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Le monde arabe en danger
ENTRE FUITE EN AVANT ET REGRESSION
Publié dans L'Expression le 26 - 06 - 2008

«Comment assurer la bonne gouvernance, préserver nos richesses naturelles des convoitises et développer nos richesses en capital humain?»
Qui se souvient de la nécessité d'un projet de société, d'études prospectives, de vision d'avenir? En Occident, depuis au moins cinquante ans les analyses sur les évolutions, tendances et changements ont priorité. En 1972, paraissait, par exemple, le fameux Rapport du Club de Rome dont le monde intellectuel en rive Sud a entendu parler mais que peu ont vraiment lu. Pourtant, il dessinait le futur sur les plans économique et scientifique. Son cas est d'ailleurs représentatif de la façon dont l'information scientifique et technique se diffuse aujourd'hui dans le monde arabe: nombre de gens entendent parler de ce qui fonde les débats sur l'avenir, l'évolution des relations internationales, la culture, la médecine, l'économie, le dialogue interreligieux et tant de disciplines, mais peu prennent le temps d'aller à l'information spécialisée et de lire avec un esprit critique les travaux universitaires.
Comprendre ce qui se passe
Pourquoi avons-nous abandonné le goût de la lecture et de la recherche prospective? Peu d'ouvrages sur les questions de fond sont publiés. Seule une lecture rapide de médias occupe les esprits. Pourtant il n'y a pas d'avenir sans pensée approfondie. Il nous faut prendre exemple sur les grands travaux et rapports. Au moment de sa création en 1968, le Club de Rome regroupait une poignée d'hommes occupant des postes relativement importants dans leurs pays respectifs (un recteur d'université allemande, un directeur de l'Ocde, un vice-président italien d'entreprise informatique, un conseiller du gouvernement japonais...). Tous souhaitaient que la recherche s'empare du problème de l'évolution du monde pris dans sa globalité pour tenter de cerner les limites du modèle dominant. Ce ne sont pas les membres du Club de Rome qui l'ont rédigé mais une équipe de chercheurs du Massachusetts Institute of Technology (MIT) aux USA, constituée à la demande du Club. Le rapport paru en français sous le titre Halte à la croissance traduction du titre anglais: The limits to growth, est un document de synthèse présentant les principaux résultats du travail effectué. Les universitaires du MIT ont essayé, avec l'aide de l'informatique de l'époque, de mettre l'humanité en équations et d'élaborer un système rendant compte de l'évolution du système socio-économique de 1900 à 2100. Leur objectif était de comprendre ce qui se passait.
La première crainte de ces scientifiques portait sur la production de ressources non renouvelables. La seconde, trente ans avant les dérives du système libéral, soulignait que le monde pourrait s'effondrer faute d'être capable de préserver ses ressources et d'épurer les déchets. En prenant une hypothèse de ressources naturelles abondantes, une autre simulation montrait que le système se détruisait alors par la pollution engendrée par la production de sous-produits liés à cette consommation effrénée des ressources naturelles. Nous avons tendance à tort de considérer que notre système va durer. Le point sur lequel le Club de Rome voulait nous alerter en 1972, c'est que, parce qu'il se nourrit de la dégradation du capital naturel et non de ses seuls intérêts, la logique tendancielle du système est son effondrement et non point la croissance perpétuelle. Avec trente-cinq ans de recul, non seulement les ressources énergétiques et le climat se sont dégradés, mais surtout la nature humaine, soumise aux risques des manipulations de toutes sortes, génétiques et politiques, est angoissée et désorientée. Les liens sociaux se sont affaiblis, voire coupés de toute forme de cohérence, les crispations et les justices dominent. L'ensemble marqué par une violence sourde, inouïe et un monde que l'écrivain Orwell avait prévu au milieu du XXe siècle, dans un livre intitulé 1984 où le totalitarisme s'imposait sous des formes nouvelles.
