Longtemps délaissée pour la facilité de l´importation, la production nationale, qui a durement périclité, revient peu à peu au-devant de l´actualité politique et économique du pays. En effet, la situation est devenue à tout le moins intolérable à partir du moment où l´Algérie n´a plus les capacités productives à même de lui assurer son indépendance alimentaire. D´où les sonneries d´alarme qui commencent à résonner ici et là. La manne pétrolière - qui a garanti ces dernières années nos importations dans des secteurs- clés de l´alimentation et du médicament - est appelée à s´amenuiser dans les mois à venir avec la baisse constante des prix du baril de pétrole. Mais, outre cela, le plus grave est que l´Algérie est devenue une importatrice nette de tout ce qu´elle consomme notamment dans l´agroalimentaire et le médicament. Trois chiffres-clés expliquent la détérioration de secteurs aussi stratégiques que sont l´alimentaire et le médicament. En 2008, la facture de l´agroalimentaire s´est élevée à 8 milliards de dollars alors qu´elle «n´était» que de 2,5 milliards de dollars en 2003. La facture médicale pour sa part a été évaluée en 2008 à près de 3 milliards de dollars. En 2008, selon les données du Cnrc (Centre national du registre du commerce), le nombre de sociétés exerçant en Algérie dans l´activité de l´import-export, a atteint 25.548 entreprises dont 1665 sociétés étrangères. Sur ce nombre d´«importateurs-exportateurs» 98% d´entre eux se livrent exclusivement à l´importation. Plus de 24.000 sociétés d´import-export sont détenues par les privés dont la part des importations s´est élevée en 2008 à 6,5 milliards de dollars contre environ 2,5 milliards de dollars pour le secteur public. L´importation, outre de coûter cher au Trésor public, ne crée pas d´emplois, donc ne crée pas la richesse, avec pour seuls bénéficiaires des petits groupes qui se sont incrustés dans ce créneau juteux très porteur, sans plus-value ni perspective de développement pour le pays. De fait, par ses importations massives, l´Algérie soutient la production dans les pays européens, notamment, d´où provient l´essentiel de nos importations, au détriment, bien sûr, de notre propre production agricole laissée en jachère, de notre industrie pharmaceutique étouffée et livrée aux surenchères de l´import-import. Plus grave, la santé de la population est menacée par l´importation en vrac de médicaments ou d´aliments impropres à la consommation, interdits ou périmés dans leurs pays de production qui inondent cependant les marchés algériens. C´est simple, l´Algérie est devenue ces dernières années le dépotoir de l´exédent européen. Pour revenir aux chiffres, notons ceux donnés récemment par M.Khelil, ministre de l´Energie et des Mines, selon lequel l´Algérie a, globalement, importé pour 39 milliards de dollars en 2008 pour un revenu annuel estimé à 78 milliards de dollars. Or, selon la même source, avec l´effritement continu des prix du pétrole, il faut s´attendre en 2009 à une entrée de devises évaluée à seulement 30 milliards de dollars. Il ne faut pas être sorcier pour comprendre le dilemme devant lequel vont se trouver les gouvernants: comment pallier l´argent manquant pour régler une facture de l´importation de plus en plus lourde? Pendant des années, confiants dans le pactole d´un bon matelas financier, on a laissé faire, entamant même un début de démantèlement de notre appareil industriel et de production avec des restructurations répétitives, la neutralisation de notre industrie pharmaceutique alors que l´agriculture n´en finissait pas de décliner. Le fiasco, quoi! Peut-on aujourd´hui rationaliser de nouvelles stratégies pour redonner à la production nationale tout son sens et sa raison d´être? En est-il seulement temps, quand durant des années on a joué à la cigale laissant les fourmis grignoter notre agriculture et notre industrie?