La Suisse, cantons de référendums anti-étrangers, est le laboratoire de la vague populiste et xénophobe qui a déferlé sur l'Europe. Récemment, le peuple helvétique s'est prononcé pour la privation de droit de séjour aux étrangers condamnés pour un délit grave. La nation neutre n'en est pas à sa première saillie anti-étrangère. Le processus a commencé depuis quelques années, avec les référendums sur l'asile, l'accueil des étrangers et l'immigration, en 2006, et celui sur l'interdiction des minarets en 2009. La privation du droit de séjour pour les justiciables étrangers, indépendamment de leur statut et de tous leurs droits à séjourner en Suisse, ne concerne pas que les condamnées par un jugement pour meurtre, viol, ou tout autre délit sexuel grave, pour un acte de violence d'une autre nature tel que les brigandage, la traite d'êtres humains, le trafic de drogue ou l'effraction. Les étrangers qui ont perçu “abusivement” des prestations des assurances sociales ou de l'aide sociale figurent en gras dans la liste. La loi, présentée comme une initiative populaire ( !), a été déposée comme à l'accoutumée par l'Union démocratique du centre (UDC), un parti populiste dont les initiatives ne laissent planer aucun doute sur son idéologie profondément xénophobe. C'est une formation qui prône le rejet de tous les étrangers, en priorité les musulmans. Le Conseil fédéral, qui a laissé passer la loi sur les mosquées, ne s'est pas trop bougé dans ce cas également, au prétexte que la chasse à l'étranger serait une exigence des populations suisses ! Les Suisses seraient donc majoritairement racistes et islamophobes ? Enfin, il y a des voix qui sauvent l'honneur, s'insurgeant contre l'initiative de l'UDC. Elles la jugent contraire à plusieurs clauses de la Convention européenne des droits de l'homme et en contradiction parfaite avec les accords de libre circulation des personnes que la Confédération helvétique a conclus avec l'Union européenne. Celle-ci a d'ailleurs d'ores et déjà manifesté ses plus vives inquiétudes et menacé Berne à demi-mot de remettre en cause l'avenir des négociations bilatérales qu'elle a menées depuis une dizaine d'années avec la Confédération helvétique. Et le plus grave est que les autorités fédérales devront rendre applicable cette loi de l'apartheid qui, de l'avis de juristes suisses, heurtant, et “heureusement”, selon eux, trop de garde-fous et de recours juridiques. Ce faisant, la Suisse, naguère havre de paix, devient le laboratoire de la fièvre brune qui s'abat sur l'Europe. Ses lois anti-étrangers font mouche autour d'elle. De plus en plus, les étrangers, criminels ou non, deviennent les parfaits boucs émissaires d'une Europe repliée sur elle-même. Pour la Suisse, il faut lui rappeler qu'elle doit sa prospérité au plus de 1,8 million d'immigrés qui triment sur son territoire. Ce qui est troublant, dans la Confédération helvétique qui reste la banque des étrangers, il est vrai parmi les ripoux et les prédateurs de richesses de populations du tiers-monde, c'est cette montée en cadence du racisme, honteux et dégradant. Promu par l'UDC, proche de l'extrême droite, le racisme a gagné du terrain chez un électorat que l'on n'aurait jamais soupçonné, il y a quelques années, de sympathies xénophobes. Hormis les chrétiens démocrates, fidèles aux principes humanistes de la religion, qui s'opposent au nouveau visage de leur pays, les autres partis ont plutôt l'air d'avoir fait allégeance aux thèses de l'UDC. Mêmes les libéraux, très proches des milieux patronaux et fervents partisans du néolibéralisme économique. Alors, les démocrates suisses vont-ils accepter sans coup férir la remise en cause de l'Etat de droit et les atteintes portées aux libertés individuelles qui s'appliquent, est-il proclamé dans les institutions suisses, à chaque citoyen, quelle que soit sa nationalité ?