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Maâtkas, pourquoi?
MISÈRE, RAPTS ET RANÇONS
Publié dans L'Expression le 06 - 07 - 2008

L'apparition du phénomène des enlèvements a marqué, ces dernières années, la scène sécuritaire en Kabylie.
La wilaya de Tizi Ouzou bordée au nord par la Méditerranée et au sud par le Djurdjura, jouxte en fait plusieurs wilayas: à l'est, elle partage les limites avec Béjaïa, à l'ouest avec Boumerdès et au sud avec Bouira. Tizi Ouzou est une wilaya avec une forte densité de population avec des habitats caractéristiques, la plupart assemblés en gros villages, ou encore en hameaux accrochés aux flancs du Djurdjura. Avec des villes situées soit dans la vallée comme la capitale régionale: Tizi Ouzou ou encore Draà Ben Khedda, Draà El Mizan, Boghni, Ouadhias ou encore Fréha et Azazga ou au bord de la grande bleue comme Tigzirt et Azeffoun. D'autres telles Larbaâ Nath Iraten, Aïn El Hammam ou Bouzeguène.
Le paysage vaut le coup d'oeil et les villes ainsi que les plus petits des hameaux sont généralement lovés dans un paysage magnifique. Longtemps comparée à la «Suisse» pour ses paysages et la sensation de liberté que l'on ressentait face à d'autres régions du pays alors sous le joug de la violence, la wilaya de Tizi Ouzou n'a pas tardé, elle aussi, à sombrer dans une période difficile. Assassinats, violence, kidnappings, vols et agressions ont été et sont encore, en certains endroits, le lot des braves gens.
Avec l'ouverture politique, la région faisait plaisir à voir. Les débats politiques alternaient avec les activités culturelles liées à ce qui fut le grand Mouvement culturel. Les gens suivaient avec gourmandise aussi bien les activités partisanes que les activités culturelles. Durant l'été 1989 un grand week-end culturel était organisé par le MCB à la Maison de la culture Mouloud-Mammeri. Il semble que depuis, jamais pareille louable initiative ne put être organisée, au grand dam des populations.
La violence atteint la «Suisse»
Plus tard ce fut l'université, le coeur palpitant du MCB qui prit le relais, les anniversaires du 20 avril furent autant de fêtes et les activités des partis étaient alors suivies par les foules. Mais c'était sans compter avec les adeptes de la violence. Des incursions ont commencé à être signalées dans quelques villages, des gens en armes se faisaient voir dès les années 1992 et les gens se disaient que le temps de l'insouciance était terminé. Certes, les gens dans les villes et villages étaient très tôt gagnés à l'idée démocratique mais que faire devant ces gens armés?
Les Kabyles adoptèrent des visions divergentes face à ces gens venus la plupart d'ailleurs et qui disaient lutter contre le «taghout» un terme que nul n'arrivait à comprendre car sonnant faux! Il n'avait pas fallu attendre longtemps pour comprendre qu'en fait, ces «nouveaux combattants» étaient tout simplement induits en erreur pour la plupart, ou encore «des aigris»; qui rêvaient de restaurer le Khalifa, pour d'autres. La vie de tous les jours, les problèmes de la quotidienneté, les libertés autant individuelles que collectives étaient alors foulées au pied.
Des bombes ont commencé à exploser aussi bien à Tizi Ouzou que dans les petites villes et sur les routes de la région, des assassinats furent commis et la violence s'installa. On se demandait d'abord que faire et ensuite on essayait de comprendre le pourquoi de la chose. Les fusils de l'honneur commencent à hérisser les pitons de Kabylie, arrivant à se fondre dans le paysage et à assurer tout de même une certaine sécurité. Les villages s'organisent et les entrées des «étrangers» dans les villages très surveillées par les comités des villages. Tadjemaït revêt un autre burnous pour garantir la sérénité de tous. Mais la partie adverse, les chevaliers du fiel et les égarés des temps de jadis qui rêvaient d'installer en Algérie un état digne des temps de l'Arabie Heureuse veillaient. II est vrai que la région attirait, de par son relief et ses massifs, tous ceux qui ont pris les armes contre leur propre pays. Les massifs de la Mizrana, de Boumahni, de Sidi Ali Bounab, d'Amjoudh ou encore ceux de Yakouren et du Boudjudjura commencèrent à se peupler d'individus au comportement aussi étrange que leur accoutrement et leurs mobiles. Les gens ont alors adopté une nouvelle façon de combattre ces bandes armées, Ils commencèrent par les ignorer, chacun chez soi! Cependant, la situation évolua et les bandes se firent plus «entreprenantes».
D'abord des faux barrages, puis des incursions, notamment dans les bars et enfin des assassinats et des enlèvements. Certes le temps des bombes est pratiquement derrière nous, la mobilisation des forces de sécurité et l'efficacité des forces de l'ordre sont pour beaucoup dans cet état de choses. Désormais, les ratissages se multiplient ne laissant aucun répit aux groupes armés; ensuite, en ville ce sont les démantèlements des groupes de soutien au terrorisme qui sont en fait les yeux et les oreilles des éléments armés.
L'apparition du phénomène des enlèvements a marqué, ces dernières années, la scène sécuritaire en Kabylie. Des commerçants, des entrepreneurs, des gens plus ou moins aisés ont été kidnappés pour n'être libérés que contre le paiement d'une rançon souvent forte.
