperçoit dans les allées entre les sépultures, occupés à arracher les herbes folles pour les entasser dans un coin et les brûler par la suite. Il s'agit de ces quinze fossoyeurs qui côtoient les morts en permanence dans le cimetière d'Aïn El Beïda, à équidistance entre la bourgade portant le même nom et la trémie sur la périphérie ouest de la ville d'Oran. Cette immensité d'une superficie de 82 ha où règne un grand silence, uniquement troublé de temps à autre par des gazouillements d'oiseaux de différentes espèces ou des sanglots entrecoupés d'un visiteur venu se recueillir sur la tombe d'un parent ou d'un proche, constitue le lieu de travail de ces fossoyeurs. Ils y passent la majorité de leur temps, parlant peu et ne souriant jamais. Ces hommes, dont l'âge varie entre 45 et 55 ans, sont qualifiés par certains de «personnages mystérieux creuseurs de tombes» et sont quotidiennement confrontés aux mines patibulaires et à la tristesse ostentatoire affichées par les personnes qui sollicitent leurs services. «Nous ne sourions jamais au travail. Nous avons presque oublié comment le faire, cela s'est transformé avec le temps, malheureusement, en une déformation professionnelle», a expliqué l'un d'eux, avant de renchérir: «On aimerait bien cependant que l'on ne nous traite pas de ‘'croque-morts''. C'est un sobriquet qui dérange énormément nos enfants à l'école et dans la rue».
Les fossoyeurs creusent en moyenne entre 12 et 15 tombes par jour, soit près de 5000 tombes par an. Ils sont présents à leur poste dès les premières lueurs de l'aube et ne terminent leur travail que vers 18h et ce, sans relâche durant tous les jours de l'année en comptant les week-ends et les jours fériés. Souvent, ils sont même sollicités après les heures de travail.
Marché aux puces?
Aussi inconcevable soit-il, le cimetière d'Aïn El Beïda se transforme, depuis une quinzaine d'années, tous les v endredis et les jours de fêtes reli gieuses, en un véritable marché aux puces où tout ce vend et tout s'achète. «Les visiteurs et les revendeurs à la sauvette laissent derrière eux des amas de détritus et d'ordures ménagères que nous sommes obligés de nettoyer. Ces gens ne font preuve d'aucun civisme ou respect à l'égard de ce lieu sacré. Ils n'ont aucun respect pour les morts», a martelé, dépité, notre interlocuteur avant d'ajouter: «Une armada de mendiants fréquente régulièrement le cimetière. Des femmes de différents âges et des hommes souvent accompagnés d'une ribambelle d'enfants se postent à des endroits stratégiques pour faire la manche. Il y a aussi ces pseudos-liseurs de sourates du Saint Coran qui guettent les visiteurs et se ruent sur lui dès qu'il s'arrête au niveau d'une tombe. Les morts n'ont pas tellement besoin de ces gens. C'est un lieu sacré qui mérite le respect de tout un chacun.»
La profession de fossoyeur est carrément décriée par la grande majorité de la société, notamment la jeune génération. Elle est même synonyme de malheur pour nombre de familles algériennes.
Les fossoyeurs du cimetière d'Aïn El Beïda sont des quadragénaires et des quinquagénaires demeurant dans les villages essaimés à travers la région d'Oran et de ses contrées limitrophes. «Il faut, avant tout, aimer ce métier pour pouvoir l'exercer. Côtoyer les morts 24h/24 durant 365 jours pendant des années, il faut le faire. J'exerce mon métier sans aucune répugnance en prenant soin des tombes d'autrui comme je souhaiterais qu'une autre personne le fasse pour la mienne lorsque je ne serai plus de ce monde», a expliqué notre interlocuteur. «Déterrer un cadavre en décomposition avancée sur ordre du procureur pour une autopsie n'est pas une entreprise aisée. Il faut avoir le coeur bien accroché», a-t-il fait remarquer avec un clin d'oeil.
Selon des recoupements d'informations recueillies sur les lieux, le cimetière représente le lieu de prédilection et une source d'approvisionnement en ingrédients pour les adeptes de la magie noire.
