Résumé : Le frère et la sœur échangent quelques confidences. Azad est heureux de constater que sa sœur se rapproche de lui. Il se promet de veiller sur elle. Il saura la protéger des aléas de l'existence, d'autant plus qu'elle semblait souffrir du même syndrome que lui : le manque d'affection. Pour commencer il lui offre un premier cadeau, et lui promet qu'il ne sera pas le dernier. Pour son père, il avait fait l'effort d'acheter une montre en or, et pour sa belle-mère une bague. Il ne pouvait acheter autre chose que des bijoux, il ne connaissait ni les goût vestimentaires de ses parents, ni leurs tendances. Les bijoux peuvent passer. C'est toujours ce qu'on offre de mieux lorsqu'on a les moyens. - C'était comment quand tu vivais en France ? Il se rendit compte que sa sœur était encore là et la fait asseoir auprès de lui avant de répondre : - C'était dur, très dur, au début surtout mais j'ai tenu bon, j'ai bossé, j'ai traversé le désert. J'ai enfin pu décrocher mes diplômes. Je suis arrivé à mon but. Bien après, lorsque j'ai commencé à exercer comme psychologue dans un grand hôpital privé, j'ai compris que l'être humain, dans sa recherche du bonheur, demeure insatiable. Parfois, on a tout ce dont on peut rêver, mais on n'est pas heureux. Finalement c'est quoi le bonheur ? Elle hausse les épaules : - Je ne sais pas Azad. Il soupire : -Il pourra se résumer à deux choses : l'amour et une bonne santé. Ces deux facteurs sont l'essentiel dans la vie d'un être humain, le reste importe peu. Ni l'argent, ni la célébrité, ni aucune autre chose au monde ne pourra contribuer à faire de lui un être heureux. Il se passe une main dans les cheveux : - J'ai mis du temps pour le comprendre, mais le jour où la vérité s'est montré à moi dans toute sa nudité, j'ai su que j'avais élucidé un mystère, celui du bonheur sur terre. Il sourit : - Tu es trop jeune encore pour comprendre tout ça petite sœur mais bientôt, je t'enseignerais les notions modernes de la psychologie.Tu verras qu'il suffit de peu pour arriver à rendre un être heureux. - Je suis déjà heureuse de te savoir avec nous, Azad. - Moi aussi, mais en dehors de moi, es-tu un peu plus proche de notre père ? Elle baisse les yeux : - Pas vraiment, il est tout le temps occupé dans son bureau. Certes, il me gâte à sa manière : il me donne de l'argent pour aller m'acheter ce dont j'ai envie, il pense à mes anniversaires, m'offre des cadeaux. - Une façon de se disculper. Je crois qu'il n'arrivera jamais à aimer quelqu'un. - Pourquoi dis-tu cela ? - Oh, c'est un peu difficile à t'expliquer. N'oublie pas que c'est mon père à moi aussi, n'empêche qu'il ne s'est jamais inquiété de mon sort. Cela fait plus de dix années depuis que j'ai quitté la maison, il ne m'a jamais contacté ou écrit. J'ai tenté de donner de mes nouvelles de temps à autre, disons que c'était pour ne pas couper carrément les ponts. - Je comprends. - Il n'a pas l'air heureux de me revoir non plus aujourd‘hui. Je me suis senti comme cet invité qui arrive au mauvais moment chez des gens qui se sentaient dans l'obligation de le recevoir. Katia garde le silence. Azad avait compris qu'elle ne pouvait lui révéler certaines choses...D'ailleurs il ne voulait rien savoir. Il savait déjà tout, et puis quel vilain homme il était. Que pouvait-il donc espérer ? Que sa sœur lui rapporte les conversations de ses parents à son sujet ? Il lui donne une tape sur le dos : - Je vais tâcher de dormir un peu. Vous dînez à quelle heure? - Vingt-et-une heures. - Bien, alors tu m'appelleras. - Compte sur moi. Elle tire sur la petite chaîne en or, qu'elle avait mise autour de son cou : - Merci, merci encore Azad pour ce magnifique bijou. Elle sortit et referma la porte derrière elle. Azad s'allonge sur son lit et fixe le plafond un moment. Il pensait passer quelques jours sous le toit de son père. Du moins jusqu'à ce qu'il s'installe ailleurs, mais tout compte fait, il préférera dénicher un appartement le plus tôt possible afin de quitter les lieux rapidement. Pourra-t-il supporter davantage le regard désapprobateur de sa belle-mère et le mépris de son père ? Il se rappelle son adolescence, et le vide affectif dont il avait souffert, et qui l'avait tant marqué. Ce n'était pas par hasard, qu'il avait opté pour des études en psychologie...Il voulait découvrir les tréfonds fort complexes de l'âme humaine. Dieu avait voulu mettre en chaque être humain une conscience afin que ce dernier comprenne ses limites vis-à-vis de ses semblables. Hélas, ce n'était pas tout le monde qui ressentait les remords de la conscience, beaucoup de gens cachent leurs méfaits derrière une carapace d'ignorance. Savent-ils au moins qu'ils étaient dotés d'une conscience ? (À suivre) Y. H.