Ligue 1 Mobilis (24e J) : le leader accroché, la JSK co-dauphin    Communication : la culture de la formation continue soulignée à Ouargla    Oran : le Salon international du tourisme attire plus de 11.000 visiteurs professionnels    Journée mondiale de la propriété intellectuelle : unifier les efforts pour lutter contre la contrefaçon et protéger l'économie nationale    Festival national de la cuisine traditionnelle à Blida : 16 wilayas au rendez-vous    Jijel commémore le 67ème anniversaire de la bataille de Settara    Participation algérienne à la 39e édition du Salon international du livre de Tunis    Le RND met en avant le rôle de la diaspora face aux complots ourdis contre l'Algérie    Le président du Front El Moustakbal souligne, à Annaba, l'importance de renforcer le front intérieur et de consolider les acquis    Hadj 2025: lancement d'un programme de formation au profit des membres des groupes d'organisation de la mission algérienne    L'ANIE lance le Prix du meilleur travail de recherche sur la loi électorale algérienne    Durement éprouvés par la crise sociale, les Marocains anticipent une nouvelle dégradation de leur niveau de vie    Education : lancement de trois nouvelles plateformes électroniques pour accélérer la transformation numérique dans le secteur    Expo 2025: le Pavillon Algérie abrite la Semaine de l'innovation culturelle    Ghaza: le bilan de l'agression sioniste s'élève à 51.495 martyrs et 117.524 blessés    Vers un développement intégré dans le Sud du pays    Veiller au bon déroulement des matchs dans un esprit de fair-play    Gymnastique artistique/Mondial: trois Algériens qualifiés en finale    Inspection de la disponibilité des produits alimentaires et du respect des règles d'hygiène et des prix    Se présenter aux élections ne se limite pas aux chefs de parti    Quand les abus menacent la paix mondiale    La côte d'alerte !    La famine se propage    Higer célèbre 20 ans de présence en Algérie et inaugure une nouvelle ère avec la nouvelle série V    Ghaza: 212 journalistes tombent en martyrs depuis le 7 octobre 2023    Un art ancestral transmis à travers les générations    Mondial féminin U17/Algérie-Nigéria (0-0): un parcours honorable pour les Vertes    Des armes de guerre du Sahel et des drogues du Maroc saisies par l'ANP    Guerre ouverte contre la violence !    «Ziani va nous rejoindre à la DTN»    Ooredoo brille lors de la 2e journée de l'ICT Africa Summit 2025    Naissance d'un club sportif du nom du chahid Pr Djilali-Liabes    Condoléances du président de la République à la famille de la défunte    Les tombeaux royaux de Numidie proposés au classement ''dès l'année prochaine''    Un programme sportif suspendu    «Construire un front médiatique uni pour défendre l'Algérie»    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



La peau de l'Autre
FESTIVAL DE CANNES
Publié dans L'Expression le 21 - 05 - 2007

La Visite de la Fanfare, film présenté dans «Un certain Regard», a déclenché une salve d'ovations de plus de vingt minutes.
«Quand j'étais enfant je regardais le film d'amour sur la télévision égyptienne. Chaque vendredi après-midi les rues se vidaient. Tout le monde était scotché devant son poste, à suivre les histoires de coeur de Omar Sharif, Faten Hammama (...). Les films arabes ont disparu de nos écrans. Alors qui se soucie des chansons en quart de ton qui durent une demi-heure? Par la suite Israël a construit un nouvel aéroport oubliant de traduire les noms des routes en arabe. Parmi les milliers de boutiques construites là-bas, ils n'ont pas trouvé de place pour cette étrange écriture incurvée qui représente la langue maternelle de la moitié de la population...» Ainsi parle Eran Kolirin, réalisateur de La Visite de la Fanfare, le film présenté dans «Un certain Regard» et qui a déclenché une salve d'ovations de plus de vingt minutes. Ce film raconte justement les incidences de ce reniement de l'arabité de cette partie de la Palestine biblique, devenue depuis 1948, l'Etat d'Israël. «Un jour, il n'y a pas si longtemps, raconte Kolirin, une fanfare de la police égyptienne a été invitée en Israël pour l'inauguration d'un Centre culturel arabe.
Mais personne ne les attendait à l'aéroport et le minibus qui les transportait les déposa en plein désert à portée de regard d'un lieudit...Seulement voilà, une erreur de phonétique a fait débarquer ce groupe égyptien dans ce coin perdu, non loin de la seule buvette où campent deux clients éternels et une barmaid, jeune et jolie mais au regard asséché...Les Egyptiens font grise mine puis leur chef, le colonel Tawfik, décide de demander l'hospitalité, pour la nuit, à la dame qui, du coup, répartit le groupe entre elle et ses clients...Et la tragi-comédie s'installe progressivement faite de méfiance et d'a priori et puis la nuit se déroulant, les Egyptiens découvrent qu'ils ne sont pas les seuls naufragés...» Dans un très beau moment de cinéma, leurs hôtes tombent le masque et le réalisateur donne l'occasion à ces «étrangers» de montrer combien leur humanité peut être utile, donnant du coup un véritable coup de pied dans la fourmilière des préjugés entretenus à l'égard des Egyptiens (et par extension à l'égard des Arabes) «De nombreux films ont abordé la question de la paix que nous n'arrivons pas à obtenir, mais il semble que très peu de films posent la question de savoir pourquoi nous avons besoin de cette paix. Nous avons noyé l'évidence dans nos conversations sur des avantages économiques et des intérêts», confie le réalisateur. L'ancien Premier ministre, Rabin, en son temps, avait finalement fini par comprendre, mais ses ultras ont tôt fait de le neutraliser une fois pour toutes, eux aussi avaient compris quels intérêts ils avaient à entretenir le climat de guerre dans la région, en Palestine, au Liban. Ils ne sont pas les seuls dans le rôle du pyromane.