Ces enlèvements sont expliqués par les observateurs de la scène sécuritaire, comme une tactique des groupes armés afin de ramasser des cagnottes, car les gens dans la région refusent pour la plupart de payer l'impôt terroriste appelé djizia. Aussi, les groupes armés pour renflouer leurs caisses y recourent. Les personnes enlevées le sont généralement dans des endroits isolés ou lors de faux barrages. Des bribes d'informations récoltées ici et là auprès des gens proches de ces kidnappés libérés nous ont fait savoir que généralement, les victimes sont prises non pas au hasard, mais sur indications comme pouvant payer telle ou telle somme. Quelquefois, il arrive que des homonymes soient enlevés et vite relâchés par les ravisseurs après avoir découvert leur méprise. Ces kidnappés sont alors conduits, souvent les yeux bandés, dans des endroits «sûrs», généralement quelque caverne ou quelque autre cache dans les massifs forestiers. Les ravisseurs utilisant généralement le mobile du kidnappé, entrent alors en relation avec la famille.
C'est ainsi que s'ouvre un épisode des plus cocasses n'était la gravité de la chose! On discute, on négocie, on s'accorde enfin sur une somme et surtout on fixe l'endroit ou plutôt la manière par laquelle l'argent sera déposé. Une fois la rançon empochée, les ravisseurs libèrent leur victime qui est, en sus, autorisée, dit-on, à se rapprocher des services de sécurité pour déposer plainte et donner peut-être les renseignements adéquats. Des familles nous ont avoué «que la peur de perdre l'être cher encore entre les mains des ravisseurs dicte en fait tout leur comportement!» Les kidnappés sont en général relativement assez bien traités, on ne les bat pas, on les nourrit, on les rassure, on leur sert aussi des sermons mais sans plus! La grosse question que les gens se posent est de savoir pourquoi la Kabylie et spécialement la région de Maâtkas. La réponse sans doute difficile est cependant apportée par le relief et la situation particuliers de cette commune.
26 kidnappings
En effet, sur les 26 enlèvements enregistrés dans la région depuis le début du phénomène, ce sont, en tout, neuf kidnappings dont a souffert cette commune. Il faut commencer par expliquer que Maâtkas est une suite de villages et de hameaux dispersés sur le massif central de la wilaya, une région pauvre avec des terrains schisteux, la plupart en pente et donc assez peu propices à l'agriculture. Le figuier et l'olivier se partagent ces terrains.
Aussi les gens de la région se sont trouvés très tôt obligés d'émigrer vers ailleurs, là où ils pourraient essayer de faire vivre leurs familles. D'où aujourd'hui la relative présence en nombre de pensionnés en devises fortes. Un peu comme les autres régions de Kabylie, Maâtkas a traversé la guerre de Libération nationale avec beaucoup de bleus à l'âme et aussi des centaines de chouhada. La région a été l'un des fiefs de l'ALN. Aussi, Maâtkas vit de ses pensions,tant celles des émigrés que celles des ayants droit de chouhada. Comme la région ne compte pas beaucoup de postes de services de sécurité alors les terroristes et certains groupes de bandits ont trouvé là une véritable mine où ils peuvent facilement se faire les dents, sur les pauvres gens...
Mais les temps risquent fort de changer. Lassés par ces incursions et ces enlèvements, les villageois ont en face d'eux, dans la commune voisine d'Aïn Zaouïa, l'exemple des villages de Boumahni qui se sont organisés en installant des sirènes d'alarme actionnées en cas d'intrusion des groupes armés. Il est clair que les autres villages comme ceux de Maâtkas ne tarderont guère à s'organiser en conséquence. D'ores et déjà, les comités de village sont en train de réfléchir à la question A Maâtkas et ailleurs dans ces gros villages excentrés de la wilaya, les gens se posent des questions et des questions de survie. Comment, en effet, face à une agriculture quasi inexistante et à une arboriculture pratiquement délaissée et qui, selon les jeunes, «ne nourrissent plus son homme» nourrir sa famille et surtout essayer d'instruire les enfants quand le collège et le lycée sont loin de la maison.
Avec ces problèmes de la quotidienneté, il y a, en plus, ces éléments armés qui, de temps à autre, s'essaient à des incursions. Aussi, certains hameaux et villages de Kabylie, comme ceux de la région au-dessus des Ouacifs, sont désormais vides de leurs occupants, à l'exemple du village de Darna sur le flanc du Djurdjura qui est désormais déserté par les villageois. Ici le terme d'exode rural prend toute sa signification!
Des familles entières ont quitté le village pour aller s'installer, les unes à Tizi Ouzou, d'autres ailleurs et même en Europe. Seul un vieux berger gardant ses moutons, rencontré sur la route de Darna, explique avec une certaine émotion que «le village est désormais mort! Regardez ces belles villas accrochées sur le flanc de la montagne, elles sont désormais vides, fermées, leurs propriétaires sont ailleurs. Seul le silence remplit la montagne!» Ici on ne parle pas ou si peu des éléments armés; notre vieux questionné à ce propos dira: «Oui on les aperçoit traversant les lieux mais il semble que les militaires sont au courant de ces déplacements. En effet, à chaque fois c'est tout de suite la traque qui est organisée. Pour le moment les rares populations encore présentes en quelques villages de ce côté du Djurdjura n'ont aucun contact avec ces gens-là! Nous sommes si pauvres, il n'y a rien à prendre chez nous!», conclut le vieux bon homme. Finalement, deux facteurs se sont hélas unis contre les villages et hameaux de la région.
Un monde fait de douceur de vivre avec, certes, ses problèmes mais aussi avec sa part de poésie qui se meurt! Un autre monde se met en place difficilement et dans la douleur.
La wilaya attend avec une impatience certaine la venue de ces lendemains de paix et de calme avec à la clé un certain développement. Des lendemains qui verront la vie s'écouler paisiblement dans ces villages et ces hameaux qui sont le coeur palpitant de la région.


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