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Ne pouvant te parler, je t'écris cette lettre qui je l'espère te parviendra.
Précurseur de l'Etat algérien moderne
Publié dans Liberté le 08 - 03 - 2011

Je suis le fils de ton petit-fils. Tu es mon ascendance et ma mémoire. Tu es la force avec laquelle j'irai encore de l'avant.
Privé de toi. Je suis rejeté comme une épave dans une houle tumultueuse vers un continent inconnu. Sans ton courage, sans ta vision poétique, sans ton regard aigu sur le monde, comment pourrais-je avancer ?
Tu es le souffle qui propulse la voile et la colère des opprimés.
Tu es la mémoire et l'exemple. Comment ton peuple errant dans cet immense désert de prédateurs, ayant perdu sa boussole et ses repères, peut-il être exemplaire ?
Je n'ai pas la prétention de retracer toute ta vie d'homme accompli, ce serait trop lourd pour moi et mes frêles épaules, mais esquisser un portait de ce que tu fus, il y a matière car ta personnalité, ton action, ta réflexion, dépassent de très loin le simple déroulement des opérations militaires.
Fin politique, habile stratège, précurseur de l'Etat algérien moderne, habité par une foi empreinte d'humilité, de tolérance et d'esprit libre, lettré et philosophe, tu exerces toujours, même un siècle après ta disparition, un ascendant certain sur tous ceux (surtout tes ennemis) qui se sont penchés sur ton difficile et glorieux parcours.
À l'heure où notre monde est confronté à des doutes, des malentendus et des amalgames, je voudrais mettre, même brièvement, l'accent sur deux aspects de ta personnalité : ton amour pour la science et ta tolérance à l'égard de toutes les croyances.
D'abord, “gardez-vous de ne faire que l'une de ces espèces d'hommes, le rationaliste et le croyant. Soyez les deux à la fois”.
Ne dis-tu pas aussi dans ton “livre des haltes” (Kitab Almawaquif), ce qui résume toute ta pensée philosophique à savoir : “Que la plénitude de la foi ne peut être atteinte sans le recours à la raison,” t'inspirant en cela d'un verset célèbre du livre fondateur de notre civilisation, le Coran, qui prescrit le savoir en toute circonstance ?
La science, tu l'aimais écrivais-tu, parce qu'elle te permettait “d'apprécier les choses par la raison, tout en te procurant une jouissance spirituelle”.
Ensuite, tu n'as cessé de prêcher, de prôner : “Les civilisations (donc les religions) doivent vivre en paix.” Et la religion étant la dimension hautement spirituelle des civilisations, est lumière et c'est l'ignorance des hommes qui la transforme en ténèbres.
Et de paix, pardon, amour, tolérance, l'homme dans son infinie bêtise la métamorphose, la mue en guerres, en exclusion. C'est pourquoi ton “Djihad”, c'est-à-dire ton combat au service de ta patrie, aura été clairvoyant, chevaleresque, sans fanatisme aucun, forçant ainsi le respect et l'admiration de tes partisans comme ceux de tes adversaires. Tu n'as jamais combattu la civilisation de ces derniers, pour laquelle tu éprouvais une admiration critique, ni leur religion que tu considérais comme une partie intégrante du patrimoine spirituel monothéiste. Ce “Djihad” était contre la domination coloniale qui empêchait ainsi ton peuple d'entretenir dans le respect de ses valeurs un fructueux dialogue avec cette autre civilisation.
Quant à ton humanisme tu n'auras cessé de l'illustrer par des actes de grandeur :
- La libération des prisonniers sans condition.
- La défense de l'opprimé.
- La défense des droits de la femme
- Ton héroïque intervention à Damas pour sauver des milliers de chrétiens des griffes fanatiques.
Et cette réponse symbole de cette grandeur faite à l'un de tes fidèles soldats :
Soldat : Emir! Quelle récompense donneras-tu pour un prisonnier ?
L'Emir : 8 pièces d'or.
Soldat : Et pour une tête coupée ?
L'Emir : Vingt-cinq coups de bâton.
Tous ces actes sont autant de preuves de ton courage et de ton respect de l'autre que tu as su magnifier dans ce remarquable poème, dans la lignée de ton Maître spirituel : l'immense Mahieddine Ibn Arabi.
“En moi est toute l'attente et l'espérance des hommes.
Pour qui le veut Mosquée où prier son Seigneur.
Pour qui le veut Synagogue.
Pour qui le veut cloches ou Crucifix.
Pour qui le veut Kaâba dont on baise pieusement la Pierre.
Pour qui le veut images.
Pour qui le veut idoles.
Pour qui le veut retraite ou vivre solitaire.
Pour qui le veut guinguette ou lutiner les biches.”
“C'est cet homme libre que tu es, impossible à confiner dans une idéologie tant tu embrasses l'universalité des croyances, ni à enfermer dans un pays tant tu dépasses les frontières et les espaces”, comme disait mon ami Abu Chakib.
Cher Emir, saches que tu occupes une place immense dans la conscience et l'imaginaire de l'humanité, pour avoir bâti les fondations de la paix dans le cœur et l'esprit de l'homme.
