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EXCLUSIF : Mourad Preure (*) à “Liberté"
“L'Algérie pourrait disparaître en tant qu'exportateur de gaz en 2020"
Publié dans Liberté le 23 - 01 - 2013

Ce spécialiste des questions énergétiques analyse dans un entretien exclusif le texte portant amendements à la loi sur les hydrocarbures, situe les enjeux du développement des ressources nationales en gaz de schiste et surtout aborde les défis que doit relever l'Algérie pour faire face à ses besoins énergétiques à moyen et long termes et soutenir un niveau d'exportation d'hydrocarbures compatible avec notre position traditionnelle, à savoir demeurer un acteur majeur sur la scène énergétique internationale.
Liberté : Comment analysez-vous le texte portant amendements à la loi sur les hydrocarbures ?
Mourad Preure : Le nouveau texte est à situer dans le contexte d'une profonde restructuration de l'industrie pétrolière et gazière internationale. L'Algérie doit s'adapter aux réalités de l'industrie pétrolière internationale avec les restructurations en cours et la concurrence entre producteurs pour attirer les partenaires. Après avoir stagné entre 2009 et 2011, l'investissement des compagnies pétrolières internationales dans l'amont pétrolier et gazier mondial est reparti à la hausse, privilégiant cependant les zones hors OPEC. Notre pays n'en a cependant pas profité.
L'instabilité en matière juridique et réglementaire, les errements d'une décennie de gestion ont altéré l'image de l'Algérie et amoindri son intérêt pour les compagnies pétrolières internationales. L'échec des précédents appels d'offres démontre bien cela. Alors qu'ils ont été multipliés par trois entre 2005 et 2012, passant de 214 à 640 milliards de dollars, nous avons connu une désaffection des compagnies pétrolières pour notre domaine minier notoirement très prospectif. Nous sommes, en 2012, au cœur d'un cycle haussier entamé en 2010 et qui concerne toutes les régions du monde, à commencer par l'Europe (+26%) et la CEI (+23%). Des zones encore peu explorées, comme l'Afrique de l'Est, attirent maintenant les investissements (20 gisements ont été découverts dans cette partie du globe, essentiellement du gaz).
L'investissement devrait être de 723 G$ en 2013 et nous devrions en tirer avantage pour relancer notre amont, en déclin du fait de la gestion catastrophique de la dernière décennie. Aujourd'hui, alors que nos ressources gazières sont conséquentes, nous n'avons pas les volumes nécessaires pour défendre nos parts de marché en Europe et sommes à un niveau de vulnérabilité critique. à mon avis, il faut considérer la nouvelle loi à partir de cette réalité.
Car pour relancer notre amont, il faut non seulement l'investissement important que cela suppose avec le risque lié à l'exploration, il faut aussi la technologie. La nouvelle loi est pragmatique et me semble être un levier pour relancer notre amont qui en a urgemment besoin. La loi définit les ressources conventionnelles et non conventionnelles et encourage l'investissement dans ces dernières ainsi que dans l'offshore. Elle comporte aussi une fiscalité plus incitative, fondée sur la rentabilité des investissements, plus flexible et souple, prenant en compte notamment les petits gisements. Je pense qu'elle est en mesure de rassurer les compagnies pétrolières et d'attirer les investissements.
Faut-il développer en urgence les ressources non conventionnelles eu égard à la chute de la production de gaz et de pétrole ?
Le niveau des réserves gazières annoncées par l'Algérie, soit 4500 milliards m3 pour le gaz (en théorie 56 années de production au rythme actuel), reste, selon nous, critique du fait d'une série de raisons, parmi lesquelles (i) la production excessive sur le gisement de Hassi R'mel et la réduction du cyclage qui a altéré gravement le gisement (ii) le dynamisme excessif de la demande interne, notamment les usages industriels (pétrochimie) dont la pertinence reste à établir. Si le déclin de notre production pétrolière est facilement réversible, celui de notre production gazière (conventionnelle) semble malheureusement beaucoup plus complexe à traiter.
Au vu du dynamisme de la demande interne, dans l'état actuel des réserves connues, l'Algérie pourrait disparaître en tant qu'exportateur dans moins d'une vingtaine d'années au grand maximum. Alors que le gisement de Hassi R'mel qui fournit à lui seul 60% de la production nationale a déjà produit environ 60% de ses réserves récupérables, la demande gazière nationale croît au rythme de 4% par an et pourrait atteindre en 2019, selon le CREG, 45 milliards m3 (scénario moyen) et 55 milliards m3 (scénario fort). Selon ces prévisions, l'Algérie cessera d'exporter du gaz naturel dès 2020. Les réserves gazières algériennes sont limitées comparativement aux réserves moyen-orientales ou russes. Qu'on en juge :
Le potentiel algérien en gaz non conventionnels semble conséquent et suscite l'intérêt des compagnies internationales. L'US Geological Survey et l'AIE créditent l'Algérie de réserves de gaz non conventionnels équivalentes aux réserves américaines. Selon le PDG de Sonatrach, qui se fonde sur les premières estimations d'organismes internationaux, les réserves algériennes en gaz non conventionnels représenteraient quatre fois les réserves de gaz conventionnel. Cela les placerait autour des 8000 à 10 000 milliards m3. Ces chiffres, selon des experts consultés, semblent raisonnables. Mais tant que des forages et des études approfondies ne sont effectués, je préfère parler de ressources.