D'autres cinéastes, qui tentent depuis leur succès, Fargo, de jouer les pyromanes du rire grinçant, ont débarqué à Cannes avec une certitude qu'ils sont seuls à partager, pratique quand il s'agit de deux frères, les Coen. Inspiré d'une nouvelle tirée du désert littéraire du fameux Cormac Mc Carthy, No Country for Old Men, rappelle dans son aridité les pépites éditoriales de l'auteur de Si Jolis Chevaux et de Méridien de Sang mais là s'arrête la convergence. L'adaptation, qui démarre comme le suggère le roman de Mc Carthy, s'arrête en rade, les frères Coen ayant raté le fameux «turn point» indispensable pour déboucher sur un véritable troisième acte, comme le stipule la règle scénaristique de base...
Il ne s'agit pas de suggérer quelques leçons de scénarios au Coen Brothers, que non, car il est plus que certain que ces passages obligés existent dans le scénario mais les réalisateurs, en voulant forcer le clin d'oeil, ont tout bonnement raté les relais...Tout commence par une piste de sang sur laquelle tombe un retraité soudeur, braconnier à ses moments perdus. Il la suit et relève les signes d'un règlement de comptes entre trafiquants de drogue: des cadavres gonflés au soleil, des molosses dans le même état, la cargaison d'héroïne et plus loin, le dealer encore agonisant avec, à ses pieds, la mallette de dollars de la transaction. Le braconnier prend la mallette et ne vérifie pas les liasses, laissant ainsi un mouchard électronique signaler ses déplacements aux barons qui envoient à ses trousses un psychopathe sortant du Shining de Kubrick. Le reste s'enlise dans une poursuite digne de Mc Gyver...Sans trop d'intérêt. Par contre, c'est avec beaucoup d'intérêt que nous sommes partis à la recherche des Corps Perdus de la libanaise Danielle Arbid. On aurait pu penser qu'il s'agissait de ceux de Thomas, photographe français, aimantés par les bas-fonds du monde, et de Fouad, un voyageur à la mémoire amnésique sorti droit d'un roman de la Beat Generation (Burroughs, Kerouac). Mais non, pas forcément du moins.
La rencontre de ces deux voyageurs en dérive va déboucher sur une chosification de l'un, objetisé par l'objectif de l'autre.
Arbid ne s'arrête pas là, dans ce no man's land, situé en Jordanie (semblable à nos Hauts-Plateaux), elle tourne autour du pot, celui qu'Antonioni a mis toute une vie, ou presque, à façonner. On pense alors à Zabriskie Point et à ces corps enchevêtrés dévalant, à l'infini, les dunes, mais aussi à Blow Up et son photographe...Le thème de l'incommunicabilité cher au grand maître italien est dans l'air. Et quand le nu s'installe de manière crue, on est prêt à jouer le jeu, mais on reste à l'orée des choses...En sortant de la projection, et après avoir été gagné d'une impassibilité agaçante, à la lumière crue du jour, on constate que le regard ne peut qu'être cillé.
Une idée traverse alors un cerveau encombré par Antonioni et l'usage qu'en a fait Farouk Beloufa dans Nahla, (dans un tout autre registre, certes). Reste que la question du nu au cinéma se posera toujours: le nu, en peinture, ne s'encombre pas de corbeille de fruits à ses pieds, sinon il faut aller se rhabiller! Le derme a besoin de sens, peu importe la forme qu'il épouse, sinon il est au service du VOIR et non du sa-voir. C'est la différence, en Algérie, entre Slim Ryad et Tariq Teguia: entre un corps dénudé sans raison (vite censuré d'ailleurs) et un bout d'épiderme montré par Tariq Teguia, dans l'incroyable Roma oua la n'touma...C'est toute une culture. Il semble que Danielle Arbid, à deux doigts de rafler la mise (et de bonne manière!), ait cédé à l'envie folle de vouloir frapper les esprits avec des corps livrés à l'abattage.
L'Empire des Sens de Mishima avait pourtant bien balisé le chemin (si on veut oublier Michelangelo A.). Les corps ne peuvent frapper les esprits dans leur nudité, que s'ils ont une âme; or, dans ce film, ces corps n'ont pas d'âme. On n'entend pas leur petite musique. A moins que la réalisatrice ait voulu dire combien l'âme féminine dans nos contrées a été évidée par des hommes toujours prompts à édicter aux femmes arabes leur conduite, fidèles ainsi à leur rôle de tuteur patenté. Dans ce cas-là, le film de Danielle Arbid en évoquant ces corps perdus ferait aussi allusion à ceux des hommes. Etant entendu que si l'un se perd l'autre l'est aussi. D'évidence.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.