Les batailles, les guerres en ce XXIe siècle seront celles de l'eau, de l'air pur et frais, de l'énergie et culturellement des symboles sacrés. Du point de vue de l'énergie, il n'y a pas grand-chose de nouveau sous le soleil depuis que l'homme a domestiqué le feu il y a 500.000 ans. Les renouvelables sont beaucoup plus anciennes que les fossiles. Quand on parle de nouvelles énergies, on peut dire anciennes énergies. Même le pétrole et le charbon sont connus depuis des milliers d'années. Mais ce qui a changé entre cette époque ancienne et l'époque actuelle, ce sont les utilisations et les ordres de grandeur. Ce sont justement ces ordres de grandeur qui modifient radicalement la nature des problèmes et les conclusions qu'il convient d'en tirer. Tant que l'on ne s'est pas intéressé au nombre de zéros, aux statistiques, aux faits, on n'a pas quitté le niveau de la conversation superficielle. Et lorsqu'on est chargé de gérer l'avenir, il faut aller au-delà et vérifier les détails, les enjeux et les équations, surtout que les incertitudes et les improbabilités sont grandes. Le monde arabe, malgré son hétérogénéité, semble s'enfoncer dans la régression, ou l'imitation de modèles en crise.
Le premier facteur à avoir changé en l'espace de trois mille ans, comme le remarquait déjà Ibn Khaldoun, renvoie à un débat difficile celui de la population. Depuis que notre espèce s'est sédentarisée, la population a été multipliée par un facteur 1000. L'essentiel de cet accroissement a eu lieu depuis le début de la révolution industrielle. Dans 30 ans on sera sept milliards. Question qui mériterait un débat: est-ce rendre service à la pérennité de l'humanité que d'encourager un tel accroissement? Toute la place et l'épuisement de ressources que nous enregistrons aujourd'hui, c'est pour partie autant qui ne sera pas laissé à des êtres humains plus tard. Ensuite vient l'échelle de temps qui nous intéresse lorsqu'on est concerné par le développement durable: combien de temps doit effectivement durer l'évolution considérée? Si la réponse est plusieurs décennies pour atteindre un niveau convenable, la question de la taille de la population est alors centrale.
Le deuxième changement d'ordre de grandeur, qui a eu lieu depuis la révolution industrielle, c'est l'augmentation de la quantité d'énergie consommée par personne. En physique, nous explique un spécialiste «l'énergie est la grandeur qui permet de caractériser un changement d'état d'un système. Elle intervient quand on change une température, une masse, une vitesse, une composition chimique, une nature atomique. Dire que l'homme consomme de plus en plus d'énergie, cela n'est rien d'autre que de dire que chacun d'entre nous possède une aptitude croissante à modifier physiquement le monde qui l'entoure. La consommation d'énergie est ainsi un excellent indicateur agrégé de la pression sur l'environnement». Durant la deuxième moitié du XXe siècle, la consommation d'énergie primaire par habitant a été multipliée par trois. La croissance économique forte de cette période a été corrélée avec une forte croissance de la quantité d'énergie consommée par personne, donc de la pression agrégée par personne sur l'environnement. Le monde développé détruit la nature et réduit les possibilités d'un épanouissement équilibré. Question: allons-nous pouvoir continuer ainsi? Notamment pour les pays du Sud qui dépendent à 97% des ressources énergétiques.
