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La famille qui avance et la famille qui recule
Expression galvaudée ou réelle lutte de pouvoir dans les écrits de Djaout
Publié dans Liberté le 26 - 05 - 2013

Vingt ans après l'assassinat de Djaout, sa célèbre dichotomie, la famille qui avance et la famille qui recule, est toujours d'actualité. Nous avons voulu remettre au goût du jour les rapports conflictuels entre ces deux formations idéologiques par le biais de l'analyse thématique des romans de Djaout et de ses chroniques parues dans l'hebdomadaire Ruptures.
La constatation élémentaire est que les thèmes développés dans les écrits journalistiques ne se distinguent pas de ceux qui sont traités dans les écrits littéraires. Il reste donc à affiner l'analyse thématique et idéologique. Mais revenons tout d'abord au “message" transmis par la thématique djaoutienne.
Celle-ci sous-tend un combat entre deux “familles" idéologiques : l'une est surannée, l'autre est progressiste. Cette dernière est sans nul doute celle de Djaout étant donné les arguments qu'il déploie pour la défendre. Quoi qu'il en soit, la mise en opposition de ces deux familles contribue à la symbolisation discursive des formations idéologiques données. Le dessein de Djaout est d'amener les lecteurs, encore indécis quant à la décision à prendre envers la formation idéologique réactionnaire, à rejeter celle-ci et de soutenir les lecteurs déjà convaincus de sa nocivité. Une opposition dialectique ne pouvait que convenir à cette entreprise. Il s'agit, par conséquent, de se focaliser sur les préoccupations de cette formation pour les tourner en dérision avec un ton aussi sérieux qu'objectif. Il faut alors répondre au discours réalisant cette formation par un contre-discours qui dévoile la formation idéologique du journaliste. À chaque fois donc, la même préoccupation, le même thème sont regardés sous l'univocité de la formation idéologique réactionnaire et sous le prisme de la formation idéologique réformiste. Des thèmes comme l'histoire, l'identité, l'école, la femme ou encore la liberté d'expression sont donnés en deux versions : avec un traitement discursif obéissant aux règles de la formation idéologique combattue par Djaout et avec un traitement discursif régi par la formation idéologique progressiste. La thématique de l'œuvre de Djaout est la même qu'il s'agisse de littérature ou de journalisme. Ce qui est différent, c'est le traitement discursif et argumentatif de ces thèmes. Ces derniers rendent compte de la formation idéologique de l'écrivain-journaliste. Cette formation s'inscrit dans le mouvement de rupture opéré aussi bien dans l'écriture que dans l'horizon d'attente du lecteur.
Au niveau de l'écriture, les thèmes abordés par Djaout sont d'actualité. Les thèmes classiques de l'histoire et de l'identité sont revisités sous l'angle du mouvement. Au niveau de l'horizon d'attente, les préoccupations de la société algérienne sont envisagées sous le prisme de l'objectivité dans une restitution, après décorticage, aussi fidèle que faire se peut. Toutefois, un traitement littéraire permet davantage de rêve et une réception des plus favorables. En effet, les esprits sont plus perméables au discours littéraire étant donné son caractère fictionnel. Ils le sont moins au discours journalistique perçu comme un discours sérieux. C'est ce traitement entre discours sérieux et discours fictionnel que nous avons voulu mettre en évidence. La thématique journalistique fait transparaître la “lutte" entre les deux familles idéologiques de l'Algérie post-indépendante : la famille qui avance et la famille qui recule. Cette lutte est symbolisée par plusieurs dichotomies : république/foi, “laïco-assimilationniste"/ arabo-islamiste, liberté/censure, démocrates/gouvernants-islamistes, Algérie algérienne/non à l'Algérie algérienne, pluralisme/parti unique, pour n'en citer que celles-là. Cette vision dialectique des rapports entre les formations idéologiques “dominantes" en Algérie constitue le moteur du discours journalistique djaoutien. Ainsi la critique de la formation idéologique rétrograde des arabo-islamistes est-elle réalisée par la valorisation et la mise en avant de la formation idéologique d'avant-garde des démocrates.
