Qui ne connaît pas le «père» de Nedjma, l'oeuvre de 30 ans. Celui que les événements du 8 mai 1945 avaient marqué dans sa chair, puisqu'il a participé à la grande manifestation de Sétif. Brutalisé et emprisonné, à sa sortie, il est exclu du lycée. Celui qui s'est exilé en Europe en 1951 où il séjourne dans plusieurs pays comme la Belgique, la Russie (ex-URSS), l'Italie, la Chine et surtout le Viêt-Nam, pays qui l'a beaucoup marqué. Kateb Yacine, un intellectuel racé qui a défendu son algérianité dans sa diversité culturelle et linguistique, est né en 1929 à Constantine. Baigné dans l'atmosphère des traditions populaires, il a d'abord fréquenté l'école coranique qu'il a quittée très tôt pour une scolarisation au sein de l'école française laïque où il s'est forgé les vertus libératrices de l'esprit critique et les valeurs universelles. Imprégné du milieu nationaliste, Kateb adhère au Parti communiste et a exercé en tant que journaliste durant les années 40 à Alger Républicain. Il est l'un des pionniers aux côtés des Mammeri, Dib et autre Feraoun, à poser les premiers jalons de la littérature algérienne d'expression française avec sa double dimension, intellectuelle et militante. Symbole du combat pour la démocratie, la liberté d'expression et l'émancipation citoyenne, Kateb n'a ni flirté avec le pouvoir ni fait de concession aux islamistes. A l'un, il reprochait l'injustice et l'infidélité par rapport à l'esprit du soulèvement de 1954 et aux autres les idées rétrogrades et obscurantistes qui ne peuvent mener la société qu'au chaos. Ses idées claires ne souffraient aucun complexe ou amalgames dérangeant autant les uns que les autres. Il les a respectés et criées tout haut jusqu'à sa mort, dans un hôpital français à Grenoble le 28 octobre 1989. L'on se rappelle qu'à cette date, un imam - Ghazali - ayant trouvé refuge dans le pays de Yacine avait fait un prêche incendiaire contre le père de Nedjma allant jusqu'à prononcer une fatwa interdisant l'enterrement d'un communiste en terre d'Islam. Soliloques acerbes ou Le Cercle de représailles, l'homme aux sandales de caoutchouc avait voulu chasser le père de Nedjma, oeuvre en fragments de son Polygone étoilé. Il avait voulu bannir à la manière de «Mohamed prends ta valise», celui qui a fait la guerre de deux mille ans au pouvoir et aux intégristes, et au roi de l'Ouest, celui qui a glorifié la voix des femmes. Le Haut commissariat à l'amazighité (HCA), a rendu hommage au géant du théâtre et de la littérature algérienne. Une journée d'étude a été organisée sur la vie et l'oeuvre de Kateb Yacine plusieurs figures de la littérature ont participé aux débats et témoignages dont Dalila Mekki, Mohamed Lakhdar Maougal et Khadidja Khelladi.