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Le livre dans la cité
LE SAVIEZ-VOUS ?
Publié dans L'Expression le 27 - 02 - 2002

« Le livre dans la cité », voilà un thème aussi vaste que complexe, aussi abstrait qu'étrange à évoquer dans une société que tout semble pousser, spécialement aujourd'hui, à se détacher des choses spéculatives, et singulièrement de la littérature.
Encore qu'il faudrait, ici mentionner, un peu par coquetterie intellectuelle, qu'à côté du livre, il y a dans la cité, la presse, la radio, la télévision, le théâtre et le cinéma. Mais le titre, un peu trop général du présent sujet, porte, si j'ose dire, seulement sur Le livre dans la cité. Je me permettrai donc dans cet essai de réflexion quelques généralités et quelques escapades qui m'aideront à être modeste et qui, pour simples et connues qu'elles soient, ne manqueront pas - je l'espère - d'éveiller chez le lecteur une infinité de réflexions plus hardies qui l'installeront au coeur de la cité et de le laisser comprendre par le livre ce que dans cette cité, pendant des siècles, ses populations successives ont créé, ont inventé, ont gardé, ont développé.
De plus, cet essai, cet exercice, que j'envisage personnellement comme un moment d'éphémère émerveillement de citoyen amoureux de sa cité, pourrait relever de quelque vanité ou de quelque fantaisie, - cela dit, d'autant plus qu'on souhaiterait peut-être rapporter notre thème à la seule grande ville d'Alger et, qui plus est, capitale d'un pays de légendes fantastiques, d'histoires de héros impressionnants et de civilisation vraie et multiple ; capitale aussi d'un peuple éblouissant de volonté d'exister, car forgé (coeur et raison) par sa multitude spirituelle, par ses traditions fertiles en humanisme et en bravoure, et, sans aucun doute, par sa soif inextinguible de progrès, de justice, de liberté et d'indépendance.
Et c'est un fait d'évidence que toute cité raconte sa vie passée ou exprime sa vie présente dans la rue, franchement, délibérément, quotidiennement, avec éloquence et clarté, soit à la façon du pauvre, soit à la façon du riche. En effet, son urbanisme en général, l'architecture de ses maisons et de tous ses édifices, l'activité de son commerce et de son administration, la grandeur et la beauté de ses monuments et de ses musées, ses lieux d'éveil des intelligences à l'éducation et à la culture, le nom de ses quartiers, de ses rues, de ses aventures, de ses boulevards, de ses parcs et jardins, enfin la voix et le comportement de ses habitants dans leurs foyers et dans la vie active, tous disent aux sens et à la mémoire tout court, d'enregistrer leurs effets, plus spécialement intellectuels, que doivent apprendre, ici et maintenant, les jeunes et les moins jeunes et, plus tard, les générations successives d'Algériens.
Mais, il faut bien le dire, ni l'observation ingénieuse directe, ni la transmission orale d'une information riche et fortuite, ni le hasard heureux de la découverte - ni même ces trois éléments associés - ne sont sources incontestables de connaissances précieuses pour fixer ou pour ressusciter une certitude sur l'état de la cité depuis sa fondation.
Une question se pose alors, souverainement. Comment connaître sa cité et apprendre à l'aimer? On pourrait rétorquer: par des promenades fréquentes, assidues et studieuses ! Mais où prendre le temps qui court et l'enseignement le plus juste, le plus riche et le plus complet? On pourrait encore rétorquer: par le livre! Car le livre instruit, en fait, plus qu'il ne raconte. Le livre propose une certaine idée de la cité. Et dans la cité, le livre s'impose comme une nourriture culturelle de première nécessité. Il ouvre l'esprit et permet naturellement une perception peu ordinaire et plus exacte d'un monde superficiel, voire fermé, sans pour autant cesser de nous paraître familier. Et c'est cela le paradoxe, l'insolite, l'inconcevable, le paradoxe de l'adulte devenu enfant, le paradoxe de la raison devenue bêtise, le paradoxe enfin du radio-trottoir qui parasite l'information scientifique, la démoralise et lui cause du tort.
Or, le livre est bel et bien le miroir incontournable où se reflète la cité, où l'on regarde la cité. Elle y est entière ; elle y est substantielle ; elle y est détaillée ; elle y est découpée ; elle y est «sujet» et «objet» ; elle y est principe d'intérêt et thème de divertissement ; elle y est raison et évasion de la solitude ; elle y est réconfort, bonheur et souvenirs.
De ce point de vue, il n'est pas raisonnable de définir la cité par le nombre, la diversité et la qualité des livres qu'elle a inspirés aux intellectuels de toutes compétences dans les domaines sans limites de son espace illimité qu'elle a réussi à s'octroyer et à faire fructifier au fil des temps.
Aussi, pour connaître notre cité, le trait d'esprit de l'Anglais Thomas Carlyle (1795-1881, «Héros et culte des héros») rapporté à notre propos, est-il le bienvenu: «La véritable université de nos jours, affirmait-il, est une collection de livres.»
