La province du Sud-Kivu a connu lundi son deuxième jour d'accalmie dans les combats opposant le M23 et ses alliés rwandais aux forces congolaises, après un appel régional à un cessez-le-feu dans l'est de la RDC. Les dirigeants d'Afrique de l'Est et d'Afrique australe, réunis en sommet samedi en Tanzanie, ont appelé à un «cessez-le-feu immédiat et inconditionnel» dans l'est de cet immense pays, une région ravagée par plusieurs décennies de conflit. Sa mise en oeuvre sous cinq jours a été confiée aux chefs d'état-major de la Communauté des Etats d'Afrique de l'Est (EAC) et de la Communauté de développement de l'Afrique australe (Sadc). Kinshasa, qui a accusé Kigali de lui avoir «déclaré la guerre» en envoyant des renforts avec lesquels le M23 s'est emparé fin janvier de Goma, principal ville de l'est congolais, réclame en vain des sanctions internationales contre Kigali. Lundi à la mi-journée, le front était calme après d'intenses combats samedi à une soixantaine de kilomètres de Bukavu, la capitale provinciale du Sud-Kivu, vers lequel le M23 et ses alliés rwandais ont continué d'avancer après avoir pris Goma, selon des sources sécuritaires et locales. En Europe, l'Allemagne reste toutefois «profondément préoccupée par une éventuelle avancée» des deux alliés vers Bukavu et par «la menace de nouveaux combats et de nouvelles souffrances indescriptibles pour la population de la région», a déclaré lundi un porte-parole du ministère allemand des Affaires étrangères, Sebastian Fischer, lors d'une conférence de presse. À Bukavu, quelques élèves ont néanmoins repris lundi le chemin de l'école, après plusieurs jours d'angoisse sur l'imminence d'une attaque du M23 et ses alliés rwandais. Vendredi, des écoles et banques avaient été fermées par précaution, des commerçants avaient stocké leurs marchandises par crainte de pillages, et des habitants avaient commencé à fuir cette ville d'un million d'habitants. Toujours à Bukavu, un procès s'est ouvert lundi devant le tribunal militaire pour juger quelque 80 soldats des forces armées congolaises (Fardc) accusés de «meurtre, viol, dissipation de munitions de guerre, fuite devant l'ennemi, pillage, révolte et perte d'armes». «Ils ont commis des actes ignobles à l'égard de la population, ce qui est contraire à la mission et la confiance placées en eux, qui est la sauvegarde de la souveraineté et la protection de la population», a martelé le major colonel Jérôme Bayawa, représentant du ministère public près la cour militaire du Sud-Kivu. La plupart de ces militaires, parmi lesquels un sergent et un caporal mais aussi de nombreuses jeunes recrues, ont été arrêtés à l'aéroport de Kavumu, a ajouté Jérôme Bayawa. Cet aéroport militaire, utilisé pour acheminer des renforts en hommes et matériel sur le front, est le dernier verrou tenu par les forces congolaises avant Bukavu, située à une trentaine de km. Au cours du week-end, plusieurs civils ont été tués dans des circonstances encore indéterminées à Kavumu et dans ses environs. Le conflit qui oppose le M23 et ses alliés à l'armée congolaise dure depuis plus de trois ans et s'est accéléré ces dernières semaines. Kinshasa accuse Kigali de vouloir piller ses ressources naturelles. Le Rwanda nie et dénonce la menace dans l'est de la RDC de groupes armés qui lui sont hostiles, notamment ceux créés par d'ex-responsables hutu du génocide des Tutsi au Rwanda en 1994. Goma, capitale de la province du Nord-Kivu, a été prise fin janvier par le M23 et ses alliés rwandais, après des combats qui ont fait au moins 2 900 morts selon l'ONU.