Revoir notre relation à l'ordre mondial
La production cumulée de pétrole, entre le moment où les premiers puits de pétrole en 1859 étaient creusés et le moment où il n'y aura plus personne pour en extraire, ne pourra en aucun cas dépasser la fraction extractible des découvertes cumulées. On peut se demander: à quand alors le maximum de production de pétrole au plus tard - Même s'il est souhaitable, pour des raisons liées à l'environnement, de ne pas attendre le pic de production lié aux contraintes géologiques. En matière d'extraction d'hydrocarbures, nul n'est plus proche des informations primaires que les opérateurs pétroliers et les techniciens qui travaillent dans ce domaine. Ce qu'ils disent mérite donc la plus grande attention. Les plus pessimistes estiment que nous sommes déjà au pic de production, les plus optimistes parlent de 2030. A la vitesse croissante que le monde consomme les énergies fossiles, avec plus 2% d'augmentation par an, seront épuisées toutes les réserves trouvées, charbon compris, dans 50 ans. Nous avons, au plus, tard vingt ans pour nous préparer à une autre vie, un autre système. Demain commence aujourd'hui. Le monde arabe, soumis aux fuites en avant, aux pressions et aux ingérences extérieures, est en danger, pour la plupart des régimes, ni la jeunesse, ni l'élite scientifique ne sont au pouvoir, tout en sachant que la politique est un art complexe. L'arrivée probable en 2009 de Barack Obama au pouvoir aux USA devrait être une opportunité positive pour revoir notre relation à l'ordre mondial, dialoguer et se réformer pour se mettre à l'écoute de la société. L'Algérie a tous les atouts pour être à l'avant-garde du progrès en rive Sud. Non seulement on peut se demander: «Que devient le prix de la ressource dans ce contexte?», mais surtout:
«Comment assurer la bonne gouvernance, préserver nos richesses naturelles des convoitises et développer nos richesses en capital humain?» On ne peut se poser la question du prix des ressources énergétiques sur un marché qu'à partir du moment où il y a un marché. Mais il y a une illusion de marché: la régulation, malgré les efforts des producteurs, se fait de manière sauvage et volatile; quasi-monopole des firmes multinationales, spéculation, rationnement, restriction, fermeture des frontières, conflits. La dernière réunion internationale à Djeddah sur le pétrole en est la preuve. La question du pétrole ne concerne pas seulement des générations futures à venir dans un monde lointain, mais celle d'aujourd'hui. Si le prix du pétrole s'emballe, si cette énergie s'épuise trop vite, si notre monde connaît une récession profonde, la responsabilité incombe avant tout aux sociétés riches et non à celles des déshérités. Sans fuir nos responsabilités, on peut affirmer que les conflits les plus meurtriers du XXe siècle et les causes des inégalités entre le Nord et le Sud ont été le fait des pays riches, pas des pays pauvres. Les pays riches sont à l'origine des problèmes, par exemple du point de vue du stock de gaz à effet de serre d'ores et déjà libéré dans l'atmosphère; ce sont les pays en voie de développement qui seront touchés à la fois les premiers et le plus fortement. Reste en conséquence à se méfier des modèles dominants, tout en assumant nos tâches et en tirant les leçons de leurs acquis et progrès. L'absence de bonne gouvernance, de visions prospectives et la faiblesse des reformes de l'éducation sont une catastrophe pour les pays du Sud.
Toutes les considérations sur la mondialisation n'ont pas assez mis l'accent sur l'alternative en matière d'éducation. Tout comme les études sur les ressources énergétiques ont été faites jusqu'ici sans prendre en compte les menaces que font peser sur le climat, l'écologie et la santé les émissions de CO2, principal gaz à effet de serre. Le développement ce n'est pas seulement celui du PIB, mais du niveau de conscience. Tout comme le climat n'est pas la météo: l'élément principal de variabilité du système, c'est l'atmosphère. Mais quand on s'intéresse à des évolutions sur des échelles de temps long - le siècle par exemple - c'est le global qui domine. S'il n'est pas le seul, l'homme est une des causes de perturbation du système climatique et social. Compte tenu des ordres de grandeur en jeu, il est en train de devenir le facteur dominant de perturbation à l'échelle du siècle. Le comportement est celui des prédateurs. la question du développement durable ne se borne pas à savoir comment faire durer notre monde en l'état. Notre «monde» ne va pas bien et ne va pas durer! La crise est profonde, le monde arabe a besoin de rigueur, de faire un vrai diagnostic de son présent, afin de préparer l'avenir sur tous les plans. Les pays du Sud subissent et improvisent alors que des richesses existent. Si nous attendons que la contrainte de ressources nous force à passer le cap, nous n'aurons alors pas un problème qui en aurait évacué un autre, mais trois en même temps: un problème exponentiel d'environnement, celui des ressources décroissantes et l'hémorragie sans fin des élites. Le tout produisant une insécurité chronique. Tant que l'on n'a pas donné une importance majeure à la double question: valorisation de l'éducation et maîtrise des énergies, on passera à côté du problème, donc à côté des solutions. On doit préserver nos énergies, et développer au maximum nos ressources humaines. Cela ne pourra se faire sans ce qui manque le plus: la participation des citoyens, l'ouverture, le dialogue.
(*) Professeur des Universités
www.mustapha-cherif.com


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