L'Algérie se dirige-t-elle vers le scénario argentin, vénézuélien ou vers une autre voie? D'importants rendez-vous socio-économiques sont encore programmés pour cette fin d'année ou pour le début de celle qui est à nos portes. De leurs résultats va dépendre la stabilité du pays, sinon ses options et ses orientations économiques et sociales. L'échéance de la présidentielle du printemps 2004, dont la campagne risque d'être entamée cette fois très tôt et dès l'année prochaine, est également un élément à prendre en compte dans toute analyse ou projection sur l'avenir. Dans un contexte international empreint de récession économique inavouée presque partout dans le monde, et de guerre annoncée avec ses terribles répercussions pas uniquement dans ses théâtres d'opérations, l'Algérie, malgré son aisance financière, patauge toujours dans la crise économique, la faible croissance, le chômage et fatalement les problèmes sociaux pour ses populations. Certes, selon les responsables de la politique économique suivie par le pays, la situation de celui-ci s'améliore à la faveur de la politique de privatisations tous azimuts et des investissements des partenaires étrangers du pays dans le cadre du partenariat. Mais devant la montée sur le devant de la scène des adversaires de la politique économique gouvernementale (Ugta, partis politiques de l'opposition, représentants de la société civile) et les analyses à la limite de la crainte du Cnes, le moins que l'on puisse dire est que les options des pouvoirs publics pour un libéralisme sans limites ne rencontrent ni soutien ni encore moins d'unanimité auprès des agents économiques et des partenaires sociaux, puisque même une partie de la corporation du patronat toutes tendances confondues (la Cgeoa en tête) conteste la politique de l'Exécutif et se solidarise, ce qui est vraiment rare, avec les travailleurs. Dans ces conditions, les analystes et les prévisionnistes des affaires algériennes ne cessent de s'interroger sur les perspectives de l'économie algérienne et de ses futures options au vu d'expériences semblables et d'options économiques similaires observées dans le reste du monde. Le modèle de développement national est souvent comparé, depuis au moins une dizaine d'années, à celui emprunté par nombre de pays latino-américains (Venezuela, Argentine, Brésil ) qui après avoir «flirté» à un moment ou à un autre de leur histoire avec des expériences plus ou moins socialisantes ont bifurqué par la suite vers un ultralibéralisme sans limites. Or, les résultats de cette option sont catastrophiques. Ils se sont traduits par une faillite du système économique argentin, une instabilité politique et sociale vénézuélienne et un endettement extérieur brésilien sans fin. Il est évident que la banqueroute financière de Buenos Aires est très différente de l'épreuve de force qui se joue depuis trois semaines à Caracas entre un président Chavez se voulant socialisant dans le discours et une partie de sa classe politique libérale et conservatrice qui veut se débarrasser de lui avec l'aide de l'extérieur. Elle est également éloignée de la situation brésilienne où les 140 millions d'habitants viennent d'élire un président de gauche pour stopper les effets de la pauvreté endémique induits par justement ce libéralisme inhumain. Laquelle de ces situations peu reluisantes va connaître l'Algérie à court ou moyen terme, si elle suit à la lettre les remèdes de cheval des chantres du libéralisme et du tout marché? Pour certains analystes, de par sa position géostratégique, sa donne géopolitique et ses atouts pétroliers et gaziers, l'Algérie empruntera une tout autre voie, intermédiaire pourrait-on dire, où l'Etat ne se désengagera pas totalement de la sphère économique et gardera donc son rôle d'arbitre et d'agent régulateur, une fonction normale dans toute économie de marché digne de ce nom. Ce scénario est-il encore possible ou bien l'avenir du pays sera-t-il sacrifié sur l'autel du dogme de la libéralisation sans limites? Les prochains mois, sinon les prochaines années, nous donneront la réponse.