Al Qaîda semble avoir fait école après la récurrence de colis piégés envoyés à des dirigeants européens de premier plan (Nicolas Sarkozy, Angela Merkel et Silvio Berlusconi). Les colis, de faible puissance explosive, ne donnaient pas l´impression de présenter un véritable danger. Aussi, c´est sans doute la symbolique de ce geste qui est à relever, mettant en émoi la classe dirigeante européenne. Les colis destinés aux dirigeants européens ont tous été envoyés de Grèce, mettant dans un fort embarras Athènes, déjà peu épargnée par des difficultés (sociales et financières) internes. Ainsi, après l´Amérique, qui a maille à partir avec Al Qaîda, c´est au tour de l´Europe de trembler face à la montée en puissance de l´extrémisme dont certains représentants ont aujourd´hui pignon sur rue, quand ils ne sont pas directement associés, ou en charge de gouvernement. En tout état de cause, l´envoi de ces colis piégés, traduit le durcissement d´un terrorisme européen considéré, jusqu´alors, comme «soft». L´envoi des colis, interceptés par la police grecque, est attribué à un mouvement anarchiste grec connu sous le nom de «Conspiration des cellules de feu». C´est du moins ce qu´avancent les services de sécurité grecs après l´arrestation de deux suspects appartenant au groupe anarchiste. La question, qui se pose, toutefois, est de savoir pourquoi maintenant, et le pourquoi du choix de trois des plus importants dirigeants européens? Un signal? D´autant plus que dans la journée de mardi, plusieurs colis ont été envoyés à cinq ambassades à Athènes, dont celle de Russie où le colis a explosé sans causer de dégâts ni de victimes. Il n´en reste pas moins que ces faits n´ont pas manqué d´inquiéter les dirigeants européens, à l´instar du président français, Nicolas Sarkozy (lui-même destinataire lundi d´un de ces colis) et le Premier ministre britannique, David Cameron, qui ont estimé, mardi, lors d´un sommet à Londres que cette menace «est très grave» et «extrêmement sérieuse». Il est patent que lorsque des chefs d´Etat et/ou de gouvernement sont directement visés par des menaces d´attentat, la situation ne peut être que sérieuse. Or, si certaines branches de l´extrême-droite européenne passent à l´action ou font valoir leur vocation à diriger, c´est bien du fait que des hommes politiques européens - pour garder le pouvoir ou pour y accéder - leur ont emprunté langage et manières fortes. Cela a été constaté pour ce qui est des immigrés, des travailleurs étrangers, la sécurité ou même le dossier des minorités aujourd´hui pourchassées - cela s´est vu récemment en France par le renvoi brutal des Roms dans leurs pays d´origine avec lesquels, souvent, ils n´avaient plus de liens - faisant en fait le nid de tous les extrémismes. En vérité, si montée des périls il y a, c´est bien du fait des dirigeants politiques européens eux-mêmes qui n´ont eu de cesse, ces dernières années, de caresser dans le sens du poil leur extrême-droite, jusqu´à faire par son biais, leurs revendications les plus ultras. De fait, les positions, à tout le moins brutales, prises cet été par le président Sarkozy, ne lui ont pas attiré que des ressentiments. Bien au contraire. En un mot, il faisait du Le Pen sans Le Pen. D´ailleurs, le prestigieux magazine américain, Newsweek - qui consacra sa couverture de la première semaine d´octobre à Nicolas Sarkozy - estimait que le président français symbolisait aujourd´hui l´extrême droite européenne. Une droite européenne qui s´est parfaitement adaptée à la société médiatique et de divertissement, comme de la défense des intérêts de court terme, qui s´estime capable de faire un meilleur travail que ne le pouvaient ses clones qui sont au pouvoir en Europe. Dès lors, les colis piégés ne font qu´illustrer une situation d´un monde en pleine déliquescence.