De même, déjà dans sa Cité idéale (Al-madîna al-fâdhîla), Al-Fârâbî, ce grand philosophe et mystique musulman (IX-Xe siècles), esprit très ouvert à toutes les sciences de son temps et polyglotte, argumente implicitement dans ses oeuvres très nombreuses, en faveur du livre dans la cité. Ibn Khaldoun, lui, évoque la fonction civilisatrice du livre et - ce qui, pour l'époque, était d'une grande modernité - critique la négligence de certains auteurs de ne pas aller loin dans l'analyse et l'explication des événements. «Aussi, relevait-il, les pages de leurs volumes restent muettes à ce sujet.» Pareillement Voltaire, dans une lettre à Damilaville, écrivait: «Un livre n'est excu-sable qu'autant qu'il apprend quelque chose.» Et je cite de nouveau Ibn Khaldoun qui souligne dans sa Mouqaddima (Les Prolégomènes), son grand souci de vérité en déclarant: «J'ai donc écrit un livre sur l'histoire grâce auquel j'ai levé le voile qui couvrait les origines des nations.» «Les choses étant ainsi, poursuit-il, la règle qu'il faut employer pour discerner dans l'information la vérité de l'erreur (...) consiste à examiner la société humaine, c'est-à-dire la civilisation (...). Alors, si nous entendons raconter quelque événement qui serait arrivé (...) nous sommes en mesure de le juger recevable ou de le déclarer non conforme à la vérité.»
Miroir donc de la cité, miroir sujet et objet, miroir clair et non déformant, le livre qui apprend rend compte de la civilisation citadine et en explique les caractéristiques. Le livre est ainsi le résultat de ce qui est le fait de l'observation et de ce qui est le fait de la réflexion. Le livre expose la cité dans tous ses états. Il est alors ouvrage de géographie physique et humaine, d'histoire du territoire, de ses aménagements et de ses habitants, d'histoire de la société avec sa civilisation, ses us et coutumes, ses classes, son organisation, ses vivants et ses morts, avec sa croissance et sa prospérité. Il est également ouvrage spécialisé: éducation, culture, sciences, beaux-arts, littérature, théâtre, loisirs. La liste est longue autant que pourrait l'être la vie de la cité. Et en donner quelques exemples, c'est, à mon sens, faire violence à l'esprit de recherche, au passionné de découverte, au simple curieux de se faire plaisir, à l'amateur d'instants délicieux... Mais quelle est l'origine du nom Al-Djazaïr? Combien de portes comptait notre capitale à la veille de l'occupation française et quel est leur nom? Quelle est l'histoire de telle rue ancienne, de tel faubourg, de tel quartier, de tel cimetière, de tel parc, de tel jardin? Quel degré d'altération la colonisation a-t-elle porté à nos édifices et à nos monuments? Où se trouvait l'esplanade Bab-Azzoun? Où se trouvait hammam al-Djeneïna (Le Bain du Petit Jardin)? Combien de mosquées et d'écoles comptait Al-Djazaïr? Quel est leur nom et quelle est leur histoire? Que sont devenues ces vieilles fontaines pittoresques, décorées avec art et vénérées par les passants? Que de souvenirs historiques pleins de piété, elles pourraient évoquer! Quel a été le sort de la Porte des lions dans le quartier de l'Amirauté? Que reste-t-il de la beauté de l'héroïque Casbah, de ses maisons, de ses ruelles, de ses boutiques d'artisans et d'artistes? Comment était organisée la Cité, comment vivait sa population citadine?...
Heureusement que le livre peut ressusciter les splendeurs anciennes de notre Cité. Il faut le reconnaître, des efforts de recherche de documents, des efforts aussi d'écriture ou de réécriture portant sur la vie de la cité d'hier et d'aujourd'hui, commencent à donner des raisons d'espérer davantage d'intimes connaissances. Car depuis l'indépendance, toute une littérature sur notre Capitale s'est constituée et tendrait à se développer pour enfin occuper chaque fois plus dignement l'espace qu'édifie, jour après jour pour elle-même, Madinet al-djazaïr.
Mais nous savons tous que dans l'état de l'exaltation, l'illusion et l'illusoire peuvent toujours surprendre notre bonne foi. Qu'à cela ne tienne ! La cité qui s'organise, la cité qui s'embellit, la cité qui crée, la cité administrative, la cité politique, la cité humaine, la cité ingénieuse, la cité cultivée, enfin la cité moderne, celle de l'Algérie d'aujourd'hui et de toujours, se doit d'encourager et d'aider ses travailleurs manuels et ses travailleurs de l'esprit, ses intellectuels et ses artistes en leur offrant des structures suffisantes et efficaces pour concrétiser leurs idées et accueillir leurs créations. L'ensemble de leurs oeuvres constitue, à la grâce d'une bonne volonté et d'une volonté bonne, Le livre de la cité - ou si l'on préfère, Le livre dans la cité. Il est maintenant un dernier point à clarifier avant d'interrompre ces généralités ; c'est que l'intitulé «Le livre dans la cité» - eu égard à cette préposition indiquant la situation du livre à l'intérieur de la cité - appelle un autre niveau de compréhension. Il conviendrait, en effet, d'ajouter que le livre dans la cité est également celui dont la qualité et la pertinence du contenu portant sur d'autres cités ou sur d'autres centres d'intérêt, réclament son droit de cité sans qu'il soit obligatoirement question pour lui d'être originaire de cette cité. «Le livre dans la cité»? «Le livre de la cité»? Vraie ou fausse querelle ici observée? Voilà bien un autre thème à débattre! Mais pour l'instant, si la querelle demeure de syntaxe et entre de belles intelligences, que soit donc le bienvenu tout jaillissement de lumière au profit du livre qui apprend au citoyen!


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