Attaques sionistes contre l'Iran: une violation du droit international et de la Charte de l'ONU    Le CN condamne "les attaques agressives" sionistes contre le peuple iranien    Une équipe technique de la Sonelgaz en Syrie depuis avant-hier jeudi    Rima Hassane libérée !    La dépouille d'un jeune mort par noyade retrouvée    Lundi 30 juin 2025, dernier délai pour soumettre les candidatures    L'Algérien Mohamed Meridja réélu à l'exécutif    Comment la diplomatie peut-elle être une solution à l'immigration clandestine ?    La saison 2024/2025 sélectionne son champion    L'Ensemble ''Senâa'' de musique andalouse rend hommage à Mohamed Khaznadji    Des maisons de jeunes mobilisées pour accueillir les candidats durant la période d'examen    Décès de l'ancien photographe de l'APS Mahrez Amrouche    Hadj 2025/1446 : Retour du premier groupe de pèlerins à Oran    Baccalauréat 2025 : plan spécial pour la sécurisation de l'examen    Le président de la République accorde un intérêt particulier aux radios locales et à leur développement    Secousse tellurique de 3,3 degrés dans la wilaya de Sétif    Plus d'un demi-million de cartes "Chifa" actualisées au niveau des officines conventionnées avec les organismes de sécurité sociale    Lancement lundi prochain de projets de recherche algériens retenus dans le cadre de l'initiative des alliances arabes pour la recherche scientifique et l'innovation    L'entité sioniste ferme la mosquée Al-Aqsa et impose un blocus total en Cisjordanie occupée    Soirée artistique à Alger en hommage à l'artiste martyr Ali Maachi    Début de la campagne moisson-battage dans les wilayas du nord, indicateurs annonciateurs d'une récolte abondante    Les performances de la troupe "Arokass" de Djanet, parmi les principales attractions de l'Exposition universelle d'Osaka    Tour du Cameroun : l'Algérien Abdellah Benyoucef prend la deuxième place    Pétrole et gaz : rebond des prix, portés par des facteurs géopolitiques, économiques et climatiques    Mme Hamlaoui reçoit le DG de l'Office national de lutte contre la drogue et la toxicomanie    Fédération algérienne des sports aquatiques : ouverture des candidatures pour les postes techniques    Nâama: inhumation du Moudjahid Daifallah Mohamed    Voile/Equipe nationale (Laser) : huit athlètes en stage de préparation à Alger Plage    La victoire était à la portée des Fennecs !    Les dockers du port de Marseille refusent de les embarquer !    L'AFC veut investir en Algérie    Mascara rend un hommage vibrant au martyr Ali Maâchi    L'Algérie est en mesure de relever toute sorte de défis !    L'Autorité nationale indépendante de régulation de l'audiovisuel met en garde    Une nouvelle ère de rigueur pour l'investissement    Une série d'accords signés entre l'Algérie et le Rwanda    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Vers et sagesse berbères
«CHEIKH MOHAND A DIT» DE MOULOUD MAMMERI
Publié dans L'Expression le 30 - 08 - 2009

Partout dans le monde, la solitude et la misère sont les mêmes. Ce ne sont que les langues et les espaces géographiques qui changent; la nature humaine a une envergure similaire.
L'un des poètes les plus importants qu'a enfantés la région de Kabylie est sans doute Cheikh Mohand Ou Lhocine. On doit sa sortie de l'anonymat à Mouloud Mammeri. Le dernier livre qu'il a écrit, peu avant son décès, a été consacré à ce poète qui a apporté une touche confirmée à la culture orale kabyle. De même qu'une grande partie de sa pensée recèle des pans novateurs que les profanes ne connaissent pas forcément. Ce n'est sans doute pas un hasard si Mouloud Mammeri s'est intéressé de près à Cheikh Mohand. Le livre qu'il a consacré à ce dernier n'a été publié qu'après sa mort. Récemment, le Centre national de recherche préhistorique, anthropologique et historique (Cnrpah) a publié deux volumes contenant l'ensemble des écrits de Mammeri inhérents au poète. Da L'Mouloud est connu comme chercheur de terrain. Il a travaillé pendant des années pour rassembler les dits et les actes de Cheikh Mohand Ou Lhocine. L'écrivain avertit que ce qui a été collecté dans ce livre est certainement en deçà de la masse entière de ce qu'a dit le Cheikh, mais elle représente à peu près tout ce qui reste de lui à l'heure actuelle. La poésie de Cheikh Mohand a eu un effet libérateur, plus que celui qu'ont eu d'autres poètes comme Mohand Ou Saâdoun, présenté comme étant son émule.
