P'tit Moh, maître du mandole et artiste incontournable de la scène musicale algérienne, s'est produit dans la soirée de samedi dernier, à Alger, où, il a fait salle comble à l'Institut français d'Alger (IFA). La musique-fusion était au rendez-vous de ce spectacle qu'a assuré le chanteur qui était accompagné d'un orchestre, où, l'on pouvait compter de grosses pointures, dont Farhat Boualagui au violon, Hacène Khoualef à la batterie et Rachid au piano. P'tit Moh a ainsi gratifié l'auditoire d'une exquise et envoûtante expérience musicale, avec une plongée aux racines du recueil chaâbi algérois, notamment celui chanté par l'éternel Amar Ezzahi. Au fil de ce concert de plus de deux heures, il a enchaîné les istikhbars auxquels répliquait magistralement l'ensemble musical. Ces préludes exécutés à perfection, à l'image d'un moual bien mené, laissaient aussitôt place à des morceaux composés par le soliste. Citons Dziri, en hommage à la capitale et que P'tit Moh a composé d'après son ressenti. Figure également Ederdba, en référence à Dar Ediwane, à la casbah d'Alger, sinon Nostalgiers qui traduit le mal du pays. Notons qu'El Hadi El Anka était aux premières loges face à la scène, en compagnie du frère de P'tit Moh, une présence qui ajouta énormément de magie à ces moments exceptionnels de partage et finalement d'hommages appuyés aux chouyoukhs, dont le cardinal El Hadj M'hamed El Anka. D'un toucher digne d'un Paco de Lucia, il a cette aisance unique de transcender les mélodies du mandole, pourtant instrument typiquement algérien et chaâbi. Dans le jeu du guitariste se mêlent et s'entremêlent, comme dans un corps à corps langoureux des airs empruntés au flamenco. Dans tous les cas, le rendu est exceptionnel: une musique pleine de soleil, celui de la Méditerranée et surtout d'Alger la Blanche, écarlate, attachante et nostalgique. Dans d'autres passages, tantôt énergiques et syncopés, tantôt mélancoliques, l'on pouvait reconnaître de célèbres chansons de Dahmane El Harrachi. Mieux, P'tit Moh a réussi à capter l'assistance en interprétant avec maestria la chanson Khalouni fi hali aux intonations typiques du mode oranais lesquelles renvoient à Blaoui El Houari, Cheikh Bensmir et autres Sanhadji... Il a enfin tenu à reproduire Ya achak ezzine saâfou ma fi el kalb ahzine que chérissait particulièrement Amar Ezzahi, chantre de la musique chaâbie et qu'il a personnellement côtoyé, l'accompagnant lors de nombreuses fêtes. Virtuose du mandole, Ptit Moh, est un musicien, compositeur et arrangeur passionné par l'évolution de la musique chaâbie. Il modernise cet instrument traditionnel et l'intègre à divers genres musicaux. Guitariste et multiinstrumentiste, il compose pour des artistes comme Médine, Gnawa Diffusion, Idir, Chico & the Gypsies et collabore avec Mick Jones (The Clash), Nino Josele et Juan Carmona. Directeur artistique de l'orchestre El Gusto, il participe aussi à des projets de musique de films et de théâtre. À travers son «Ptit Moh Project», il fusionne le chaâbi, le jazz, l'andalou et le gnawi, affirmant son attachement aux musiques traditionnelles, tout en explorant de nouvelles sonorités internationales, rappelle-t-on.