Le directeur de la régie communale des pompes funèbres d'Oran, M.Mechri, qui chapeaute en plus du cimetière d'Aïn El Beïda, celui de Sidi El Gharib dans le quartier de Sidi El Houari, de Moul Douma dans le faubourg de Ras El Aïn, sur les hauteurs de la ville El Malh dans le quartier de Saint Hubert, et le cimetière chrétien d'El Hamri, a fait remarquer à ce sujet: «En procédant aux opérations de nettoyage et de désherbage, les fossoyeurs ramassent différents objets découverts enfouis dans les tombes. On trouve des couteaux ‘'boussebaâ'', des cadenas, des effets vestimentaires, des chaussures, des chaussettes et même des touffes de cheveux soigneusement enveloppées dans du papier imbibé d'un mystérieux produit que des personnes malintentionnées, adeptes de la magie noire, enterrent dans les tombes.»
Les fossoyeurs, qui ont fini par avoir l'habitude de ce genre d'acte, devinent cet incroyable état de fait à travers un simple regard en constatant que la terre a été retournée. Il importe de rappeler dans ce contexte que les éléments de la brigade de gendarmerie de Oued Tlétat, commune relevant de la wilaya d'Oran, située à quelques encablures de la sortie nord de la ville, ont procédé, dans la nuit du 16 juin dernier aux environs de 23h, à l'interpellation de trois sorciers. Ces individus, âgées entre 55 et 65 ans, ont été surpris par les gendarmes dans le cimetière de Sidi Mohamed Etorki, dans le douar de Khedaïda, sur le territoire de la commune d'El Braya, s'adonnant à la pratique de la magie noire. Selon les informations recueillies auprès de la cellule de communication du groupement de la gendarmerie d'Oran, lors de leur arrestation, ils ont été trouvés en possession de livres du Saint Coran et différents autres objets.
Les gendarmes ont découvert les restes du squelette d'un cadavre déterré éparpillés autour de la tombe profanée. Des ossements ont également été retrouvés dans un véhicule Renault Express en stationnement à l'entrée du cimetière appartenant à l'un des mis en cause. Lors de leur interrogatoire, ils ont avoué que ce n'est pas leur premier forfait et qu'ils avaient l'habitude de s'adonner à ce genre de pratique pour satisfaire les sollicitations de leurs ‘'clients''. Ils ont été présentés devant le magistrat instructeur près le tribunal de Oued Tlélat qui a notifié leur mise en détention préventive après leur audition.
Flagrant délit
Moins d'une dizaine de jours plus tard, trois autres sorciers ont été arrêtés en flagrant délit par les gendarmes dans le cimetière d'El Kerma, commune située à 10 kilomètres au sud d'Oran. Selon la même source, les mis en cause ont été surpris déterrant des cadavres dans ce cimetière dans le but de subtiliser des membres à des fins de sorcellerie, ils ont été déférés devant le parquet d'Es Sénia et devront répondre de leurs actes lors de leur procès. Toujours est-il qu'à ce sujet, le directeur des pompes funèbres d'Oran a souligné: «Le détachement d'agents de la police communale dans les cimetières est devenu impératif pour assurer la sécurité. Les fossoyeurs ne sont pas habilités à intervenir dans certains cas. Ils s'exposent à un danger réel avec ces gens-là qui sont de nature imprévisible.» Concernant les activités de l'entreprise mise depuis peu sous son autorité après le départ en retraite de son prédécesseur, M.Benyetto en l'occurrence, après 32 ans de service, notre interlocuteur nous a informés que l'APC a mis à la disposition des pompes funèbres deux véhicules fourgons au début du premier semestre pour le transport gratuit des dépouilles du domicile mortuaire au cimetière. «Cette louable initiative a été décidée par le chef de l'exécutif communal pour venir en aide aux familles nécessiteuses et aux personnes abandonnées hébergées dans des centres d'accueil. L'inhumation et la mise en bière pour les étrangers auxquels nous procédons au rapatriement des corps, sont également à la charge de l'entreprise. L'actuel assemblée communale a pris en considération toutes nos doléances», dira M.Mechri.
Le manque de civisme conjugué à certaines pratiques perpétrées par des énergumènes sans foi ni loi, sont à l'origine de la déperdition de nos us et coutumes au détriment de toute une population.
La déplorable situation qui prévaut dans nos cimetières, lieux supposés sacrés où devraient reposer nos morts, en est un exemple vivant.


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