L'alliance de gauche, arrivée en tête des législatives en France sans majorité absolue, a affirmé mardi vouloir appliquer son programme de rupture, quitte à nouer des alliances au coup par coup, alors que des candidats émergent pour diriger le gouvernement. Des négociations serrées se poursuivent à gauche, mais aussi dans la majorité présidentielle, qui n'exclut pas de composer une alliance avec la droite républicaine. Le président Emmanuel Macron, de son côté, se mure dans le silence et s'envolait hier pour le sommet de l'Otan à Washington. Dimanche, le pays s'attendait à une déferlante de l'extrême droite. Mais c'est le Nouveau Front populaire (NFP) que les électeurs ont placé en tête contre toute attente. Une hétéroclite alliance de la gauche radicale, des communistes, des socialistes et des écologistes qui se querellaient quotidiennement hier et doivent maintenant s'entendre, à commencer par la désignation d'une figure consensuelle pour incarner leur projet. Un nom pourrait sortir du chapeau en fin de semaine ou la semaine prochaine. Olivier Faure, patron du Parti socialiste, s'est dit prêt mardi «à assumer cette fonction». Il est décrit par un haut responsable du parti comme «le seul profil qui peut rassurer».L'autre grande force de gauche, La France insoumise (LFI, radicale) pousse la députée Clémence Guetté, 33 ans, populaire chez les militants et beaucoup moins clivante que son chef Jean-Luc Mélenchon. La LFI dissidente Clémentine Autain et l'écologiste Marine Tondelier sont aussi parfois citées. Mardi, en faisant leur entrée à l'Assemblée nationale, les élus de gauche semblaient exclure d'élargir leur base politique au centre droit, alors même qu'ils ne disposent que de 190 députés, loin de la majorité absolue (289).»Je ne pense pas qu'on soit en situation aujourd'hui d'avoir une coalition plus large au gouvernement» que le NFP, a déclaré le sénateur écologiste Yannick Jadot, pour qui «les coalitions vont se construire à l'Assemblée». Quant au coordinateur de LFI Manuel Bompard, il a prévenu que la gauche appliquerait son programme, laissant à chaque groupe la responsabilité de «soit voter nos propositions, soit (...) nous renverser». La coalition veut abroger sur plusieurs mesures phares du gouvernement sortant, dont la réforme des retraites, très impopulaire, la loi immigration et l'énième réforme de l'assurance chômage. Elle a promis aussi d'augmenter le salaire minimum. Le NFP a «solennellement» mis en garde le président contre «toute tentative de détournement des institutions» en cas de maintien prolongé de l'actuel cabinet. Décidé à se battre après une campagne qui a évité la déroute du camp présidentiel, Gabriel Attal réunissait mardi les députés de son camp. Mais le silence présidentiel est pesant. «Quand il faut qu'il ferme sa gueule, il parle. Et quand il faut qu'il parle, il se tait», a lancé un député mardi lors de la réunion, selon une participante. Les partis de gauche «ne peuvent pas prétendre gouverner à eux tous seuls», a insisté une macroniste, appelant à «une feuille de route commune» des Républicains jusqu'à la gauche sociale-démocrate. L'hémicycle est désormais un organe tripartite avec, face au NFP, un camp macroniste (autour de 160 sièges) et l'extrême droite (RN, plus de 140). En marge, le groupe Les Républicains (LR, droite) compte 66 sièges. Entre 30 et 40 de ses députés se réunissaient hier pour désigner leur président et changer de nom, après l'alliance sans concertation de leur président avec le RN avant le premier tour. Quant à l'extrême droite, elle accuse le coup après avoir espéré que son président Jordan Bardella devienne Premier ministre. Un échec expliqué en particulier par les dérapages racistes et autres manifestations d'incompétence de nombreux candidats.