Les élections locales de jeudi dernier se sont tenues conformément à la norme algérienne : abstention majoritaire, bourrage des urnes, dépassements en tous genres et fraudes multiformes ont été au rendez-vous. Largement rapportés par la presse, confirmés par l'instance officielle de surveillance du scrutin, quelquefois filmés et mis sur la Toile par des citoyens et dénoncés par l'écrasante majorité des partis en lice, ces faits ont été minimisés, voire occultés, par le ministre de l'Intérieur qui s'est contenté d'annoncer les résultats de la consultation... comme si de rien n'était. Mais fallait-il s'attendre à mieux alors que le Premier ministre avait avoué, vingt-quatre heures avant le vote, que l'Algérie n'avait pas de fichier électoral “valide" ? Fallait-il s'attendre à mieux alors que M. Ould Kablia avait annoncé le juste taux de participation, plusieurs jours avant le scrutin, sans même s'appuyer sur le moindre sondage ? Fallait-il s'attendre à mieux alors qu'un chef de parti nouvellement créé, insignifiant aux législatives de mai dernier, s'était adjugé par avance la position de 3e force politique du pays ? Dès lors, devons-nous, en tant qu'observateurs, faire aussi... comme si de rien n'était et s'adonner à des lectures de chiffres qui résultent de malversations et de triturations avérées ? Certains s'y sont déjà mis, à leurs risques et périls. Souhaitons-leur bon courage. S'il y a bien un paramètre qu'il conviendrait d'analyser dans les élections de ce 29 novembre, c'est bien, encore une fois, cette tendance grandissante des Algériens à bouder les bureaux de vote et, pour ceux qui s'y rendent, à glisser dans l'urne un bulletin nul sur lequel est généralement gribouillé un slogan éloquent, un nom d'oiseau ou, quelquefois, une obscénité. Additionnés, ces abstentions massives et ces bulletins nuls équivalent à plus de 13 millions d'électeurs, soit 61% des Algériens en âge de voter, qui livrent ainsi un seul message : nous ne croyons pas aux élections selon la norme algérienne. L'écrasante majorité des Algériens ne croit donc ni à “la victoire du FLN", ni à la “déroute des islamistes", ni au “recul du PT", ni à cette “montée fulgurante" d'un parti qui se veut un néo-RND. Encore moins à ces “réformes" qui perpétuent la fraude et les aberrations politiques. Ces 13 millions d'Algériens ont voté. À leur manière. Et leur vote est assurément le seul qu'il convient de retenir : ils se sont exprimés pour le changement.