Cheikh Mohand, contrairement à Si Mohand Ou M'hand, a connu une vie sédentaire au point qu'il n'a pas quitté la Kabylie, même une seule fois durant les soixante-dix ans de son passage sur terre. «Dans tous les sens, 100 kilomètres au plus, un îlot menu, mais il est vrai intensément dense et intensément visité. Les chiffres ici font illusion: dans ce cadre restreint, chaque colline porte un village et chaque village est un monde. Un soi bourré de valeurs, de traditions, de saints lieux, de saints hommes, de misères grandiloquentes, d'honneur ombrageux, de folles légendes et de dures réalités», écrit Mouloud Mammeri. Mais partout dans le monde, la solitude et la misère de l'homme sont les mêmes. Ce ne sont que les langues et les espaces géographiques qui changent; la nature humaine a une envergure similaire. C'est pourquoi, dès l'âge de trente ans environ, Cheikh Mohand commence à rendre compte par le verbe tout le vécu partagé avec ses concitoyens.
Contrairement à ce que pensent certains aujourd'hui, Cheikh Mohand était illettré. Tout comme les poètes de l'époque, sa production poétique était exclusivement orale. Ce poète, devenu mythique, a vécu loin des grandes cités, mais dans un minuscule village: Aït Ahmed, près de Aïn El Hammam où la vie était d'une extrême rudesse. La mère du poète, étant issue d'une famille maraboutique, permettra à son fils d'acquérir des notions dans ce domaine. Selon Mouloud Mammeri, l'une des trois soeurs du poète, Fadhma, sera son émule en sainteté et acquerra près de lui une notoriété considérable. Pourtant rien ne prédestinait Cheikh Mohand à devenir poète. Sa famille est pauvre. Enfant, il était berger. Mais plus tard, il s'initie à l'ordre El Rahmania qui est le courant le plus important dans la région de Kabylie. L'écrivain d'Ath Yenni témoigne, dans son livre, que Cheikh Mohand se distingue de la foule des adeptes ordinaires de la confrérie et parcourt tous les lieux fréquentés du pays kabyle: les marchés, les sanctuaires, les mausolées, accompagné partout d'une troupe d'adeptes férus d'extase comme lui. Puis, il grimpe la hiérarchie rahmania jusqu'à devenir le «Mokkadem» du cheikh Aheddad pour la Grande Kabylie.
Les premier vers, c'est à la face de son père que Cheikh Mohand les récite, quand on lui fait le reproche de ne pas travailler pour subvenir aux besoins de la famille. C'était une réponse cinglante sous forme de poème, qui sera prise pour un blasphème par certains auditeurs: «Mohand Larbi des Aït Lhocine, aussi vain qu'un panier de figues, tu t'en prends à des hôtes que tu ne connais pas, mais je jure par Dieu, qu'un jour tu diras: cet homme est donc un second prophète?». Le fait de se comparer au Prophète n'est qu'une rhétorique certes mais, à l'époque, on ne le prit pas ainsi.
Comme tout autre poète, le sens de la provocation est ainsi aiguisé dans la poésie de Cheikh Mohand. Ce choix est utilisé principalement pour mieux frapper les esprits. Dans le livre Cheikh Mohand a dit, Mouloud Mammeri revient en détail sur cet épisode qu'il développe et qu'il analyse. A partir de là, en plus de son statut de «Mokkadem», le Cheikh sortira progressivement «ses cartes» de poète. Puisqu'à chaque situation, à chaque événement et à chaque interpellation, ses réponses sont des poèmes ou des maximes inattendus. Quand on lui demande qui l'a institué Mokkadem, il répond spontanément: Dieu. Le cheikh est plus qu'un poète puisqu'il devient aussi éclaireur au vrai sens du terme. Il prodigue des conseils qui s'avèrent souvent utiles et salvateurs.
A un homme qui lui demandait quelle règle de conduite fallait-il adopter dans sa vie, le Cheikh répliqua: «Loue Dieu, dis le vrai, dispense tes biens, fuis le mauvais pas et ne parle pas avec les morts.» Au sujet de la dimension de moraliste de Cheikh Mohand, Mouloud Mammeri explique que les morts ensevelissent les morts, Cheikh Mohand sait que c'est la condition commune mais pour son compte personnel, il a des exigences plus ardues; sa vocation à lui est de travailler à enfanter la vérité, à donner aux hommes le sens de la vraie vie. «Car, rapporte encore Mammeri, les scrupules inutiles, la rigueur vaine, la stricte observance de rites de pure convention, le respect paresseux des vérités admises sont une forme de mort». Le livre de Mouloud Mammeri sur Cheikh Mohand est important à plus d'un titre pour plonger dans la vie spirituelle de la Kabylie. Le lire, c'est apprendre que la pensée kabyle est capable d'aller de l'avant et de se renouveler pour peu que l'on prenne conscience de ses aspects négatifs.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.