Le 13e Festival international de danse contemporaine s'ouvre à Alger    Le Conseil de sécurité de l'ONU échoue à adopter un nouveau projet de résolution sur Ghaza à cause du véto américain    Le président de la République préside une réunion du Haut Conseil de sécurité    Blida : Sayoud instruit d'accélérer la réalisation des projets du secteur des ressources en eau    APN : Boughali préside une réunion du Bureau de l'APN    Chargé par le président de la République, Attaf reçoit l'Envoyée spéciale du Président ougandais    Bechar : Belaribi inspecte les travaux du nouveau complexe sportif    Boughali assiste à un volet des travaux de la session de formation sur "les règles et procédures de protocole"    67e anniversaire de la création du GPRA : consolidation des principes immuables de la diplomatie algérienne    Athlétisme/Mondiaux-2025 : l'Algérien Djamel Sedjati en finale du 800 m    Le décret exécutif fixant les modalités de bénéfice du programme de la famille productive publié au JO    Classement Fifa: l'Algérie à la 38e place mondiale    Ghaza: le bilan s'alourdit à 65.141 martyrs et 165.925 blessés    Une réunion sur les nouveaux établissements éducatifs et les structures d'accueil de la petite enfance    Sayoud et Derbal en visite de travail et d'inspection dans la wilaya de Blida    Oran: ouverture du 2e Salon international du Dentaire "MDEX"    Conférence générale de l'AIEA: l'Algérie organise un événement parallèle sur les explosions nucléaires françaises dans le Sud    20e édition du festival national de la chanson amazighe attire de nombreux fans depuis son ouverture    Sayoud appelle à la poursuite des efforts avec le même engagement afin d'atteindre les objectifs fixés    Appel à une interdiction européenne de l'équipe israelienne de football    CAN de hand U17 féminin : L'Algérie s'incline face à l'Egypte    Ligue 1 (match avancé) Le MCA n'a pas eu un match facile face au MCO    Grande affluence au pavillon de l'Algérie au Salon international de l'agro-alimentaire et des boissons à Moscou    Plus de 20 agences humanitaires internationales appellent l'ONU à intervenir d'urgence    Attaf reçoit Staffan de Mistura    Onze blessés dans un renversement de véhicule    Circoncision de quinze enfants nécessiteux    Plus de 3 500 pneus destinés à la spéculation illicite saisis, quatre individus arrêtés    L'offensive israélienne sur Ghaza est « horrifiante »    Abdelkader Djellaoui insiste sur la nécessité d'élaborer un Plan d'action immédiat    M. Bouden participe en Malaisie aux travaux de l'AG de l'Assemblée interparlementaire de l'ASEAN    Festival international du film d'Imedghassen: le film algérien « Nya » remporte le prix du meilleur court-métrage de fiction    Un géant du cinéma s'en va    Djaffar Beck, le rire comme moyen d'éducation à la citoyenneté    El Bayadh Décès du Moudjahid Kherrouji Mohamed    Nouveaux ministres et innovations    Programme TV - match du mercredi 29 août 2025    Programme du mercredi 27 août 2025    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



“Ras el-aâm” d'hier et d'aujourd'hui
EL-AFFROUN
Publié dans Liberté le 02 - 01 - 2010

À moins de dix jours de la date qui marque “ras el-aâm” (correspondant au 11 janvier et célébrée durant trois jours), soit le jour de l'an berbère, seulement quelques commerçants (épiciers, marchands de primeurs du marché et du centre-ville) ont commencé à exposer timidement les friandises destinées à être consommées
le 13 au soir.
“Nous attendons pour voir. La hausse des prix a touché de nombreux produits. Nous en ramenons par petites quantités de peur de ne pouvoir les écouler à temps et dans leur totalité”, nous confie l'un d'entre eux. Un autre, la soixantaine largement entamée, qui égrène un chapelet tandis que son fils, debout, dispose en pyramide des boîtes de halva turc, nous laisse entendre, par un geste qui en dit long, qu'ils sont loin les “ras el-aâm” d'antan…
En effet, variétés et profusion caractérisaient cette tradition joyeuse qui voulait qu'on accueille l'an nouveau avec des douceurs de toutes sortes et en abondance. Le temps est, aujourd'hui, à l'austérité. “À mesure qu'on approche du 11 janvier, les points de vente se multiplieront et les prix auront des chances de baisser un peu. Ils resteront quand même élevés, cette année. Qu'on en juge : les grosses pacanes — un produit du pays — coûtent 950 DA en gros ; personnellement, je n'en ramènerai pas”, avertit un commerçant du marché.
Cette tradition est de moins en moins fêtée de nos jours ; d'une part, pour son prix de revient (d'autant que nombreuses sont les personnes qui n'en voient pas l'intérêt), d'autre part, parce que depuis le début des années 1990, elle est assimilée à une “bidaâ” (une innovation considérée comme hérétique et donc rejetée, sinon proscrite dans certains milieux).