Le potentiel existant donnerait un avenir gazier pour l'Algérie, car il se conjuguera avec les ressources conventionnelles existantes et à découvrir. Mais le développement des gaz de schiste en Algérie ne fournira pas de volumes de gaz additionnels avant 2020, particulièrement dans le bassin d'Illizi qui est un réservoir compact intéressant, à fort potentiel dans les non-conventionnels. Ainsi, jusqu'à la fin du siècle, notre pays pourrait maintenir sa place sur le marché régionalisé qui est le sien.
L'industrie des non-conventionnels jouera un rôle clé dans le paysage gazier futur. Mais nous devons veiller à y entrer non pas avec nos ressources en étant un “sleeping partenaire", mais par nos acteurs, par Sonatrach et ses filiales de service, et viser à figurer parmi les leaders. Il nous faut déclencher un véritable plan stratégique comprenant (i) développement technologique de Sonatrach, des sociétés de service nationales et des universités et PME (ii) acquisition d'actifs internationaux, prise de participation dans des sociétés intervenant dans le domaine ainsi que dans des permis d'exploration et de production. Commencer par les sociétés intervenant en Algérie. Il faut lier l'ouverture des gisements algériens à des alliances stratégiques avec des leaders.
Considérant la pression concurrentielle qui s'exerce sur l'Algérie, nous pensons nécessaire d'agir sur deux niveaux : long terme et court terme simultanément. Le développement des renouvelables pour la génération électrique permettra de libérer des volumes de gaz à court terme. Cela soulagera la pression qui s'exerce sur nos gisements et risque de compromettre leur sauvegarde et leur développement. Hassi R'mel en est du nombre. La relance du développement gazier autant dans le conventionnel que dans le non-conventionnel apportera des solutions dont les effets ne pourront se manifester au plan des volumes que sur le long terme. Dans l'immédiat, les renouvelables sont à privilégier. L'Algérie dispose d'un potentiel indiscutable. Le recours aux renouvelables permet de mettre sur le marché des capacités électriques et libérer des volumes de gaz à l'export dans des délais record.
Cela nous permettra de répondre à la croissance de la demande et aussi utiliser les volumes de gaz pour défendre nos parts de marché en Europe face à des concurrents très agressifs comme le Qatar et demain la Russie avec le gazoduc Southstream qui transporte plus que nos exportations gazières. Le coût économique des renouvelables est compétitif par rapport aux gaz non conventionnels, toutes choses égales par ailleurs. Dans les renouvelables, solaire essentiellement, nous devons également viser à figurer parmi les leaders. Le propre d'une industrie émergente, c'est son évolution darwinienne. C'est valable aussi pour les hydrocarbures non conventionnels. Les règles et la hiérarchie entre acteurs sont bouleversées. Comme dans les écrans plasma ou la photo numérique, elle a bouleversé la hiérarchie et ouvert des perspectives stratégiques inespérées aux challengers audacieux. L'ensoleillement naturel de notre pays renforce notre position de négociation avec les leaders actuels. Les Européens, pionniers de cette industrie avec les Américains, sont dépassés par les Chinois notamment, aujourd'hui premiers producteurs de panneaux photovoltaïques. Ils ont besoin de “profondeur stratégique", faute de quoi ils disparaîtront. Nous pouvons leur apporter la taille critique avec l'étendue de notre potentiel et de notre marché, leur ouvrir des perspectives stratégiques et leur permettre de résister efficacement à leurs concurrents asiatiques. Il faut viser des acquisitions d'actifs avec prise de contrôle de sociétés maîtrisant la technologie.
Nous ne pouvons pas permettre qu'à la faveur de projets comme Desertec ou Transgreen on fasse de notre pays un exportateur de soleil après qu'il fut un exportateur d'hydrocarbures. Nos acteurs énergétiques, nos universités et nos PME doivent être mobilisés dans une démarche d'ensemble coordonnée au plus haut niveau de l'état.
Dans tous les cas, le dynamisme de la demande interne doit être contenu. Tout ceci ainsi que la gestion de notre domaine minier, très perfectibles, soulignent la nécessité d'un contrôle citoyen des questions énergétiques et l'urgence de remettre en fonctionnement le Conseil supérieur de l'énergie.
Nous assistons à de profondes mutations dans l'industrie gazière, avec une plus grande compétitivité du marché gazier européen. Un responsable de GDF a affirmé que sa compagnie éprouve des difficultés à commercialiser le gaz algérien dans l'Hexagone. Cette contrainte prétendue ou réelle peut-elle constituer une sérieuse menace sur nos ventes de gaz au marché français et par extension au marché européen ?
