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Les spin doctors du Net : la vraie vie de la Gay Girl in Damascus
L'affaire de la “bloggueuse” Syrienne
Publié dans Liberté le 02 - 07 - 2011

Rapide rappel des faits. Le 19 mars, celle qui affirme parler sous sa propre identité, Amina Arraf Abdullah, une jeune femme syro-américaine, ouvre son blog. En anglais, A Gay Girl in Damascus tient la chronique des manifestations en Syrie, lesquelles commencent
“officiellement” le 15 mars. (En réalité, les premiers appels à manifester, diffusés sur Facebook – qui n'est pas encore redevenu légal – remontent au début du même mois.). Au fil des semaines, A Gay Girl in Damascus attire de plus en plus l'attention des médias, notamment à la suite d'un billet, publié le 26 avril. Intitulé My father, the hero, il raconte comment la courageuse militante échappe à l'arrestation grâce à l'intervention, non moins courageuse, de son père auprès de “deux jeunes hommes, d'une vingtaine d'années, vêtus de vestes en cuir noir…”
Pour quelques observateurs, ce best-seller du Web, si on peut oser l'expression, suscite alors les premières interrogations. Amina a beau annoncer qu'elle va entrer dans la clandestinité, ils mènent l'enquête, y compris lorsqu'un billet, mis en ligne par “une cousine”, annonce, dans les premiers jours de juin, l'arrestation de la jeune femme. Sous un déluge de twitters affolés et alors que la page Free Amina Abdulla (sic ! en principe il faut un “h” à la fin) sur Facebook réunit déjà près de 15 000 membres, le Guardian, qui a largement contribué à la célébrité de la jeune lesbienne damascène (voir par exemple A Gay Girl in Damascus becomes a heroine of the Syrian revolt, publié le 6 mai) fait part de ses questions, dès le 8 juin. Le 12, le véritable auteur est démasqué : Tom MacMaster, un Etasunien de 40 ans inscrit en master à l'université d'Edimbourg, écrit un dernier billet, à ce jour (le 13, depuis Istanbul) ; il y présente ses excuses aux lecteurs. “Mis en ligne par Amina”, le billet, qui explique en gros que lui, Tom, n'a jamais eu l'intention de mal faire mais qu'il s'est fait prendre à son propre jeu, se termine par un appel au soutien des véritables héros, ceux qui font la révolution dans le monde arabe : I want to turn the focus away from me and urge everyone to concentrate on the real issues, the real heroes, the real people struggling to bring freedom to the Arab world. I have only distracted from real people and real problems. Those continue ; please focus on them.
Amina de Damas :
la vie après la mort
Fin de l'histoire ? Pas tout à fait car, sur Facebook parfois si empressé à faire le ménage dans ses pages (notamment pro-palestiniennes, voir ce billet), le groupe Free Amina Abdulla est toujours accessible, tout comme le blog d'Amina, l'homosexuelle de Damas. Pas vraiment mortifié par ce qui lui est arrivé, Tom MacMaster s'est contenté de supprimer quelques billets (notamment celui qui annonçait l'arrestation de son “héroïne”). Il a surtout modifié le titre, qui est désormais présenté entre guillemets (“A Gay Girl in Damascus”) et suivi d'une “précision” : an illusion.
Ce dernier sous-titre, fidèle à sa ligne de défense (Amina est une fiction, mais en quelque sorte “plus vraie que nature”) est explicité par une courte phrase, elle aussi rajoutée par rapport à la première présentation du site, disant en gros qu'on aurait tort de s'en prendre à celui qui a su vous émouvoir en racontant une histoire qui s'avère ne pas être la réalité : The Image is not the Real ; When you realize that you were reading a story, rather than the news, who should you be angry at ? The teller of tales that moved you ?
Enfin, tout en bas de la page qu'il faut faire défiler en entier pour les faire apparaître, quelques lignes, avant les crédits du site, précisent que le blog est une sorte de “fiction interactive”, solidement basée sur des faits authentiques, même si Amina, création de l'auteur, n'est, elle, qu'une fiction :
About this blog
This blog was designed as an interactive fiction. The news, historical and social information contained in it is based solidly on fact. However, the narrative voice, that of Amina A., is fictitious. Her character is based on many real people but in no way is she meant to represent any single real individual, living or deceased. She is the sole creation of the author of the blog.
Donner une voix à Amina
Comme se le demande à haute voix ou presque Brian Whitaker, le journaliste vedette du Guardian : pourquoi diable un homme marié en Ecosse voudrait-il se faire passer pour une lesbienne vivant à Damas ? Le jour même, deux jeunes journalistes d'origine arabe (cela importe par rapport à leur analyse), Ali Abbas et Assia Boundaoui, proposent une réponse : pourquoi cette fiction précisément et pourquoi un tel succès ? Plutôt qu'on ne sait quelle théorie du complot (même si des questions restent posées), ils s'intéressent à la signification “profondément” politique de cette mascarade en définitive assez obscène qui voit un “vieil étudiant” passionné du Proche-Orient se glisser dans la peau d'une jeune Syrienne désirable.
Si ce fantôme virtuel [cyber ghost] a été adopté si facilement par les medias et les lecteurs attentifs, c'est parce qu'il est emblématique de tous les clichés qu'utilisent les Occidentaux qui se placent dans la position d'interprètes éminents de la société et de la culture moyen-orientales. (…) Il ne devrait pas y avoir besoin de l'histoire fictive d'une lesbienne syrienne pour affirmer les droits des manifestants syriens qui sont actuellement atrocement réprimés par les instances gouvernementales.
Mais si l'objectif est de susciter l'émotion et de distraire, alors MacMaster a réussi à prouver que la vérité sur les Arabes passe après la perception et les sentiments qu'ont les Occidentaux à leur égard.
Les réseaux sociaux et leurs légendes… De ce point de vue, on ne peut qu'alerter sur les dangers d'une croyance trop naïve et trop facile dans les vertus des réseaux sociaux et leurs pouvoirs révolutionnaires : d'un côté, certaines scènes arabes nous montrent leurs limites tandis que, de l'autre, un peu de vigilance nous révèle que tous les côtés de la Toile ne sont pas toujours très nets… Internet – tout à fait officiellement désormais que le Pentagone envisage de considérer une cyber-attaque comme un acte de guerre formel – est désormais un champ de bataille virtuel. Un champ de bataille où les lignes de front se dessinent selon des stratégies qui s'appuient sur des sortes de “cristallisations” créées au sein de la Toile par des récits qui y prennent corps mieux que d'autres, au point de devenir des sortes de légendes qu'il n'est plus guère possible d'interroger… Au fur et à mesure qu'Internet gagne en importance, en puissance, et en histoire, il est à craindre qu'il perde de son innocence et qu'il devienne soumis à des techniques, à des programmations à des manipulations, capables d'y recréer, artificiellement, les “coagulations de sens” que sa logique technique favorise, en quelque sorte naturellement. Les spin doctors du Net, ces conseillers en communication politique d'un nouveau type, sont déjà à l'œuvre.


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