Il y a quelques années, elle a refait surface timidement et ne subsiste plus que par la grâce et la ténacité des enfants — tous les enfants — heureux d'exhiber, le 14 au matin, à la récréation, ce qu'ils ont pu conserver de la part de friandises à laquelle ils ont eu droit la veille. La tradition n'a, de façon générale, été maintenue que par la seule pratique du “trèz” (on dit encore “drèz”, plus à l'Ouest, et “tchraz” à Cherchell), du chiffre 13, sans doute, puisque la fête gourmande qui consiste à distribuer les friandises à chaque membre de la famille se déroule, en effet, le 13 janvier (une coïncidence ?) et n'y aurait-il pas aussi un rapport entre “trêz” et la tradition provençale connue pour les “13 desserts” (fruits secs et frais, confiseries diverses, gâteaux… ) consommés au réveillon du jour de l'An ?
Le reste, ce qui marque le commencement de l'année nouvelle que fêtaient avec force conviction tous les foyers algériens, le onzième et le douzième jour du calendrier grégorien, a tout simplement été oublié, sinon dédaigné, car relevant d'une tradition qu'on dit, de nos jours, païenne, même si des personnes âgées, aujourd'hui disparues, affirmaient, il y a une vingtaine d'années, que cette pratique appelée, encore, dans la région “el aâm” ou Ennayer était déjà célébrée du temps de “syadna” (le Prophète Mohammed QSSSL et ses compagnons).
Ainsi, le 11 janvier au soir, on consommait “el h'chich” ou les herbes potagères poussant à l'état spontané et consommées comme légumes : un mélange de toutes celles qu'on apprête en plats d'hiver et qu'on allait cueillir soi-même dans les champs, le jour-même. Hommes, femmes âgées, enfants (à la sortie de l'école), se retrouvaient à travers champs, une binette, un couteau et un panier à la main pour aller chercher le maximum de variétés qui constitueront le plat du soir. Il y avait des blettes ou bettes, du chardon doré, de la mauve, de la bourrache, de l'oseille… accommodées ensemble en sauce rouge relevée avec, selon les goûts, des légumes secs (fèves, et/ou haricots, pois chiches).
Le 12 au soir, c'était un repas à base de “rich” (plumes), soit de la volaille préparée avec des petits plombs (“berkoukess”, “m'hamsa” ou “mardoud”) dont le nombre de grains symbolisait la profusion (tout comme, du reste, “errich”, innombrable) qui était de rigueur.
Dans l'après-midi du 13, on préparait des beignets dont l'odeur envahissait tous les foyers et attirait les enfants, pressés de rentrer chez eux, à la sortie de l'école.
Après le repas du soir, c'était l'émerveillement, un véritable hymne à la douceur dans toutes ses variétés et ses couleurs : le “trêz” tant attendu par les enfants. L'aïeule ou la mère, dans un cérémonial chaque année recommencé, procédait à l'étalage des gourmandises diverses réunies au fil des jours et cachées soigneusement pour le jour J. S'il y avait dans la famille un bébé, on le maintenait assis dans un grand plat en bois (“sahfa” ou “djefna”) et on déversait sur lui le mélange auquel il n'aurait pu goûter.
Tout y était : des fruits secs (noix, noisettes, arachides, amandes, figues et dattes sèches, châtaignes, glands… ), aux fruits frais (bananes, agrumes, pommes) en passant par les fruits conservés précieusement par des procédés anciens (grenades, raisin, jujubes, melon… ), aux produits exotiques (ananas, goyaves, noix de coco… pour ceux qui pouvaient se les permettre), mais encore des cœurs de palmier et confiseries diverses : pâtes de fruits préparées à la maison, “kefta” appelée aussi “halwet Meliana” (boudin à base de moût de raisin cuit), biscuits, petits-beurre, loukoums, halva turc, nougat, pralines, dragées, berlingots, caramels, sucettes, chocolats, “bli-blis” appelés aussi “lêblêbis” (pois-chiches grillés enrobés de glaçage coloré).Le partage se voulait, alors, scrupuleusement équitable sous le regard vigilant de chacun des enfants. Le “fêl” (pour le bon présage d'une année prospère et douce comme les gourmandises qu'on venait de consommer en abondance) était marqué, accompli. Pour ce faire, il ne fallait surtout pas lésiner sur la qualité, ni sur le nombre des produits. Aujourd'hui, ceux qui se forcent à fêter encore “el-aâm” se contentent d'acheter une botte ou deux blettes, au marché, un poulet plumé et éviscéré (par le passé, les femmes plumaient elles-mêmes et vidaient la volaille à préparer), et, selon les bourses et le nombre de personnes, une livre ou un kilo de friandises mélangées — généralement de mauvaise qualité — sur lesquelles trônent une ou deux pacanes, une ou deux noisettes (rarement) et quelques cacahuètes au milieu de bonbons à bon marché… Si pour les parents, cela peut constituer la ruine, du moins un bon trou dans le budget, pour les enfants, le mélange de variétés et de couleurs suffit.
L'année dernière, ils ont été nombreux à en être privés, les pères de famille n'ayant pu leur offrir ce bonheur trop cher payé. Cette année, au prix où sont les fruits frais du pays et les friandises diverses (dont la grande majorité est importée), ils seront, sans doute, encore plus nombreux à devoir s'en passer.
Les parents malheureux auront, alors, une bonne raison de parler de “bidaâ”, une notion qu'ils auront tout intérêt à inculquer à leur progéniture. Car le rêve n'est plus permis.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.