À l'indépendance, alors que tu reposais tranquillement sur les hauteurs de Damas, auprès de ton illustre Maître Mahieddine Ibn Arabi, sans te demander ton avis ni ta permission, nous avons violé ta sépulture et avons rapatrié ton corps, pour soi-disant parachever ce bonheur de victoire que tu avais par courage et abnégation, entamé.
Les arrière-petits-enfants de tes petits-enfants exigèrent à travers tout le pays, des rues, des boulevards, des statues à ta gloire et à ta mémoire, ce qui fut timidement fait.
Aujourd'hui, tous les Algériens te croisent à travers ces rues, ces boulevards mais personne ne sait, ne te connaît.
Cher Emir, cher aïeul,
Nous sommes un peuple qui n'a jamais eu peur d'aller au combat, même quand ces combats n'étaient pas les siens, et tu en sais quelque chose mieux que quiconque.
Nous sommes aussi un peuple qui
a peur de son histoire, et cette frayeur congénitale vient du fait que chacun de nous à l'emporte-pièce et à coups tordus, raconte sa propre histoire, le plus souvent truffée de contre-vérités, en oubliant la véritable histoire et le long cheminement du périple de ton glorieux peuple.
Cette histoire racontée aujourd'hui avec tous ses dégâts collatéraux n'est en fait qu'un règlement de comptes d'apothicaires à bout de souffle et de légitimité.
Cette histoire de partisans aigris, de clans frustrés, qui sent le rance aujourd'hui, comme hier, tu l'aurais condamnée et combattue, car si l'histoire est fidélité et loyauté, elle est aussi, par sa mémoire, rancunière et c'est pour cela qu'elle est difficile à vivre à présent pour ton vaillant peuple.
Cher Emir, cher aïeul
J'ai oublié de te dire la noble fonction de ton arrière-petit-fils : “Je suis un meddàh ! Un griot ! Cela te fait sourire ! Je fais des images, comme tu l'as dit : “Pour qui le veut images .” Alors je te demande la permission de raconter en images, dans un film, ton histoire, ta grandeur, tes joies tes peines, tes douleurs, tes victoires et tes échecs. Raconter l'Emir Abd El-Kader, combattant et poète de la liberté, vaillant guerrier du sabre et de la plume, émérite cavalier d'une époque sans gloire où les soumissions le disputaient aux félonies et aux trahisons. Raconter avec dévotion, admiration et panache ton vécu, pour raviver ta grandeur et celle de ton peuple. Afin que tes arrière, arrière-petits-enfants puissent voir, savoir, et connaître l'extraordinaire aventure de cet homme pétri de vertu qu'est “l'Emir au cheval noir”, leur aïeul, héros de la nation, malheureusement méconnu par eux de nos jours. Je leur raconterai comment ce pur produit de la civilisation islamique, fasciné et époustouflé par la technologie moderne de l'Occident, était arrivé au seuil de l'hiver de sa vie à cette conclusion : “C'est bien beau la machine, mais rien ne vaut l'homme.”
Dans cette conclusion du combattant de la foi, du poète, de l'homme de science, du savoir et de la générosité, il y a tout le renouveau de l'islam simple et tolérant, de l'islam du Prophète et des califes, de cet Islam que tu appelas : “Harmonie entre les Hommes.”
Il serait souhaitable que mon film au-delà de la merveille du spectacle et du passionnant récit d'une existence exemplaire, serve, si peu que ce soit, à l'établissement de cette harmonie.
Très cher Emir, très cher aïeul,
Mais voilà, au moment où je t'écris cette missive, tu es en prison, mis en geôle dans l'isolement le plus total, sans lumière ni droit au parloir par un Etat que tu as créé, et qui t'a totalement ignoré. Certains de tes geôliers sectaires, gardiens zélés d'une ombre qui leur échappe, tirent à vue et sans sommation sur tous ceux qui t'approchent. Ils veulent faire de ta gloire un fond de commerce, nous voulons faire de cette gloire un fond de mémoire.
Seule, contre vents et marées, une humble fondation, sans moyens, ni considération, tente aujourd'hui, de maintenir vivace la flamme de ton fascinant personnage. De jour en jour cette flamme s'amenuise et risque un jour de s'éteindre pour toujours, malgré l'effort de tous ses membres. Cette fondation de ceux qui t'admirent, t'aiment et te vénèrent, et pour cause, a pris depuis longtemps son courage à deux mains afin d'essayer de transmettre cette affection et cette administration, fruit de ton incommensurable héritage à la jeunesse algérienne et du monde entier en perte de repères.
Grâce soit rendue à tous les membres de cette bénéfique fondation. Les clercs qui t'ont mis en geôle, n'arrivent pas à comprendre, que toi enchaîné et en prison, ceux sont tous les Algériens qu'on enchaîne, qu'on muselle, qu'on emprisonne. La force d'un symbole est d'être libérateur, mais, aujourd'hui, tu es et tu restes le symbole à libérer.
Je t'en fais, nous te faisons le serment devant celui qui commande à toutes choses, très cher Aïeul
Ton arrière-petit-fils


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