Pour l'Algérie, le marché gazier européen est son marché naturel, vers lequel elle adresse l'essentiel de ses volumes, auquel elle est raccordée par trois gazoducs transcontinentaux. Sa part de marché en Europe décroit régulièrement (12% en 2010, 10% en 2011), pendant que la part de marché du Qatar, inexistante il y a quelques années, double en l'espace de deux ans pour atteindre 8%. Le Qatar, très agressif commercialement, approvisionne l'Europe par voie GNL. Il a constitué d'importantes capacités de liquéfaction (77 millions de tonnes), les premières mondiales.
Il vise un leadership mondial et une place de second en Europe où il composerait avec le leader, la Russie, qui détient 23% des parts de marché en Europe et va consolider sa position avec la mise en service du gazoduc Southstream qui transporte 63 milliards m3 et approvisionnera l'Europe du Sud, notre marché naturel. Un deal entre le Qatar et la Russie semble être à l'œuvre. Nous vivons une mutation structurelle de la scène énergétique et gazière, en particulier avec une rupture du cloisonnement entre marchés (européen, américain, asiatique), le bassin atlantique devenant zone d'arbitrage, entre énergies et entre segments de la chaîne gazière.
De très structuré en 2000, avec 12 pays producteurs et 11 importateurs, le marché gazier est aujourd'hui totalement ouvert avec la multiplication des flux et un nombre de pays importateurs et exportateurs qui a “explosé", soit 18 pays producteurs et 23 importateurs.
Le GNL représente 30% du marché, en progression de 4,5% par an, soit un rythme deux fois supérieur à celui de la production mondiale de gaz (2,1% par an) et plus rapide que les échanges par pipeline interrégionaux (3,0% par an). Il devrait plus que doubler entre 2007 et 2030, permettant de fluidifier le marché. L'augmentation de la taille des méthaniers qui atteignent aujourd'hui 261 000 m3 et l'allongement de leurs routes tendent à modifier les règles du jeu. De nouvelles zones d'exportation vont aussi apparaître avec le Mozambique et le Cameroun, mais aussi, bien évidemment, les Etats-Unis.
Considérant son expertise et son excellence dans le GNL, l'Algérie devrait postuler à figurer parmi les leaders. De nouvelles articulations entre Sonatrach, les PME nationales et les universités doivent être mises en chantier, car il n'est pas possible que nous rations ces opportunités qui agiront profondément sur les équilibres et les rapports des forces dans cette industrie et où nous avons tous les titres pour assurer le leadership, sans doute avec de nouvelles approches partenariales et l'acquisition résolue et volontariste d'actifs internationaux dans le domaine. Les prix du gaz diffèrent selon les trois grandes régions consommatrices 3.44 $/MBtu au Henry Hub en Amérique du Nord (ils devraient remonter aux environs de 5 ou 6 $/MBtu, car inférieurs au coût de production du gaz de schiste), 10 $/MBtu en Europe et 14 $/MBtu en Asie.
Dans le marché européen libéralisé, il y a désormais coexistence d'un marché spot de court terme avec les contrats de long terme à travers lesquels nous commercialisons l'essentiel de notre gaz.
Les prix sur le marché spot, alimenté par le GNL principalement qatari sont en dessous des prix sur les contrats de long terme et tendent à orienter le marché.
Aujourd'hui, tous nos clients demandent à ce que les prix sur les contrats suivent au moins partiellement les prix du court terme. Cela aurait pour conséquence de reporter sur le producteur et le risque marché qu'il assume déjà, et le risque volume, ce qui est inacceptable. Il pourrait renoncer à investir pour créer les capacités nécessaires satisfaisant la demande future, engendrant de graves ruptures d'équilibre à long terme. Nous ne cessons de le dire à nos partenaires européens qui prennent aussi le risque de s'exposer exagérément à la source russe mais aussi au GNL qatari lequel pourrait s'intéresser demain à d'autres marchés et délaisser l'Europe.
Nous pensons qu'un deal est à l'œuvre qui comprendra les grands pays consommateurs OCDE et émergents ainsi que les grands producteurs OPEC (Arabie Saoudite, Irak, Koweit, Qatar pour le gaz). L'Iran le rejoindra plus tard. Cet axe mènera la transition énergétique depuis un modèle de consommation dominé par les énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon) vers un modèle non carboné, non fossile, équilibré par les renouvelables et le nucléaire.
Cela explique les postures saoudienne, koweitienne et qatarie pour le gaz notamment. L'Algérie peut rejoindre ce deal, forte notamment de son potentiel en non conventionnels et en solaire. Elle ne peut le faire qu'en s'appuyant sur ses acteurs énergétiques dont elle doit impulser urgemment et impérativement le développement.
(*) Consultant international en stratégie,
mouradpreure.unblog.fr


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