Au placard les clichés, place à la fête! Les femmes ont jeté «le voile du silence». Elles ont brisé le joug des traditions restrictives des libertés. Ainsi, elles se sont réapproprié l'expression et l'espace public. Parées aux couleurs nationales, les muses ont chanté et dansé à la gloire des Verts. A la place du politique, le football a su et pu réhabiliter la femme dans la société algérienne. Cette réhabilitation s'est faite au rythme des exploits des Fennecs. Etape ultime, la victoire contre l'Egypte. Au coup de sifflet final, des milliers de personnes ont envahi les rues algériennes. Femmes et hommes, de 7 à 77 ans, ont fait la fête pendant toute la nuit du mercredi au jeudi. Fini les cloisons entre les deux sexes, fini la ségrégation, fini les larmes en sourdine! Les youyous de joie ont remplacé les soupirs de tant de souffrances. Dans les villes, les villages et les contrées lointaines de l'Algérie, les femmes ont écrit les plus belles partitions de «L'Hymne à la joie». Qu'elles étaient belles nimbées de l'emblème national.! Les cheveux au vent. Les rossignols chantant. Les rires semant le bonheur. Les youyous fondant les coeurs. Belles et dignes. De vraies gazelles. Celles-là mêmes qui ont fait chavirer les coeurs de tant de poètes. Et la poésie ne suffit point pour les décrire. Comme les montagnes de notre pays, elles étaient majestueuses. Comme les étoiles de notre ciel, elles étaient brillantes...et filantes. Elles surfaient sur le rêve de toute une nation. Celui d'une émancipation consommée et assumée. Pourtant, «les loups qui habitent la nuit» ont failli transformer le rêve en cauchemar. La violence à fleur de peau, ils ont fait de la femme la compagne de Lucifer. Dans sa beauté, ils voyaient la malédiction. Dans ses aspirations, ils lisaient la perdition. Dans ses rires, ils entendaient la tentation. Dans ses pleurs, ils apercevaient la manipulation. Sevrés d'amour, ils ont fait de la femme l'objet de leur haine. Une projection? Sûrement! Ils déversaient sur elle toutes les peurs et les frustrations qu'ils ont accumulées. Et la femme subissait, subissait, subissait...Le sang des blessures se mêlait aux larmes de l'amertume. Le tout se passait dans un silence de cimetière. Celui où la femme assistait aux enterrements successifs de ses aspirations. Et voilà qu'un match de foot change la donne. Le but de Antar Yahia a crevé la toile sombre. A la place, une autre toile joyeuse s'est installée. Elle est peinte en vert, blanc et rouge. Elle flotte et flottent avec elle les songes retrouvés. Elle montre le visage souriant de Nedjma, la muse de Kateb Yacine. Elle sourit aux dignes héritières de Lalla Fatma N'soumeur, de Taos Amrouche, de Lalla Zineb et autres. Une toile signée «Femme algérienne».