Sommets sommaires

Le G15 est réuni depuis vendredi à Caracas. Bouteflika l’aura raté. Il lui a préféré le sommet extraordinaire de l’Union africaine de Syrte, consacré à l’eau et à la défense, déléguant à Bensalah, président du Sénat, la mission du Venezuela.
On pourrait penser que le rassemblement africain soit plus essentiel que le forum financier des 19 pays parmi les plus grandes nations pauvres d’Amérique latine d’Asie et d’Afrique. On peut aussi penser que la position de Sud face aux stratégies de développement du Nord est essentielle pour l’avenir des continents pauvres.
En guise de résultats, les chefs d’État du continent noir se sont contentés de faire une déclaration — une autre — sur le développement de l’agriculture. En fait, les quelques chefs d’État qui ont fait le déplacement et les délégations présentes ont émis une résolution demandant d’“entreprendre une étude de faisabilité d’un Fonds africain pour le développement agricole !� À ce train, le développement lui-même n’est pas pour demain et on aura encore le temps de dénoncer les méfaits de la mondialisation et du soutien de l’Europe et des États-Unis à leurs agriculteurs locaux.
En matière de défense, l’inénarrable Kadhafi a encore innové en suggérant la création d’une armée africaine unique sans attendre de se pourvoir d’une politique de défense commune. Ici, on va trop vite, parce que ce n’est pas faisable ; là , on va trop lentement parce que ce n’est pas faisable. Mais Syrte valait tout de même le déplacement : l’Afrique a pu y apprécier un Kadhafi relooké par “La tempête du désert�, qui n’a rien à voir avec les safaris de 4x4, à travers un Sahel virtuellement conquis. Revenu de sa violence explosive, transformé en “anti-proliférateur�, il a exigé que le continent soit exempt d’armes nucléaires. À quand le livre “vert écolo� ?
Bouteflika était donc plus avisé d’aller en Libye, même s’il se révèle, par la même occasion, et oubliant que le président libyen vient de boycotter un sommet moins africain et plus maghrébin qui devait se tenir à Alger, moins rancunier envers ses pairs étrangers qu’envers ses adversaires locaux. Mais il aura eu plus d’occasion de sourire que Bensalah. Parce qu’à Caracas, il n’était question ni plus ni moins que de revenir à l’“esprit du non alignement� et de se prononcer sur la suggestion du président vénézuélien de refuser “l’acceptation passive de l’ordre économique et social de la mondialisation néo-libérale� et surtout de remettre “l’énergie (du tiers-monde) au service du développement�. Par son absence, Bouteflika aura évité de s’exprimer, aux portes des États-Unis, sur les recommandations de son tiers-mondiste ami Chavez et de composer avec les gauchisants de la trempe du Brésilien Lula et les proliférateurs anti-Américains comme l’Iranien Khatami. Autant assumer le discours aujourd’hui conventionnel de la guerre de Kadhafi.
Bien que sans résultat significatif, l’Algérie devait succéder au Venezuela à la présidence du G15. Cela rendait, peut-être et pour une fois, indispensable la présence de notre Président à un forum, même stérile. Ne serait-ce que pour “la place de l’Algérie dans…�
Mais un sommet peut en cacher un autre.
M. H.