L'investissement discursif de ces deux formations se fait par la convocation d'acteurs et de facteurs constitutifs du discours journalistique. Concrètement, le journaliste oppose les deux formations idéologiques en ayant recours à un lexique réactionnaire pour l'une et progressiste pour la seconde. Ricochent ainsi en écho, d'un côté, des notions telles que nationalisme, intégrisme, foi, arabo-islamiste, etc., et de l'autre, des notions telles que pluralisme, démocratie, liberté, printemps...
Des acteurs de l'une et de l'autre formation sont convoqués. Les représentants de la famille qui recule sont clairement identifiés. Des noms fusent comme pour avertir les générations futures. Celui qui est nommément visé, c'est Belaïd Abdessalem, Premier ministre durant la “décennie noire", concept choyé par ce dernier. À ce propos, Djaout se demandait si la noirceur pouvait être circonscrite à une période précise. Ahmed Taleb Ibrahimi, ancien ministre de l'Education, ou encore Boumediène, ancien président, sont montrés du doigt et désignés comme responsables du marasme social et de l'échec de l'école algérienne à former des citoyens.
La famille qui avance a sa figure de proue en la personne de Boudiaf, président assassiné en 1991. La famille de l'Algérie algérienne a ses soutiens chez les démocrates, les libres penseurs tels que J.-P. Sartre, Lewis Carroll que Djaout n'hésite pas à citer pour appuyer ses dires et pour signifier à ses lecteurs la dimension universelle de leur lutte. Justement, cette lutte ne peut se faire que grâce à la réappropriation des appareils idéologiques aussi importants que la presse et l'école. À cet effet, la liberté d'expression chèrement acquise est à consolider. Le pouvoir qui s'obstine à la réduire au silence doit savoir que nul retour en arrière ne sera toléré.
Quant à l'école, prise en otage par le courant conservateur dont le noyau dur est foncièrement islamiste doit être libérée. En dressant un portrait au vitriol de cette institution naufragée, Djaout met l'accent sur les ravages causés par l'instrumentalisation idéologique de l'école. L'exclusion, l'intolérance, pire la violence sont les produits de cette école aux mains des idéologues nationalistes et islamistes. L'exclusion, tout d'abord, des autres composantes linguistiques et culturelles de l'Algérie a suscité un souffle démocratique à partir des années 1980. Intolérance ensuite envers une catégorie de la société, à savoir les femmes et ceux désignés comme des “laïco-assimilationnistes". Violence et meurtre enfin en réduisant au silence les premières et en minimisant leur rôle dans la société, tandis que les seconds ont été victimes d'une chasse aux sorcières.
La thématique littéraire témoigne à son tour de ce contraste entre les deux mêmes formations idéologiques. Les thèmes traités dans les écrits littéraires sont, à quelques nuances près, ceux qui sont développés dans les écrits journalistiques. La différence entre ces deux thématiques se trouve au niveau des stratégies discursives du déploiement des thèmes dans les deux types discursifs.
Le mouvement semble être le fil d'Ariane de la thématique littéraire. Le mouvement apparaît comme significatif de cette approche de la thématique littéraire djaoutienne qui est du reste une constante dans la littérature algérienne. En effet, l'histoire, l'identité, l'enfance et l'engagement sont des thèmes majeurs de la littérature maghrébine pour ne pas dire de toute production langagière. La rupture introduite par Djaout consiste dans le mouvement qui fait le lien entre ces thèmes revisités. Un mouvement vers le passé pour reconstituer l'histoire de l'Algérie dans un entrelacs avec l'identité. Un mouvement ensuite dans le territoire de l'enfance où la réminiscence est un gage d'authenticité. Un mouvement enfin vers l'avenir à travers un engagement effectif dans les combats pour la femme ou pour l'école. À travers ces thèmes, la formation idéologique réactionnaire est déconstruite, décortiquée pour faire ressortir ses contradictions, ses aberrations et sa bêtise. La formation idéologique progressiste est subséquemment mise en valeur dans ce jeu d'ombre et de lumière.
Sans doute le discours journalistique nécessite-t-il des stratégies différentes de celles en œuvre dans le discours littéraire pour défendre ou abattre une formation idéologique. Pour ce faire, l'exemplification historique, les statistiques et les citations d'autorité sont sollicitées dans le premier type, alors que dans le second, la mise en scène romanesque, voire la scénographie historique conjuguées à des procédés comme la réminiscence, l'ethos et le pathos servent de bases discursives à la formation idéologique soutenue ou dénigrée.
A. B.
(*) Maître de conférences UMMTO
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